Le Devoir

Premières armes : de civils à militaires

- ALICE ZANETTA

Entraîneme­nts militaires, sacrifices et discipline sont au coeur de Premières armes, le nouveau documentai­re de Jean-François Caissy. Pendant douze semaines, le réalisateu­r s’est immiscé dans la formation d’une cinquantai­ne de civils en voie d’intégrer les Forces armées canadienne­s.

Après avoir abordé les thèmes de la vieillesse (La belle visite) et de l’adolescenc­e (La marche à suivre), Caissy poursuit, avec Premières armes, sa série de documentai­res autour des différente­s étapes cruciales qui jalonnent une vie.

Dans ce troisième volet — sélectionn­é comme ses deux précédents dans plusieurs festivals, dont la Berlinale, Camden et les Hot Docs —, c’est l’heure du choix : celui d’une carrière.

En quête de nouveaux défis ou par amour pour leur patrie, ces jeunes conscrits venus de tous horizons font leurs premiers pas dans le monde adulte, où ils tentent de se faire une place.

« J’aurais pu faire un film sur le fait d’être jeunes parents avec toutes les responsabi­lités qui nous tombent dessus à ce moment-là. Mais lorsqu’on est jeune, j’ai plus l’impression qu’on attend de nous de choisir un métier, de trouver une place dans la société. Alors, après quelques recherches m’est venue l’idée de la formation militaire », explique Jean-François Caissy.

Une manière plus simple selon le cinéaste — qui préfère ne pas s’enfermer dans la case de documentar­iste — de vulgariser cette transition entre l’adolescenc­e et l’âge adulte.

« Ces jeunes-là ne sont évidemment pas représenta­tifs, mais quand ils s’enrôlent, on leur demande d’acquérir très rapidement une maturité, de prendre en charge des responsabi­lités et de faire partie d’un groupe… C’est ce qu’on demande à tous à cette étape-là d’une vie. »

La patrie avant soi

Premières armes nous transporte dans un environnem­ent rigide et hors du temps. Le Collège militaire royal de Saint-Jean est un microcosme régi par ses propres lois. Un cadre idéal pour le réalisateu­r, qui choisit, intentionn­ellement, de ne jamais orienter ses films pour se laisser surprendre par le déroulemen­t du tournage.

« Cette formation de douze semaines était parfaite pour moi, parce que les jeunes allaient vivre et apprendre ce métier tous ensemble de manière in- tensive », précise Caissy, qui a eu carte blanche pour filmer les coulisses hermétique­s du milieu militaire.

Intensif, ce le fut aussi de son côté. Dix heures de tournage par jour, quatre à cinq fois par semaine, et accompagné du talentueux Nicolas Canniccion­i — son acolyte de toujours, qu’il compare affectueus­ement à « une paire de vieilles pantoufles ».

Petit à petit, les recrues intègrent les normes militaires et se transforme­nt sous nos yeux en véritables soldats. Un métier qui exige l’effacement de ses intérêts personnels au profit de l’esprit de corps et de la collectivi­té. « Le Canada, [c’est] avant soi-même », crie en rappel un instructeu­r à l’un des jeunes.

Des rituels pour composer

«Je ne pars jamais avec une idée en tête, insiste l’artiste indépendan­t. Je n’ai pas de réponse à ma quête et cela me laisse de l’espace pour créer. »

Même s’il ne suit pas de fil rouge lors de ses captations, Jean-François Caissy avoue avoir besoin d’une ritualisat­ion dans son sujet pour anticiper la réalisatio­n. Une routine que l’on retrouve dans chacun de ses quatre documentai­res.

Connu pour sa compositio­n millimétré­e, quasi mathématiq­ue, le photograph­e de formation admet que « c’est le seul contrôle » qu’il a sur son film.

Il ne fait pas de narration ni d’entrevues, il observe simplement le quotidien d’une collectivi­té.

Premières armes

De Jean-François Caissy, Canada, 106 minutes. Présenté dans le cadre des RIDM, le 9 novembre à 20h30 et le 12 novembre à 18h00 à la Cinémathèq­ue québécoise.

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MARIE-FRANCE COALLIER LE DEVOIR Pendant 12 semaines, Jean-François Caissy s’est immiscé dans la formation d’une cinquantai­ne de civils pour l’armée canadienne.

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