L’Histoire revue, corrigée, critiquée et peut-être recorrigée
Le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, n’écarte pas l’idée de modifier le contenu du matériel didactique du cours d’Histoire du Québec et du Canada à la lumière des critiques découlant du retrait d’une terminologie et d’une iconographie autochtone jugée stéréotypée.
« Vous savez, moi, j’ai enseigné pendant 17 ans, ça arrivait assez fréquemment que je changeais de manuel », a-t-il déclaré lundi, réagissant à la levée de boucliers de plusieurs historiens. « Je vais regarder vraiment attentivement leurs critiques et voir si vraiment il y a lieu de changer les manuels », a ajouté l’ancien professeur entre deux kiosques du Salon du livre de Montréal.
Le rappel et la réimpression des ouvrages ont coûté 1,6 million de dollars. L’opération a permis l’ajout de « nuances sur la perception des Autochtones face à l’exploration invasive de Jacques Cartier» et l’ajout d’un «texte sur l’appropriation du territoire par les Français ». On a également éliminé toute référence à l’appellation « Amérindiens » au profit de « Premières Nations » et « Autochtones ».
Champlain
La centaine de changements apportés aux manuels par le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MEES) a satisfait le Conseil en éducation des Premières Nations (CEPN). «Ce qui n’a pas été retenu, vite de même, je ne pourrais pas vous le dire », dit le conseiller à la réussite scolaire de l’organisme, Bruno Rock.
Mais, appelé à donner un exemple des stéréotypes toujours véhiculés dans les manuels, M. Rock montre du doigt la célèbre gravure de la bataille remportée par Samuel de Champlain et ses alliés algonquins, hurons et montagnais contre les Iroquois, le 29 juillet 1609. « Champlain se sent menacé. Le jeune qui voit cette représentation-là, ça peut biaiser sa pensée. Faut au moins que ce genre d’image là, qui est très forte, soit expliquée. De là à demander qu’elle soit retirée, ça, je ne sais pas. »
Iconographie
Le retrait des illustrations d’époque n’est pas souhaitable, estime le président de la Société des professeurs d’histoire du Québec, Raymond Bédard. « L’iconographie nous permet de comprendre aussi l’histoire. Ce sont des documents que nous pouvons utiliser de façon pédagogique intelligente. »
Par ailleurs, M. Bédard souligne que les intervenants autochtones ont tardé à se manifester dans le cadre du processus de révision du programme d’Histoire. « Ils ont été consultés dès le début du processus, c’est un peu dommage que ça soit arrivé si tardivement. C’est le programme d’Histoire où il y a eu le plus de consultations dans l’histoire du ministère de l’Éducation. Faire plaisir à tout le monde, ce n’est pas évident, on le sait. »
Le CEPN revendique le fin mot de l’histoire des Premières Nations. « C’est les personnes concernées qui devraient choisir », estime la responsable des communications, Eve Bastien.