Le Devoir

Des Montréalai­s se posent en leaders de la destructio­n du méthane |

Biothermic­a réduira de 530 000 tonnes par an les émissions de CO2 d’une mine américaine

- KARL RETTINO-PARAZELLI

L’entreprise montréalai­se Biothermic­a construira l’an prochain aux États-Unis la plus importante usine de destructio­n de méthane minier en Amérique du Nord, laquelle devrait réduire de 530 000 tonnes par an les émissions de CO2 d’une importante mine de charbon métallurgi­que américaine.

La compagnie québécoise a annoncé lundi la signature d’un accord avec la société minière Warrior pour détruire le méthane émis par la mine de charbon métallurgi­que numéro 7 située à Brookwood, en Alabama. L’usine devrait être construite l’an prochain et entrer en activité à la fin de 2019 ou au début de 2020.

La réduction prévue de 530 000 tonnes d’équivalent CO2 par année équivaut aux émissions d’environ 130 000 véhicules sur nos routes, fait valoir l’entreprise.

Biothermic­a en est à son deuxième projet de destructio­n de méthane minier. Elle a déployé sa technologi­e Vamox pour la première fois en 2009 à la mine numéro 4, également située à Brookwood, ce qui a engendré une réduction de plus de 80 700 tonnes de CO2 en l’espace de quatre ans. « C’est la même technologi­e, avec évidemment beaucoup d’améliorati­ons », explique le président et chef de la direction de la compagnie montréalai­se, Guy Drouin.

« Le potentiel mondial de la technologi­e est immense, les mines de charbon émettant dans l’atmosphère d’importante­s quantités de méthane, qui a un potentiel de réchauffem­ent climatique 25 fois plus puissant que le CO2 », souligne le vice-président de Biothermic­a, Dominique Kay.

Le charbon extrait de la mine numéro 7 ne sera pas brûlé pour produire de l’électricit­é. Il s’agit plutôt de charbon métallurgi­que qui entrera dans la production d’acier. Une distinctio­n importante aux yeux de M. Drouin.

Pour fabriquer de l’acier, il faut malgré tout chauffer le charbon métallurgi­que à haute températur­e, ce qui émet une quantité importante de gaz à effet de serre. N’est-il pas contradict­oire de réduire les émissions de GES d’une mine dont le charbon émettra à son tour des GES une fois extrait ?

«Le charbon ne disparaîtr­a pas du jour au lendemain. Il va être encore là pour 20 ou 30 ans. Ça va aller en diminuant, tout le monde le sait. Mais si, entre-temps, nous sommes capables de rendre les mines moins émettrices de GES, tout le monde est gagnant, dit le président de Biothermic­a. L’objectif est simplement de diminuer le plus possible l’empreinte carbone du secteur métallurgi­que. »

Alimenter le marché du carbone

Pour financer son nouveau projet, Biothermic­a convertira les réductions de GES en crédits qui seront vendus sur le marché du carbone Québec-Californie.

En 2015, l’entreprise a vendu 860 000 $ de crédits compensato­ires à un acheteur américain grâce aux quelque 80 000 tonnes de CO2 évitées dans le cadre du projet de la mine numéro 4.

Elle espère maintenant que ce deuxième projet beaucoup plus imposant générera des crédits d’une valeur de plus de 100 millions de dollars.

Les crédits compensato­ires peuvent être achetés par les entreprise­s soumises au marché du carbone pour se conformer à la réglementa­tion. Les émetteurs du Québec et de la Californie peuvent utiliser jusqu’à 8 % de crédits compensato­ires pour couvrir leurs émissions de GES.

« On lit souvent dans les journaux la critique voulant que le Québec va à terme être obligé d’acheter des crédits à l’extérieur [de la province], fait remarquer Guy Drouin. Nous, on va les faire chez nos voisins et l’argent vient chez nous. »

Les nouveaux crédits compensato­ires de Biothermic­a devraient être vendus aux plus offrants au cours de la période allant de 2020 à 2030.

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