Damien Bonnard, a beau mentir…
L’acteur français à propos de la nouvelle comédie fantaisiste de Pierre Salvadori En liberté !
Yvonne, lieutenante de police, a perdu son époux Jean il y a un an. Également policier, ce dernier, mort en service, est considéré comme un héros: une impression que la jeune femme renforce auprès de son fils Théo en lui contant les hauts faits de la carrière de feu son papa. Mais voilà qu’au hasard d’une arrestation, Yvonne apprend que Jean était en réalité un ripou de première, ce que lui confirme à regret Louis, ancien partenaire du défunt qui en pince pour la veuve.
Se mêlent à (ou plutôt s’emmêlent dans) la situation Antoine, auprès de qui Yvonne veut faire amende honorable car emprisonné à tort par Jean, et Agnès, la conjointe ébranlée de l’ex-détenu qui peine à se réinsérer. En liberté!, la plus récente comédie de Pierre Salvadori, multiplie les quiproquos sur fond de mensonges en série. Interprète de Louis, Damien Bonnard revient sur l’aventure.
«À la lecture du scénario, c’est la folie du récit, tout le burlesque des situations, qui m’a séduit», raconte Damien Bonnard au cours d’un entretien réalisé plus tôt cet automne lors de son séjour au Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue.
«Paradoxalement, mon personnage est peut-être le moins extravagant — cet amoureux éperdu qui est resté silencieux pendant des années pour protéger les autres, surtout Yvonne. Du coup, il y avait quelque chose de super touchant chez lui. Mais toute la prémisse du film m’a beaucoup fait rire et m’a ému, aussi, car il y a beaucoup d’émotion qui émane de la drôlerie. »
Désigné Meilleur espoir masculin aux César en 2017, Damien Bonnard donne ici la réplique à Adèle Haenel, Pio Marmai et Audrey Tautou, une habituée de l’univers de Pierre Salvadori.
De la continuité
Un univers qui, depuis les tout débuts du cinéaste avec le délicieux Cible émouvante, sur les péripéties d’une arnaqueuse et d’un tandem mal assorti de tueurs à gages, met en scène des personnages diversement affabulateurs. Dans des comédies subséquentes, comme Les apprentis,… comme elle respire, Hors de prix ou Vrais mensonges, le spectre va du déni à la mystification.
En liberté! ne fait pas exception dans ce refus caractéristique de Salvadori de ne pas poser de jugement moral sur les actions volontiers immorales de ses personnages.
«Un truc qui est très intéressant avec Pierre, c’est que ce qui enclenche son processus d’écriture, ce n’est jamais une idée d’intrigue, mais un personnage. Il lui invente une vie, une trajectoire, et il met ça en banque avec d’autres personnages, puis vient un moment où il rassemble plusieurs de ces personnages, qui le touchent pour des raisons différentes, et il imagine alors une histoire qui les relierait tous ensemble.»
À la base
Selon Damien Bonnard, au-delà des élans fantaisistes que provoque l’accumulation d’imbroglios par personnages interposés, Pierre Salvadori se trouve un peu revenir aux bases du cinéma. «C’est-à-dire: raconter une histoire en images. Sauf qu’en plus, il déconstruit ça en insérant des histoires à l’intérieur de l’histoire, avec ces récits héroïques qu’Yvonne raconte à Théo, puis qu’elle se rejoue mentalement en les modifiant au gré de ses découvertes et de son désenchantement par rapport à la mémoire de Jean. C’est très habile. »
Pour l’anecdote, c’est la mère de Pierre Salvadori qui inspira cette idée à son fils en lui confiant un jour: «Tu sais, ce sont les mères qui font les pères. Je vous ai toujours raconté un père un peu plus glorieux, un peu plus gentil, un peu plus fort, un peu plus tout qu’il n’était peut-être », des propos consignés dans les notes de production.
On revient ainsi à la complexité inhérente à la notion de mensonge, qui plus est lorsqu’on croit y recourir pour de bonnes raisons. Pour Damien Bonnard, la manière dont le cinéaste résout ce dilemme ne saurait être plus positive. De conclure le comédien: «Avec Pierre, tous ces jeux entre le vrai et le faux… ça fait en sorte que le réel devient enchanté. »
En liberté! prend l’affiche le 14 décembre.