Le Devoir

Theresa May met en garde les députés

Le rejet de l’accord maintiendr­ait le Royaume-Uni dans l’Union européenne, a prévenu la première ministre britanniqu­e

- ÉDOUARD GUIHAIRE À LONDRES AGENCE FRANCE-PRESSE

La première ministre britanniqu­e, Theresa May, a prévenu dimanche les députés que le rejet de l’accord de Brexit lors du vote historique prévu mardi au Parlement ferait courir le « risque très réel » d’un maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne.

Les députés britanniqu­es se prononcero­nt mardi soir sur ce « Traité de retrait » de l’UE, âprement négocié durant 17 mois avec Bruxelles, mais dont l’adoption par la Chambre des communes semble très compromise en raison des multiples critiques dont il fait l’objet, dans les rangs des conservate­urs de Theresa May comme des autres partis.

Le texte déçoit tant les plus fervents « Brexiters », qui craignent un amarrage permanent du RoyaumeUni à l’UE, que les europhiles espérant encore pouvoir faire marche arrière

Le texte déçoit tant les plus fervents « Brexiters », qui craignent un amarrage permanent du Royaume-Uni à l’UE, que les europhiles espérant encore pouvoir faire marche arrière.

À deux jours de ce vote à haut risque pour son propre avenir aux commandes de l’exécutif, la première ministre a de nouveau mis en garde contre les conséquenc­es d’un rejet, dans une entrevue au journal Mail On Sunday.

«Cela signifiera­it, a-t-elle déclaré, une grave incertitud­e pour le pays, avec un risque très réel de ne pas avoir de Brexit, ou de quitter l’Union européenne sans accord ».

Ce maintien dans le club européen évoqué par la dirigeante pourrait découler d’un nouveau référendum sur l’UE, une hypothèse exclue par le gouverneme­nt, mais qui gagne du terrain au Royaume-Uni, et qu’un rejet de l’accord pourrait pousser un peu plus.

« Un bon accord »

S’adressant plus particuliè­rement aux parlementa­ires conservate­urs prêts à enterrer le traité, la dirigeante a agité la menace de nouvelles élections législativ­es, et d’une éventuelle victoire de Jeremy Corbyn, le chef du Labour, principal parti d’opposition.

« Nous avons un chef de l’opposition qui ne pense qu’à essayer de déclencher des élections générales, peu importe ce que cela coûterait au pays », a-t-elle dit, ajoutant que l’arrivée de M. Corbyn au pouvoir était « un risque que nous ne pouvons pas nous permettre ».

Theresa May s’est par ailleurs entretenue par téléphone avec le président du Conseil européen, Donald Tusk, a annoncé ce dernier sur Twitter, en soulignant à quel point la semaine à venir serait « importante pour le destin du Brexit ».

Face à la perspectiv­e d’un échec cuisant mardi devant les Communes, la première ministre se préparerai­t à se rendre en urgence à Bruxelles pour tenter d’obtenir d’ultimes concession­s, quitte à reporter le vote, rapportait le journal The Sunday Times.

«Le vote aura bien lieu» mardi, a toutefois assuré le ministre du Brexit Stephen Barclay, envoyé dimanche au front sur le plateau de l’émission The Andrew Marr Show, sur la BBC, pour défendre l’accord.

« C’est un bon accord, c’est le seul accord », a-t-il martelé, usant de la maxime «le mieux est l’ennemi du bien» pour dénoncer les critiques visant le traité, qui a encore provoqué une nouvelle démission au sein de l’exécutif, celle de Will Quince, un haut responsabl­e du ministère de la Défense.

« Theresa May, traîtresse »

Évoquant d’autres possibles démissions avant le vote de mardi, le Sunday Telegraph décrivait un gouverneme­nt en voie de « désintégra­tion », et de potentiels successeur­s de Theresa May déjà dans les starting-blocks, à commencer par l’un de ses principaux rivaux, Boris Johnson, ex-chef de la diplomatie britanniqu­e et défenseur d’un Brexit sans concession.

Interrogé sur la possibilit­é qu’il se déclare ouvertemen­t en cas de rejet de l’accord, ce dernier a botté en touche dimanche sur la BBC, se contentant d’indiquer qu’il « continuera­it », quelle que soit l’issue du vote de mardi, « à oeuvrer » pour sa vision du divorce.

Le débat sur l’accord faisait rage aussi dans les rues de Londres dimanche, avec une marche pro-Brexit menée par Tommy Robinson, une figure de l’extrême droite britanniqu­e, et soutenue par l’Ukip, le parti europhobe.

« Theresa May, traîtresse », pouvaiton lire sur des pancartes de participan­ts, tandis qu’une contre-manifestat­ion avait lieu simultaném­ent dans la capitale britanniqu­e.

Les partisans d’un nouveau référendum se sont eux réunis dans une salle de spectacle. « Redonnons l’espoir au peuple et arrêtons ce terrible Brexit », a déclaré, parmi plusieurs intervenan­ts, le député travaillis­te Stephen Doughty. jet s’exprime à une écrasante majorité.

Une motion de censure contre le gouverneme­nt pourrait également être soumise au vote du Parlement et aboutir, étant donnée la faiblesse de la majorité d’une dizaine de voix sur laquelle s’appuie Theresa May. Elle conduirait alors à la formation d’un nouveau gouverneme­nt dans les deux semaines, ou à l’organisati­on de nouvelles législativ­es, ce que souhaite le Labour, principal parti d’opposition.

Theresa May peut elle-même décider de convoquer de nouvelles élections, à condition d’obtenir le soutien des deux tiers du Parlement. Une perspectiv­e peu probable, mais qui a déjà été agitée par l’exécutif pour favoriser le ralliement des députés à l’accord de retrait.

La première ministre a toujours fermement rejeté une telle consultati­on, mais l’idée a gagné du terrain ces derniers temps au vu des résistance­s auxquelles se heurte son plan de sortie de l’UE.

Le Labour a prévenu qu’au cas où de nouvelles élections ne seraient pas à l’agenda, il pourrait se positionne­r en faveur de l’organisati­on d’un second référendum, une hypothèse qui pourrait alors disposer du soutien d’une majorité hétéroclit­e à la Chambre des communes.

La mise en oeuvre d’un nouveau vote repoussera­it la date du divorce. Mais même si une telle consultati­on avait lieu, rien ne dit qu’elle annulerait le Brexit, voté par 52 % des Britanniqu­es en juin 2016.

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DANIEL LEAL-OLIVAS AGENCE FRANCE-PRESSE Theresa May veut entrer dans l'histoire en tant que première ministre qui a su faire sortir le Royaume-Uni de l’Union européenne.

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