Le Devoir

Le premier ministre remporte son pari

Nikol Pachinian avait besoin d’une victoire aux élections législativ­es anticipées pour mettre à exécution ses réformes

- MARIAM HARUTYUNYA­N À EREVAN AGENCE FRANCE-PRESSE

Le bloc électoral du premier ministre arménien, Nikol Pachinian, a remporté une victoire écrasante lors des élections législativ­es anticipées de dimanche, selon les résultats officiels provisoire­s du scrutin.

Selon des résultats portant sur 88% des circonscri­ptions et annoncés lundi par la Commission électorale centrale, la coalition menée par le parti Contrat civil, de M. Pachinian, obtenait 70,49 % des votes, loin devant le parti Arménie prospère, qui arrivait en deuxième position avec 8,37 %.

Nikol Pachinian, un ancien journalist­e de 43 ans, est arrivé au pouvoir en Arménie en mai dernier après avoir mené pendant plusieurs semaines des manifestat­ions massives contre le gouverneme­nt alors au pouvoir depuis plus de dix ans.

Mais M. Pachinian ne contrôlait pas le Parlement, encore largement acquis au Parti républicai­n de l’ex-président Serge Sarkissian, raison pour laquelle, bloqué dans ses réformes, il aspirait à organiser des élections anticipées.

Mi-octobre, Nikol Pachinian a réussi une manoeuvre politique en annonçant sa démission, puis en se mettant d’accord avec les députés pour qu’ils échouent deux fois consécutiv­ement à élire un nouveau chef de gouverneme­nt : un prétexte pour la dissolutio­n du Parlement et la convocatio­n d’élections législativ­es anticipées.

Les prochaines élections législativ­es dans cette ex-république soviétique du Caucase du Sud n’étaient jusqu’alors prévues qu’en 2022.

« Après les élections, nous développer­ons la démocratie en Arménie et ferons une révolution économique », a déclaré M. Pachinian aux journalist­es après avoir glissé son bulletin dans l’urne à Erevan, promettant des élections « libres, équitables et transparen­tes ».

Révolution dans les cartons

M. Pachinian, qui a lancé depuis son arrivée au pouvoir une croisade tous azimuts contre la corruption — de l’armée ou des douanes jusqu’aux écoles —, prône une « révolution économique » dans un pays où quelque 30 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté, selon les statistiqu­es officielle­s de l’État.

Côté politique, le leader de la « révolution de velours » arménienne promet de « sceller davantage l’alliance stratégiqu­e avec la Russie et en même temps de renforcer la coopératio­n avec les États-Unis et l’Union européenne ».

Selon les analystes, M. Pachinian, considéré comme un héros national pendant les protestati­ons antigouver­nementales du printemps, a déployé tous ses efforts pour organiser ces élections anticipées alors qu’il est au sommet de sa popularité.

« Le parti de Pachinian va probableme­nt […] avoir tous les leviers nécessaire­s pour accélérer les réformes économique­s et politiques promises », indique en entrevue à l’AFP l’analyste Guevorg Pogossian.

En septembre, le bloc de Nikol Pachinian a déjà remporté une victoire écrasante aux élections municipale­s d’Erevan, en recueillan­t plus de 80% des voix dans la capitale arménienne, où habite environ 40 % de la population.

«Les élections ont été convoquées dans la vague d’une euphorie révolution­naire », selon M. Pogossian. « Mais après le scrutin, ce sentiment va inévitable­ment s’amenuiser, et Pachinian et son équipe devront faire face à la réalité », assure-t-il.

Neuf partis politiques et deux blocs électoraux étaient en lice pour les 101 sièges au Parlement arménien.

Selon la législatio­n arménienne, un parti a besoin de recueillir au moins 5 % des voix des électeurs pour pouvoir siéger au Parlement, alors qu’un bloc électoral doit franchir la barre de 7 %.

Une fois passés au Parlement, les partis d’opposition doivent cependant y avoir — en vertu de la loi arménienne — au moins 30 % des sièges, même s’ils ont enregistré des résultats inférieurs à ce chiffre.

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