Le Devoir

Le pacte sur les migrations signe la fin de la coalition

- CLÉMENT ZAMPA À BRUXELLES AGENCE FRANCE-PRESSE

Avec le départ des nationalis­tes flamands, le libéral Charles Michel prend la tête d’un gouverneme­nt de centre droit sans majorité au Parlement, à cinq mois des prochaines élections législativ­es

Le premier ministre belge, Charles Michel, a pris dimanche la tête d’un gouverneme­nt minoritair­e, après la démission des ministres nationalis­tes flamands de la coalition gouverneme­ntale, en raison d’une divergence profonde sur le pacte de l’ONU sur les migrations.

Ces démissions ont été « acceptées » par le roi des Belges à l’issue d’une rencontre avec M. Michel, venu lui présenter le nom des ministres qui héritent des portefeuil­les vacants (Intérieur, mais aussi Finances, Défense et Migration).

« Je regrette qu’on en soit arrivés là », a déclaré le premier ministre à la télévision RTL-TVI.

L’ex-ministre de l’Intérieur, Jan Jambon, issu de l’Alliance néoflamand­e (N-VA, nationalis­tes flamands), avait confirmé dimanche matin à la télévision publique RTBF que lui-même et les autres ministres de son parti allaient démissionn­er.

« C’est clair, c’est net », avait-il dit, mettant fin à plusieurs heures d’incertitud­e depuis samedi soir.

Avec le départ de la N-VA, poids lourd de la coalition belge, Charles Michel, un libéral, prend la tête d’un gouverneme­nt de centre droit sans majorité au Parlement, à cinq mois des prochaines élections législativ­es, prévues fin mai.

« C’est une coalition responsabl­e […] qui se met en place », a-t-il promis, appelant au «dialogue avec le Parlement», car des élections anticipées « risqueraie­nt bien de bloquer le pays pendant un an ».

Il a fixé en conférence de presse ses trois priorités : le pouvoir d’achat, la sécurité et la politique climatique – à propos de laquelle il dit répondre à un « appel fort » des citoyens.

Le gouverneme­nt a souvent tangué depuis quatre ans en raison des prises de position jugées radicales de la N-VA sur les migrants.

L’actuelle ministre de la Santé, Maggie De Block, qui hérite de ce portefeuil­le jusqu’alors détenu par Theo Francken, a promis de défendre « une politique à nouveau stricte, mais juste ».

« Je récupère aujourd’hui un départemen­t en crise. C’est le chaos », a-t-elle souligné dans un communiqué.

Absence de consensus

Le président de la N-VA, Bart De Wever, avait lancé samedi soir, après un conseil des ministres de la dernière chance, un ultimatum à M. Michel, laissant entendre que son parti s’en irait si ce dernier s’envolait pour Marrakech dimanche afin d’approuver le pacte de l’ONU sur les migrations.

« Je prends […] acte ce soir que la N-VA quitte la majorité », lui avait répondu M. Michel, répétant sa ferme intention de représente­r la Belgique au Maroc comme « chef de gouverneme­nt ».

«Sur ce sujet, il y a une différence profonde », a encore insisté dimanche Charles Michel. Selon lui, ce pacte est « important », car « aucun pays ne peut résoudre cette question seul ».

La N-VA était le seul des quatre partis de la coalition opposé à ce texte onusien, qui doit être approuvé lundi et mardi au Maroc par les pays membres de l’ONU, avant d’être ratifié lors d’un vote au siège des Nations unies, à New York, le 19 décembre.

Le pacte avait initialeme­nt fait l’objet d’un consensus gouverneme­ntal, avant que la N-VA ne change d’avis fin octobre.

La crise belge, latente depuis plusieurs semaines, a éclaté mardi soir, quand le premier ministre a annoncé son intention de se tourner vers le Parlement, faute d’unanimité au sein de son gouverneme­nt.

Une large majorité droite/gauche s’est dégagée deux jours plus tard en plénière à la Chambre en faveur du gouverneme­nt, isolant la N-VA au côté du parti d’extrême droite Vlaams Belang.

Ce parti anti-immigratio­n a d’ailleurs tenu samedi un rassemblem­ent à Bruxelles avec Marine Le Pen, chef de l’extrême droite française, et Steve Bannon, ex-conseiller de Donald Trump, pour dénoncer ce pacte, brandi comme épouvantai­l par les populistes dans l’UE à l’approche des élections européenne­s de mai prochain.

« Le pays qui signera ce pacte […] signera un pacte avec le diable », avait affirmé la chef de parti française.

Non contraigna­nt, le pacte de l’ONU recense des principes et une vingtaine de propositio­ns pour aider les pays à faire face aux migrations.

L’Italie, l’Autriche, la Bulgarie, la Hongrie, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie, l’Estonie, la Lettonie, la Suisse, l’Australie, Israël et la République dominicain­e ont décidé de ne pas se rendre à Marrakech.

Les États-Unis s’étaient retirés de l’élaboratio­n du pacte l’an dernier.

 ?? NICOLAS MAETERLINC­K / BELGA / AGENCE FRANCE-PRESSE ?? L’ancien conseiller de Donald Trump Steve Bannon (à gauche) et la chef du Rassemblem­ent national, Marine Le Pen (à droite), ont participé samedi à un rassemblem­ent du parti d’extrême droite belge Vlaams Belang, aux côtés de son président, Tom Van Grieken.
NICOLAS MAETERLINC­K / BELGA / AGENCE FRANCE-PRESSE L’ancien conseiller de Donald Trump Steve Bannon (à gauche) et la chef du Rassemblem­ent national, Marine Le Pen (à droite), ont participé samedi à un rassemblem­ent du parti d’extrême droite belge Vlaams Belang, aux côtés de son président, Tom Van Grieken.

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