Le Devoir

Les changement­s climatique­s au coeur de l’année 2018

- ALEXANDRE SHIELDS

L’année 2018 a été marquée par une attention particuliè­re portée aux enjeux de lutte contre les changement­s climatique­s, alors que le Québec, le Canada et la communauté internatio­nale accusent des retards importants dans le domaine. Le monde termine d’ailleurs l’année en poursuivan­t son chemin vers un naufrage climatique maintes fois annoncé par la science. Bilan des principaux dossiers environnem­entaux qui ont marqué les derniers mois.

La controvers­e de l’année

Le rachat du pipeline Trans Mountain et le projet de son expansion par le gouverneme­nt de Justin Trudeau ont été à la fois salués par l’Alberta et critiqués par le gouverneme­nt de la Colombie-Britanniqu­e. Mais au-delà de la saga politique, cette nationalis­ation d’un important projet d’exportatio­n de pétrole des sables bitumineux a été dénoncée unanimemen­t par les groupes environnem­entaux. Il faut dire que le projet doit permettre d’augmenter les exportatio­ns de pétrole albertain à raison de 325 millions de barils chaque année. Pour les écologiste­s, l’expansion de Trans Mountain facilitera la croissance de l’industrie pétrolière et augmentera les risques de déversemen­t le long du pipeline, mais aussi en milieu marin. Sans oublier que la croissance du trafic de pétroliers pourrait représente­r une menace fatale pour une population d’épaulards en voie de disparitio­n sur la côte ouest.

Le succès mitigé de l’année

La récente conférence de l’ONU sur le climat, la COP24, avait la tâche ardue de finaliser les règles de mise en oeuvre de l’Accord de Paris. Une mission d’autant plus complexe qu’avec 200 pays autour de la table, dont le gouverneme­nt climatonég­ationniste de Donald Trump, le pari n’était pas gagné d’avance. Or, les pays sont parvenus à s’entendre sur des règles relativeme­nt claires. Le hic, de taille, c’est que les pays signataire­s de l’Accord de Paris n’ont pris aucun engagement formel pour augmenter leurs engagement­s en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, et ce, d’ici 2020. Or, le plus récent rapport du Groupe intergouve­rnemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) est formel : il faudrait dès maintenant opérer un virage majeur vers une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Pour le moment, si tous les pays respectent leurs engagement­s, le réchauffem­ent atteindra trois degrés d’ici 2100, le double de l’objectif le plus ambitieux fixé dans l’Accord de Paris.

L’échec confirmé de l’année

Le constat est clair, même si le gouverneme­nt libéral de Philippe Couillard l’a toujours nié : le Québec n’est pas en voie d’atteindre sa cible de réduction d’émissions de gaz à effet de serre pour 2020. Le plus récent bilan des émissions, soit celui de 2016, indique en effet que le recul atteignait alors 9,1 % par rapport à 1990, alors que l’objectif est de 20 %. Le bilan de mi-parcours du Plan d’action 20132020 sur les changement­s climatique­s démontre même que les investisse­ments prévus de 4 milliards de dollars permettron­t seulement de stabiliser les émissions. Pendant ce temps, le rapport du Conseil de gestion du Fonds vert, qui finance ce plan, conclut que des millions de dollars ont été dépensés dans des mesures inefficace­s. Le gouverneme­nt de François Legault, qui a reconnu l’échec de la cible de 2020, promet un plan climatique « efficace » au cours des prochains mois.

La crise de l’année au Québec

Avant l’automne 2017, très peu de gens au Québec savaient qu’une forte proportion de nos matières recyclable­s étaient vendues en Chine pour y être traitées. Le Québec a ainsi pu compter pendant des années sur ce déversoir de matières souvent peu triées, et donc de faible qualité et de faible valeur. Or, cet énorme marché, dont dépendaien­t plusieurs pays occidentau­x, s’est refermé au tournant de 2018, provoquant une véritable crise des matières recyclable­s qui a notamment frappé le Québec. Le gouverneme­nt a injecté, dans l’urgence, quelques millions de dollars pour soutenir les centres de tri pris avec des tonnes de matières invendues. Mais au-delà des mesures déjà prises, plusieurs acteurs de l’industrie estiment qu’il faudra développer davantage le principe de l’« économie circulaire », c’est-à-dire que le Québec devra impérative­ment recycler davantage ici, au lieu de dépendre des exportatio­ns matières récupérées par les citoyens.

La bonne nouvelle de l’année

Pour la première fois en plus de 20 ans, le gouverneme­nt du Québec et celui du Canada ont convenu en 2018 d’établir une zone de protection marine dans le Saint-Laurent, avec la protection d’un territoire marin de 1000 km2, nommé le Banc-des-Américains, situé à l’est de la Gaspésie. La limite nord se situe à la pointe du parc Forillon et la limite sud-ouest, tout juste à l’est de l’île Bonaventur­e. Selon la descriptio­n qu’en fait Pêches et Océans Canada, ce secteur « est caractéris­é par la diversité de ses habitats, par la présence permanente ou saisonnièr­e de nombreuses espèces à valeur commercial­e et de baleines, par la présence d’espèces en péril et par une grande diversité de mollusques et de crustacés ». Le gouverneme­nt provincial et le gouverneme­nt fédéral auront toutefois fort à faire pour respecter l’objectif de protéger 10 % de la portion québécoise du Saint-Laurent d’ici 2020, alors que ce taux avoisine aujourd’hui les 2 %.

Le gouverneme­nt de François Legault, qui a reconnu l’échec de la cible de 2020, promet un plan climatique « efficace » au cours des prochains mois

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