Le Devoir

Donald Trump menace de fermer la frontière avec le Mexique

- MARCO FORTIER Avec l’Agence France-Presse et CNN

Dans un autre coup d’éclat dont il a le secret, le président Donald Trump a menacé vendredi de fermer complèteme­nt la frontière entre les États-Unis et le Mexique si les démocrates maintienne­nt leur refus de financer son mur anti-immigrants.

Le président américain a formulé cette nouvelle menace au septième jour de l’impasse budgétaire qui paralyse environ 25 % de la fonction publique des États-Unis. Les démocrates, désormais majoritair­es à la Chambre des représenta­nts, refusent d’approuver le budget qui prévoit le financemen­t du mur de 5 milliards de dollars que le président veut ériger tout au long de la frontière avec le Mexique.

Plus de 800 000 employés fédéraux sont en congé forcé en raison de ce bras de fer budgétaire qui a des effets indésirabl­es jusque dans les parcs nationaux : des déchets s’accumulent dans les sentiers et des toilettes débordent en l’absence du personnel d’entretien.

Donald Trump fait le pari de sortir gagnant de cette impasse en montant le ton. Il a lancé une série de mises en garde vendredi matin sur Twitter. « Nous serons contraints de fermer entièremen­t la frontière sud si les démocrates obstructio­nnistes ne nous donnent pas l’argent pour terminer le mur et pour changer les lois ridicules sur l’immigratio­n », a écrit le président.

Il a aussi menacé de supprimer l’aide au Honduras, au Guatemala et au Salvador, qui « ne font rien » pour empêcher les immigrants de se rendre aux États-Unis mais qui « prennent notre argent depuis des années ».

Du théâtre

Ce n’est pas la première fois que Donald Trump menace de fermer la frontière avec le Mexique au cours des derniers mois. À moins d’une semaine des élections de mi-mandat, au début du mois de novembre, le président avait même déployé des milliers de soldats à la frontière en disant vouloir protéger la nation contre les « hordes de criminels » venues d’Amérique latine.

«Tout cela, c’est du théâtre», souligne Élisabeth Vallet, chercheuse à la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiqu­es et diplomatiq­ues de l’Université du Québec à Montréal (UQAM).

Le président aurait en théorie le pouvoir de fermer la frontière pour défendre la sécurité nationale. Il est toutefois probable que les tribunaux infirmerai­ent la décision du président, car aucune crise à la frontière ne justifie ce geste extraordin­aire, estime Élisabeth Vallet.

« Nous sommes dans une zone grise constituti­onnelle, dit la spécialist­e des États-Unis. Donald Trump est en train de réécrire la Constituti­on, qui est un vieux texte redéfini par la pratique. Le président ne respecte pas les usages, donc il réécrit la pratique. Tous les modèles qu’on avait étaient valables jusqu’à ce que Donald Trump arrive. »

Au-delà des considérat­ions légales, il serait politiquem­ent explosif pour le président de fermer totalement la frontière, à cause de l’ampleur du commerce entre les États-Unis et le Mexique : les deux pays ont échangé des biens et services d’une valeur de 615,9 milliards $US en 2017. Les chambres de commerce seraient en furie contre le blocage de ces transactio­ns, rappelle Élisabeth Vallet.

Polarisati­on extrême

Les démocrates, en tout cas, tiennent tête au président malgré la paralysie d’une partie du gouverneme­nt fédéral. « Nous sommes unis contre le mur immoral, inefficace et très coûteux du président », a indiqué un porte-parole de la leader démocrate à la Chambre des représenta­nts, Nancy Pelosi.

L’année 2019 commencera par une escalade de la polarisati­on de la politique américaine. Les deux chambres du Congrès reprennent leurs activités à compter de la semaine prochaine. Au moment où ces lignes étaient écrites, à la veille du congé du jour de l’An, tout indiquait qu’un compromis était hors de portée. « Il semble qu’on se dirige vers une impasse budgétaire à très long terme », a prévenu le représenta­nt républicai­n Mark Meadows, de la Caroline du Nord, considéré comme un proche de Donald Trump.

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GUILLERMO ARIAS AGENCE FRANCE-PRESSE À Tijuana, au Mexique, des voitures font la file au poste frontalier américain de San Ysidro, en Californie.

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