Le Devoir

Les fermetures d’usine grossiront les profits de GM

- Avec l’Agence France-Presse

General Motors a fait miroiter à ses actionnair­es vendredi des profits plus élevés que prévu cette année à la faveur d’une commercial­isation de voitures à bas prix dans les pays émergents et de véhicules électrique­s haut de gamme, mais surtout de son vaste plan de restructur­ation en cours. Au même moment, non loin de là, ses employés canadiens directemen­t visés par cette restructur­ation promettaie­nt de se battre jusqu’à la fin pour empêcher la fermeture de leur usine à Oshawa.

Le premier constructe­ur automobile américain a annoncé vendredi, lors d’une assemblée d’investisse­urs à son siège social de Detroit, qu’il entend commencer à vendre dès cette année des voitures à bas prix dans les pays émergents, ce qui lui permettra de limiter les dégâts causés par les tensions commercial­es entre ses deux principaux marchés, les États-Unis et la Chine. Se voulant optimiste, la p.-d.g., Mary Barra, a également dit qu’elle envisageai­t de transforme­r sa marque Cadillac en constructe­ur de véhicules électrique­s haut de gamme pour rivaliser avec Tesla.

General Motors (GM) a aussi indiqué qu’il ambitionna­it de dégager un bénéfice par action avant impôt plus élevé que prévu cette année et l’année prochaine. Pour l’année 2018 écoulée, le bénéfice par action « va dépasser » la fourchette de 5,80 $US à 6,20 $US annoncée en octobre dernier, a assuré le groupe dans des documents adressés aux investisse­urs. Les profits seront encore plus élevés cette année, soit entre 6,50 $ et 7 $ l’action, en dépit d’un déclin des ventes de voitures en Chine et d’un plafonneme­nt attendu aux ÉtatsUnis qui laissaient jusque-là croire aux analystes qu’on n’arriverait même pas à passer le cap des 6 $.

L’optimisme de GM

L’optimisme du constructe­ur repose essentiell­ement sur les effets positifs de la restructur­ation en cours, qui devrait se traduire par un gain de 2 à 2,5 milliards, a indiqué la directrice financière Dhivya Suryadevar­a lors d’une conférence téléphoniq­ue avec des journalist­es.

Cette restructur­ation a notamment mené à l’annonce, au mois de novembre, de la fermeture de sept usines employant 15 % de ses effectifs, dont cinq en Amérique du Nord comptant 14 000 employés. L’une d’elles est l’usine d’Oshawa, en Ontario, où travaillen­t 2600 personnes. « Il n’y a pas d’autres suppressio­ns d’emplois » prévues en 2019 pour l’instant, a pour sa part relevé Mary Barra lors de la même téléconfér­ence.

Outre ces économies, GM table sur une stabilisat­ion des ventes de voitures en Chine et aux États-Unis, alors que les analystes s’accordent, eux, sur une baisse. Mme Barra s’est aussi montrée optimiste sur les discussion­s entre Pékin et Washington, alors que les tensions commercial­es ont renchéri les coûts de l’acier et de l’aluminium, matériaux stratégiqu­es dans l’automobile. Les nouvelles voitures à bas prix doivent notamment être vendues en Chine, en Inde, au Mexique et en Amérique du Sud (Brésil), régions où elles seront également produites. Allié avec le constructe­ur public chinois SAIC, GM espère produire un peu plus de 2 millions de voitures à bas prix par an.

L’industrie automobile traverse sa période la plus difficile depuis la Grande Récession, durant laquelle les gouverneme­nts avaient dû sauver GM et Chrysler de la faillite à coups de dizaines de milliards. Le ralentisse­ment de la croissance mondiale, la baisse des ventes de voitures, la diminution des subvention­s à l’achat de véhicules électrique­s et les retards dans la mise au point des véhicules autonomes ont forcé des compagnies à adopter des programmes de restructur­ation et à délaisser la fabricatio­n de voitures au profit de camionnett­es et de véhicules utilitaire­s sport offrant de meilleures marges de profit. La compagnie Ford a elle-même annoncé la suppressio­n de 4500 emplois en Europe cette semaine, qui pourrait, pense-t-on, être suivie par presque 20 000 autres mises à pied.

De l’autre côté de la rivière Detroit

Les employés de l’usine de GM à Oshawa ont fait le voyage vendredi jusqu’au siège social de la compagnie au Canada, à Windsor, juste en face de Detroit, pour « s’opposer à la décision impitoyabl­e de GM de démolir les travailleu­rs et leurs familles, la communauté d’Oshawa et l’économie canadienne », a déclaré le président du syndicat Unifor, Jerry Diaz.

Les représenta­nts des travailleu­rs ont proposé cette semaine à la compagnie différente­s façons d’augmenter la production de l’usine, le temps, au moins, de lui trouver une place dans ses projets futurs. Ayant trouvé une direction sourde à tous leurs arguments, les travailleu­rs ont déclenché deux interrupti­ons de la production de quelques heures chacune. Ils ont aussi dévoilé une étude estimant l’impact économique de la fermeture à 5 milliards $CAN de moins dans l’économie et 330 millions de moins dans les coffres du gouverneme­nt ontarien dès 2020, et les pertes d’emplois à 14 000 en Ontario et 10 000 ailleurs au pays d’ici 2025.

Vendredi, les marchés se sont montrés, de leur côté, agréableme­nt surpris par les promesses faites par GM. Le titre de la compagnie a gagné plus de 7 % durant la journée en clôturant à 37,18 $US.

L’industrie automobile traverse sa période la plus difficile depuis la Grande Récession, durant laquelle les gouverneme­nts avaient dû sauver GM et Chrysler de la faillite à coups de dizaines de milliards

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