Les voitures compactes à l’agonie aux États-Unis
L’avenir des voitures compactes, berlines et citadines est incertain aux États-Unis, où le boom des 4X4 de ville et des camionnettes à plateau a poussé les champions locaux à abandonner progressivement leur production faute de rentabilité.
Dopée par la flambée inédite des prix du pétrole en 2008 et la crise financière, la demande pour ces « petites » voitures s’est complètement effondrée ces trois dernières années, laissant les constructeurs avec des usines en surcapacité. Ce retournement du marché s’observe actuellement au salon automobile de Detroit, où les annonces majeures des fleurons du secteur portent essentiellement sur les VUS (véhicules utilitaires sport), les pickups et les véhicules métis. Le groupe allemand Volkswagen fait partie des rares à y présenter une berline, la Passat, comme nouveau modèle devant être commercialisé en Amérique du Nord dans les prochains mois.
« Les constructeurs automobiles admettent ainsi que le boom des métis et des VUS se poursuit », en déduit Michelle Krebs, analyste chez AutoTrader. Les ventes des voitures tradition- nelles devraient s’effondrer et ne plus représenter que 21,5 % du marché automobile américain d’ici 2025, selon le cabinet LMC Automotive. L’an dernier, elles comptaient pour 31,2 % des nouvelles immatriculations, alors qu’elles représentaient encore la moitié de la demande il y a six ans.
Leur brusque dégringolade a coïncidé avec la renaissance de l’automobile américaine et la chute des prix de l’essence à la pompe, sur fond de reprise économique aux États-Unis. Symbole de ce désamour, la Toyota Camry, la Honda Accord, la Ford Fusion, la Nissan Altima, modèles populaires, ont vu leurs ventes plonger en 2018 de respectivement 11,3 %, 9,8 %, 17,2 % et 18 %. Les choses devraient empirer dans les prochains mois, estiment les analystes. Dans le même temps, les ventes de VUS ont flambé de 87 % depuis 2013, de sorte qu’ils devraient représenter environ 40 % du marché d’ici 2025, selon LMC Automotive.
Pour coller aux goûts des consommateurs et tenter de résoudre les problèmes de surcapacité, le « Big Three » américain a décidé d’appliquer une solution radicale. GM a annoncé fin novembre renoncer à six modèles. Pour sa part, « Ford perd environ 800 millions de dollars par an en vendant des compactes en Amérique du Nord», justifie Bob Shanks, le directeur financier du groupe.
Fiat Chrysler, dont le défunt p.-d. g. Sergio Marchionne avait été le premier à amorcer un désengagement des voitures compactes dès 2016, en mettant fin à la production de la Dodge Dart et de la Chrysler 200 pour se focaliser sur les VUS Jeep et les pickups RAM, a vu son action flamber à la suite de ce pari. Elle a plus que doublé en trois ans.
Outre l’effondrement de la demande, les «petites» voitures ont vu également fondre leur avantage en matière d’économie de carburant.
Les constructeurs asiatiques, comme Toyota et Honda, croient, eux, que les «petites» voitures ont encore leur place dans les usines américaines et maintiennent leur confiance. « Il y a encore 5,2 millions de véhicules vendus sur ce créneau et ça reste un gros marché sur le plan mondial et un sur lequel nous restons engagés », explique Robert Carter, responsable des ventes chez Toyota.