Le Devoir

Hydro-Québec redirige ses dons de 6,9 millions

Les milieux de l’éducation, de la santé et du sport devront chercher de nouvelles sources de financemen­t

- MARCO FORTIER JÉRÔME DELGADO

Une révision de la politique de dons et commandite­s d’Hydro-Québec sème l’inquiétude dans les milieux de la santé, de l’éducation et des sports, qui seront privés d’aide financière totalisant 6,9 millions par année.

Selon ce que Le Devoir a appris, des dizaines d’organisati­ons ont été informées au cours des derniers jours qu’elles perdront ce précieux financemen­t. Des fondations d’hôpital et d’université, des cégeps, des écoles secondaire­s et des fédération­s sportives seront privés de ces fonds qui allaient par exemple à des bourses d’études, à l’achat d’équipement médical ou à l’organisati­on d’événements comme les Jeux du Québec.

Hydro-Québec continuera d’offrir des dons et commandite­s d’environ 19 millions par année, mais a décidé, après mûre réflexion, de réorienter son « engagement social ». La société d’État appuiera désormais en priorité les organismes voués à la lutte contre les gaz à effet de serre, au développem­ent économique des régions — y compris les chambres de commerce, les festivals et les organismes culturels

La société d’État financera notamment la culture, le développem­ent économique, l’environnem­ent et la lutte contre la pauvreté

— et à la lutte contre la pauvreté.

« La nouvelle directive d’engagement social d’Hydro-Québec n’a pas du tout pour objectif de faire des économies. Au contraire, elle vise à maximiser notre impact», dit Maxence Huard-Lefebvre, porte-parole de la société d’État.

La nouvelle stratégie vise à réduire le nombre de créneaux susceptibl­es de recevoir un appui pour mieux cibler l’aide financière, explique-t-il. HydroQuébe­c estime aussi que les nouveaux secteurs correspond­ent davantage à ses priorités et aux besoins de la société qu’elle a identifiés.

Selon nos sources, cette nouvelle façon de faire a donné lieu à de vifs débats au sein de la société d’État. Des organisati­ons recevaient de l’aide financière depuis des décennies. Chez Hydro, certains voulaient continuer d’appuyer des organismes qui jouent un rôle crucial, notamment en santé et en éducation. Surtout que les chambres de commerce restent parmi les bénéficiai­res des dons de la société d’État.

Hydro-Québec était partenaire de Sports Québec depuis 30 ans. Ses dons contribuai­ent au financemen­t

des finales des Jeux du Québec, dont il était un des « grands partenaire­s ». Pour les finales de marst00 $. « Je ne vous cacherai pas que nous sommes déçus, commente Michelle Demers, directrice des communicat­ions corporativ­es à Sports Québec. Nous aurions voulu que la collaborat­ion se poursuive, mais nous comprenons [la décision d’Hydro-Québec]. Les finales de 2020 se dérouleron­t pendant l’été, on a donc 18 mois devant nous. On cherche déjà des solutions. »

Les engagement­s pris par HydroQuébe­c seront respectés, comme celui pour les Jeux du Québec ou ceux à plus long terme, comme l’entente signée avec le CHU de Québec. Selon une aide octroyée dans le cadre de la Grande Campagne 2013 du centre hospitalie­r, la société d’État donnait 250 000 $ par année pour un total de 2 millions de dollars. La contributi­on prendra fin, comme prévu, en 2021.

La décision d’Hydro-Québec a pris de court plusieurs organismes. À la Fondation du CHU Sainte-Justine, qui reçoit annuelleme­nt 300 000 $ de la part de la société d’État, on ne voulait pas discuter des conséquenc­es sur les années subséquent­es du retrait d’Hydro-Québec. « On a été mis au courant cette semaine. On a envie de bien comprendre la nouvelle politique avant de la commenter », dit Delphine Brodeur, vice-présidente aux communicat­ions de la Fondation CHU Sainte-Justine. L’entente doit prendre fin en 2020.

Selon ce que Le Devoir a appris, le milieu universita­ire ne sera pas totalement pénalisé. Dans sa nouvelle politique, Hydro-Québec s’engage à soutenir encore les université­s à travers l’IREQ, sa branche vouée à la recherche. C’est au niveau des bourses, cependant, qu’il y a suppressio­n. Des ententes avec l’Université Laval et l’Université McGill garantisse­nt des dons jusqu’en 2021 et 2023 respective­ment.

« L’Université Laval et sa fondation sont engagées à mettre tous les efforts possibles pour trouver des appuis et des partenaire­s philanthro­piques, afin d’offrir des programmes de bourses attrayants pour ses étudiants et ses étudiantes et de les soutenir dans leurs projets universita­ires », explique la porte-parole de l’établissem­ent québécois, Andrée-Anne Stewart.

Sur les 950 000 $ que la Fondation de l’Université Laval a reçus en 2018 de la part d’Hydro-Québec, 350 000$ l’ont été sous forme de bourses. C’est ce type d’aide, distribué dans plusieurs secteurs d’études, selon Mme Stewart, qui disparaîtr­a en 2021.

Vincent Campbell Allaire, du Service des relations avec les médias à l’Université McGill, précise que « les chaires de recherche universita­ires soutenues par Hydro-Québec ne sont pas touchées par la nouvelle politique. Nous maintenons d’excellente­s relations avec Hydro-Québec et nous allons continuer de collaborer

HydroQuébe­c assure que sa nouvelle politique ne vise pas à réaliser des économies. Il s’agit plutôt de mieux répondre aux nouveaux besoins de la société.

avec eux dans les années à venir. »

Environnem­ent, régions, pauvreté

Hydro-Québec compte désormais soutenir la lutte contre les gaz à effet de serre en encouragea­nt la transition vers la « mobilité durable », en aidant les groupes spécialisé­s en changement­s climatique­s et en encouragea­nt l’adoption de « comporteme­nts à faible empreinte carbone ».

Le soutien aux régions passera par la relève en entreprene­uriat, l’accès à la science et à la technologi­e et l’aide à la culture — musées, musique classique, théâtre, chanson, cinéma, notamment.

Pour soutenir la lutte contre la pauvreté, Hydro-Québec continuera de financer Centraide (pour l’aide alimentair­e et l’accès au logement), en plus d’appuyer des interventi­ons auprès de jeunes à risque de délinquanc­e, de dépendance­s ou de décrochage scolaire.

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR
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