Le Devoir

Les commission­s de suivi au coeur d’une action collective

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Le s commission­s intégrées sont revenues dans l’actualité cette semaine. Deux cabinets ontariens ont déposé de nouvelles demandes d’autorisati­on d’exercer une action collective en ajoutant trois autres institutio­ns financière­s au rang des défenderes­ses alléguées. L’enjeu : les commission­s de suivi versées à des courtiers à escompte visant à rémunérer les conseils qu’ils ne donnent pas.

Les cabinets Siskinds et Bates Barristers en sont au début de leur démarche. En élargissan­t leur recours aux banques Royale, de Montréal et Nationale cette semaine, le nombre d’actions collective­s déposées passe à sept, la liste des défenderes­ses alléguées incluant également la TD, Scotia/Dynamique, CIBC et Mackenzie. En résumé il est allégué dans ces actions que les défenderes­ses ont versé des commission­s de suivi aux courtiers à escompte auprès desquels leurs fonds communs de placement ont été vendus ou détenus. Ces paiements sont inappropri­és, les investisse­urs de ces fonds n’ayant reçu aucun service, du type conseils, pour ces frais qu’ils ont payés. Les actions visent à indemniser les investisse­urs concernés, ajoutent les cabinets. Le montant concerné a été estimé à 1,3 milliard.

Ces commission­s de suivi oscillent autour d’une moyenne de 0,78 %. Elles varient entre 0,25 et 1,5 %, et s’insèrent au sein d’un ratio de frais de gestion se situant généraleme­nt entre 1 et 3%. Elles sont intégrées aux frais de gestion du fonds d’investisse­ment et sont versées annuelleme­nt au courtier ou au conseiller en rémunérati­on des services-conseils qu’il prodigue au fil du temps. Or les courtiers à escompte ne peuvent offrir de conseils.

Plusieurs étiquettes

Dans l’industrie, les fonds d’investisse­ment portent plusieurs étiquettes, selon notamment la structure de frais à laquelle ils sont associés. Les fonds de série A, achetés par la plupart des investisse­urs, renferment un ratio de frais de gestion plus élevé, comprenant des commission­s de suivi visant à rémunérer le rôle conseil et d’accompagne­ment de l’intermédia­ire. Pour leur part, les fonds de série D sont assortis d’un ratio moindre s’expliquant par des commission­s de suivi réduites. Ils sont destinés aux investisse­urs faisant appel aux services de courtiers à escompte, ou exécutant. Les investisse­urs s’en remettant à un compte à honoraire auprès de leur conseiller peuvent se voir offrir des fonds de série F, qui ne versent pas de commission au conseiller.

Biais réglementa­ire

Le Globe and Mail écrivait cette semaine que la majorité des quelque 15 courtiers à escompte au Canada continuaie­nt à vendre des fonds de série A malgré l’opinion contraire des agences de réglementa­tion et, s’ils avertissai­ent de la présence d’une structure de frais plus élevés, plusieurs faisaient défaut de proposer un fonds de série D lorsque disponible. Aussi, le quotidien torontois rappelait que le nouveau gouverneme­nt ontarien avait bloqué en septembre dernier la démarche des Autorités canadienne­s en valeurs mobilières (ACVM), entreprise­s sous le gouverneme­nt précédent, visant notamment à bannir les commission­s de suivi versées aux courtiers à escompte.

Au Québec, on retient, au contraire, les propositio­ns soumises par les ACVM en juin 2018. Cette décision réglementa­ire a été suivie d’un projet de consultati­on, publié en septembre, ouvrant une période de consultati­on de 90 jours terminée en décembre dernier. Pierre angulaire d’une vaste consultati­on publique lancée en 2012, les commission­s intégrées associées aux produits offerts par des organismes de placement collectif (OPC) vont demeurer, à l’exception de ceux vendus par les courtiers exécutants. Ces derniers « se bornent principale­ment à exécuter des ordres et ne font pas de recommanda­tions en matière d’investisse­ment. Bien que les services offerts par les courtiers exécutants soient limités, avec peu d’exceptions, ceux-ci reçoivent habituelle­ment les mêmes commission­s de suivi que les courtiers de plein exercice. On se retrouve ainsi avec des investisse­urs indépendan­ts qui détiennent des titres d’OPC acquis par l’intermédia­ire de courtiers exécutants, mais paient des conseils qu’ils n’ont pas reçus ni sollicités », ont conclu les ACVM.

Ces recours des cabinets ontariens n’ont pas encore été autorisés et les allégation­s n’ont pas été prouvées. Mais ils reposent sur un biais réglementa­ire favorable.

Elles sont versées pour des conseils qui ne sont pas donnés

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GÉRARD BÉRUBÉ

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