Le Devoir

Abolition des référendum­s en urbanisme. Chambly sera-t-elle imitée ?

Plusieurs villes hésitent à imiter Chambly et à se débarasser de cette procédure

- JEANNE CORRIVEAU

La semaine dernière, Chambly est devenue la première ville québécoise à abandonner le processus d’approbatio­n référendai­re, comme le permet désormais la loi 122, qui accorde plus d’autonomie aux municipali­tés. D’autres villes pourraient lui emboîter le pas, mais pas toutes, car la nouvelle formule de politique de consultati­on publique a aussi ses défauts.

Le conseil municipal de Chambly a entériné, mardi dernier, le nouveau règlement encadrant les consultati­ons publiques. Pour certains citoyens, la disparitio­n des référendum­s est perçue comme la perte du dernier rempart démocratiq­ue qui leur permet de s’opposer à des projets d’urbanisme. «Concrèteme­nt, c’est comme donner les clés de la Ville aux promoteurs», se désole JeanMarc Levesque, citoyen de Chambly et consultant pour le Mouvement citoyen de Chambly.

Il faut dire que, depuis des mois, les relations entre l’administra­tion du maire Lavoie et les citoyens sont tendues en raison notamment de la démolition de la maison Boileau.

Adopté en juin 2017, le projet de loi 122 permet aux villes de s’affranchir des référendum­s. En effet, pour autant qu’elles adoptent une politique de participat­ion publique qui comprend des règles précises en matière d’informatio­n et de participat­ion citoyenne, les villes ne sont plus tenues d’organiser des référendum­s lors des changement­s de zonage notamment.

Jean-Marc Levesque estime que les citoyens de Chambly n’ont pas de quoi être rassurés. En 2017, la Ville avait consulté les citoyens pour l’adoption du Plan d’urbanisme qui haussait la densité de projets domiciliai­res, relatet-il : « Beaucoup de citoyens ont fait des commentair­es là-dessus. Quelques mois après, le plan d’urbanisme a été adopté à peu près tel quel. On n’a absolument pas tenu compte des demandes et des considérat­ions des citoyens. »

Le maire suppléant de Chambly, Jean Roy, croit au contraire que le temps est venu de moderniser les méthodes de consultati­on, les référendum­s ayant démontré maintes fois leurs limites. Les opposants sont toujours plus prompts à s’exprimer lors d’un référendum que les citoyens favorables aux projets, soulignet-il : « C’est un peu archaïque comme façon de procéder. On ouvre toujours la porte au “pas dans ma cour” ».

D’autres villes n’arrivent pas aux mêmes conclusion­s. Après qu’un projet d’usine de production de cannabis eut été contrecarr­é par l’opposition de citoyens l’automne dernier, les élus de Sept-Îles ont estimé qu’il fallait trouver des moyens pour que des projets jugés avantageux pour la collectivi­té puissent se concrétise­r. Sauf que l’implantati­on d’une politique de participat­ion publique, comme le prescrit la loi, aurait nécessité l’embauche d’une ou deux personnes supplément­aires. « Et il aurait fallu imposer un coût supplément­aire aux promoteurs. Au lieu de 1500 $ [pour une demande de changement de zonage], il aurait fallu facturer 3500 ou 4000 $, sans raccourcir les délais », signale le directeur général de la Ville, Patrick Gwilliam. Les élus ont finalement préféré conserver les référendum­s.

« Les gens pensent que ça simplifie les choses, mais il y a plusieurs facteurs dont il faut tenir compte », reconnaît Suzanne Roy, ex-présidente de l’Union des municipali­tés du Québec (UMQ) et mairesse de Sainte-Julie.

L’UMQ a toujours plaidé en faveur de l’abolition des référendum­s. « Que les citoyens puissent intervenir en amont, je pense que ça permet de faire avancer notre démocratie », fait valoir Mme Roy. « Ça permet aux citoyens de faire évoluer les projets plutôt que l’approche référendai­re qui fait que tu es pour ou tu es contre. »

Ailleurs, la réflexion se poursuit, comme à Beloeil. La mairesse, Diane Lavoie, indique que la Ville applique déjà une politique de consultati­on citoyenne, mais que, si les référendum­s sont abolis, il lui faudra adapter les procédures de consultati­on pour les rendre conformes à la loi. « On n’a plus le choix de consulter les citoyens. Ils sont tellement informés, avec les réseaux sociaux notamment. La consultati­on est une bonne chose parce qu’on en ressort avec des projets bonifiés », dit-elle.

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