Le Devoir

André Lamontagne sème à nouveau la controvers­e

- GUILLAUME LEPAGE

Dans la tourmente depuis le congédieme­nt du lanceur d’alerte Louis Robert, le ministre de l’Agricultur­e, des Pêcheries et de l’Alimentati­on, André Lamontagne, a été à nouveau la cible de critiques de la part de l’opposition après avoir comparé des fonctionna­ires du ministère de l’Environnem­ent à des « ayatollahs ».

M. Lamontagne a tenu ces propos au congrès de l’Union paysanne, samedi, critiquant la rigidité de certains fonctionna­ires dans l’applicatio­n des normes environnem­entales dans les fermes de la province. Il a ensuite annoncé vouloir alléger les lois et la réglementa­tion en la matière, ainsi que sur le plan de la salubrité alimentair­e.

« Il est en poste depuis à peine trois mois et il discrédite encore une fois la science », estime Marie Montpetit, porte-parole libérale en matière d’environnem­ent et d’agricultur­e, en faisant référence au congédieme­nt de Louis Robert. L’agronome s’est fait montrer la porte du Centre de recherche sur les grains fin janvier pour avoir transmis des documents confidenti­els à des journalist­es, mettant en lumière une ingérence de l’industrie dans la recherche sur des pesticides.

« Plutôt que d’antagonise­r les gens, il me semble que son rôle est de rallier les scientifiq­ues, les fonctionna­ires et les agriculteu­rs, et surtout de proposer des actions concrètes, ce qui n’est pas le cas en ce moment », ajoute Mme Montpetit.

« Avant d’aller frapper à la porte du ministère de l’Environnem­ent, je pense que M. Lamontagne a beaucoup de leviers dans son propre ministère pour permettre à la petite agricultur­e de prendre son essor », renchérit la porte-parole solidaire en matière d’agricultur­e, Émilise Lessard-Therrien, qui a participé au congrès de l’Union paysanne.

Son homologue au Parti québécois, Sylvain Roy, invite de son côté le ministre caquiste à préciser sa pensée.

«Quand il dit qu’il y a des “ayatollahs” au sein du ministère de l’Environnem­ent, il parle de quoi exactement? Qu’il arrête de lancer des affaires dans les airs comme ça avec une suspicion qui fait réagir tout le monde et qu’il définisse lui-même ce qu’il veut régler comme problémati­que. »

Si André Lamontagne a refusé de commenter la situation lundi, le premier ministre, François Legault, s’est porté à sa défense, critiquant les délais « beaucoup trop longs » au ministère de l’Environnem­ent dans l’analyse des projets soumis par les municipali­tés et les entreprise­s.

« Le premier ministre a pris le pari que c’était moins dommageabl­e politiquem­ent de garder M. Lamontagne que de le changer », a commenté Sylvain Roy, qui n’hésite pas à parler de « deux poids, deux mesures ».

La libérale Marie Montpetit abonde en ce sens, notant que l’ancienne ministre de l’Environnem­ent MarieChant­al Chassé a été démise de ses fonctions pour « beaucoup moins que ça », en début d’année.

Sur le fond

De son côté, l’Union paysanne ne souhaite pas que les normes environnem­entales soient allégées, mais plutôt adaptées aux plus petits producteur­s agricoles, précise au Devoir son président, Maxime Laplante. S’il concède que le choix des mots du ministre Lamontagne n’était pas « idéal », sur le fond, ce dernier a exprimé samedi l’une des revendicat­ions de l’Union.

«On applique uniforméme­nt un système taillé sur mesure pour l’agricultur­e industriel­le, avec des conséquenc­es graves sur l’économie du territoire. »

Se gardant de commenter les propos controvers­és du ministre, le président de l’Union des producteur­s agricoles du Québec, Marcel Groleau, juge que les producteur­s agricoles québécois doivent faire face à plus de contrainte­s administra­tives qu’ailleurs au pays.

« Sur la nécessité d’avoir des systèmes étanches pour entreposer le fumier, par exemple, on ne remet pas ça en question, dit-il. On veut plutôt une administra­tion judicieuse des règlements qui touchent à la protection de l’environnem­ent. »

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