André Lamontagne sème à nouveau la controverse
Dans la tourmente depuis le congédiement du lanceur d’alerte Louis Robert, le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, André Lamontagne, a été à nouveau la cible de critiques de la part de l’opposition après avoir comparé des fonctionnaires du ministère de l’Environnement à des « ayatollahs ».
M. Lamontagne a tenu ces propos au congrès de l’Union paysanne, samedi, critiquant la rigidité de certains fonctionnaires dans l’application des normes environnementales dans les fermes de la province. Il a ensuite annoncé vouloir alléger les lois et la réglementation en la matière, ainsi que sur le plan de la salubrité alimentaire.
« Il est en poste depuis à peine trois mois et il discrédite encore une fois la science », estime Marie Montpetit, porte-parole libérale en matière d’environnement et d’agriculture, en faisant référence au congédiement de Louis Robert. L’agronome s’est fait montrer la porte du Centre de recherche sur les grains fin janvier pour avoir transmis des documents confidentiels à des journalistes, mettant en lumière une ingérence de l’industrie dans la recherche sur des pesticides.
« Plutôt que d’antagoniser les gens, il me semble que son rôle est de rallier les scientifiques, les fonctionnaires et les agriculteurs, et surtout de proposer des actions concrètes, ce qui n’est pas le cas en ce moment », ajoute Mme Montpetit.
« Avant d’aller frapper à la porte du ministère de l’Environnement, je pense que M. Lamontagne a beaucoup de leviers dans son propre ministère pour permettre à la petite agriculture de prendre son essor », renchérit la porte-parole solidaire en matière d’agriculture, Émilise Lessard-Therrien, qui a participé au congrès de l’Union paysanne.
Son homologue au Parti québécois, Sylvain Roy, invite de son côté le ministre caquiste à préciser sa pensée.
«Quand il dit qu’il y a des “ayatollahs” au sein du ministère de l’Environnement, il parle de quoi exactement? Qu’il arrête de lancer des affaires dans les airs comme ça avec une suspicion qui fait réagir tout le monde et qu’il définisse lui-même ce qu’il veut régler comme problématique. »
Si André Lamontagne a refusé de commenter la situation lundi, le premier ministre, François Legault, s’est porté à sa défense, critiquant les délais « beaucoup trop longs » au ministère de l’Environnement dans l’analyse des projets soumis par les municipalités et les entreprises.
« Le premier ministre a pris le pari que c’était moins dommageable politiquement de garder M. Lamontagne que de le changer », a commenté Sylvain Roy, qui n’hésite pas à parler de « deux poids, deux mesures ».
La libérale Marie Montpetit abonde en ce sens, notant que l’ancienne ministre de l’Environnement MarieChantal Chassé a été démise de ses fonctions pour « beaucoup moins que ça », en début d’année.
Sur le fond
De son côté, l’Union paysanne ne souhaite pas que les normes environnementales soient allégées, mais plutôt adaptées aux plus petits producteurs agricoles, précise au Devoir son président, Maxime Laplante. S’il concède que le choix des mots du ministre Lamontagne n’était pas « idéal », sur le fond, ce dernier a exprimé samedi l’une des revendications de l’Union.
«On applique uniformément un système taillé sur mesure pour l’agriculture industrielle, avec des conséquences graves sur l’économie du territoire. »
Se gardant de commenter les propos controversés du ministre, le président de l’Union des producteurs agricoles du Québec, Marcel Groleau, juge que les producteurs agricoles québécois doivent faire face à plus de contraintes administratives qu’ailleurs au pays.
« Sur la nécessité d’avoir des systèmes étanches pour entreposer le fumier, par exemple, on ne remet pas ça en question, dit-il. On veut plutôt une administration judicieuse des règlements qui touchent à la protection de l’environnement. »