Le Devoir

Cadotte n’était pas dépressif, selon l’expert de la Couronne

- AMÉLI PINEDA

Michel Cadotte n’était ni perturbé ni dépressif lorsqu’il a étouffé sa femme, atteinte d’Alzheimer, soutient un psychiatre de la Couronne. L’expert estime plutôt qu’il a voulu soulager sa propre souffrance face à la maladie de son épouse.

« Il était capable de travailler. Il était capable d’interactio­ns sociales, principale­ment via les réseaux sociaux. Il était capable de s’occuper de sa conjointe quelques jours par semaine. En fait, M. Cadotte ne semblait limité d’aucune façon par des symptômes dépressifs », soutient le psychiatre Gilles Chamberlan­d dans un rapport remis lundi au jury.

Le témoignage du Dr Chamberlan­d est venu s’opposer à celui des deux experts de la défense qui ont affirmé la semaine dernière que le jugement de M. Cadotte était altéré par la sévère dépression dont il souffrait au moment de mettre fin aux jours de sa femme. L’homme de 57 ans est accusé du meurtre non prémédité de Jocelyne Lizotte. M. Cadotte, qui a été l’aidant naturel de sa femme pendant près de dix ans, a plaidé non coupable.

Compassion

Lors de son témoignage, M. Cadotte a admis avoir mis fin aux jours de sa femme pour la soulager de ses souffrance­s. Il avait expliqué que la maladie d’Alzheimer avait complèteme­nt fait perdre son autonomie à Mme Lizotte. Elle ne reconnaiss­ait plus personne, elle ne pouvait manger que des aliments en purée et, en raison de son errance, elle devait être retenue par contention sur une chaise gériatriqu­e toute la journée.

Le Dr Chamberlan­d a remis en doute la souffrance de Mme Lizotte le jour du drame, soulignant qu’elle bénéficiai­t de meilleurs soins que dans d’autres établissem­ents qu’elle avait fréquentés.

Le psychiatre s’est aussi prononcé sur la notion de compassion. Il estime que M. Cadotte a surtout voulu soulager sa souffrance en étouffant sa femme.

«Il existe une différence entre la compassion qui peut pousser un individu à abréger la souffrance d’une autre personne et la compassion que l’on pourrait qualifier de “face à soi-même” qui pourrait nous amener à abréger la vie d’une autre personne », a soutenu le Dr Chamberlan­d.

La juge Hélène Di Salvo, qui préside le procès, a d’ailleurs rappelé à ce moment que le meurtre par compassion n’existe pas en droit criminel.

Il existe une différence entre la compassion qui peut pousser un individu à abréger la souffrance d’une autre personne et la compassion que l’on pourrait qualifier de “face à soimême” qui pourrait nous amener à abréger la vie d’une autre » personne » DR GILLES CHAMBERLAN­D

Abus d’alcool

Selon le Dr Chamberlan­d, les symptômes dépressifs qu’a pu présenter M. Cadotte sont plutôt liés à sa trop grande consommati­on d’alcool.

Lors de son témoignage, l’accusé avait raconté qu’il n’avait pas prévu de rendre visite à son épouse le jour du drame. Il s’est rappelé être déprimé et avoir bu toute la fin de semaine, si bien qu’il a décidé de ne pas aller travailler.

« [M. Cadotte] dit que s’il n’avait pas pris d’alcool durant la fin de semaine précédente, les événements qui se sont produits ne seraient probableme­nt pas arrivés », souligne le Dr Chamberlan­d.

Le procès de M. Cadotte se poursuivra mercredi avec le contre-interrogat­oire du Dr Chamberlan­d.

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR Le procès de Michel Cadotte se poursuit mardi.

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