Dépassements de coûts pour Nemaska Lithium |
L’entreprise a besoin de 375 millions de plus pour respecter ses échéanciers
L’entreprise Nemaska Lithium, dans laquelle le gouvernement du Québec a déjà investi 130 millions de dollars, fait face à d’importants dépassements de coûts et a maintenant besoin de 375 millions supplémentaires pour mener à bien son projet de mine et d’usine de transformation de lithium.
Moins de neuf mois après avoir annoncé la clôture d’un montage financier de 1,1 milliard de dollars, l’entreprise a fait savoir mercredi qu’elle a réévalué ses coûts et qu’elle devra trouver plusieurs centaines de millions de plus afin de respecter les échéanciers qu’elle s’est fixés.
«Nous avons maintenant une meilleure compréhension de l’étendue résiduelle du projet, du budget prévu et de la conjoncture de marché. Le coût total révisé du projet reflète un aperçu plus précis des coûts d’installations et d’autres variables clés pour l’achèvement du projet », a déclaré par voie de communiqué le président et chef de la direction de Nemaska Lithium, Guy Bourassa.
Lors d’une conférence téléphonique convoquée à la dernière minute, M. Bourassa a tenté de rassurer les analystes et les investisseurs en expliquant que le budget révisé est dû à une augmentation des coûts « indirects ».
Il a notamment évoqué la hausse du prix de l’acier, que l’entreprise utilise pour construire son usine située à Shawinigan, et des coûts imprévus liés à la main-d’oeuvre. Le budget initial prévoyait que les travailleurs qui construisent la future usine de production commerciale proviendraient tous de la Mauricie, mais 50 % des employés ont finalement dû être recrutés à l’extérieur de la région, ce qui a occasionné des frais supplémentaires pour les loger et les nourrir, a-t-il souligné.
Action en baisse
« Je ne suis pas content, personne n’est content. Ce n’est pas une bonne journée, a répondu M. Bourassa à un investisseur mécontent, qui a accusé l’entreprise d’avoir « échappé le ballon ».
« On ne parle pas d’un projet qui a un problème de coûts à cause d’un mauvais procédé. On parle de la réalité de la productivité, de la main-d’oeuvre, du coût de l’acier, etc. C’est triste, mais ça n’a pas été grossièrement négligé par quiconque au moment du dernier budget », a-t-il ajouté.
L’annonce de mercredi a fait plonger l’action de Nemaska Lithium, qui a perdu 35 % de sa valeur à la Bourse de Toronto. Le titre a clôturé à 0,36 $, en baisse de 0,20$, et vaut aujourd’hui beaucoup moins que les 2,35 $ enregistrés en décembre 2017, lorsque l’action avait atteint un sommet.
Nemaska Lithium se donne maintenant 90 jours pour trouver les 375 millions supplémentaires auprès des actionnaires existants ou de nouveaux investisseurs. L’entreprise assure que cette somme lui permettrait de respecter les plus récents échéanciers, soit de terminer la construction de la mine en octobre 2019 et de mettre en service l’usine de Shawinigan en 2020. Elle fera le point sur ses démarches à la fin du mois de février.
Argent public
Nemaska Lithium souhaite exploiter la mine Whabouchi, située à 300 km au nord de Chibougamau, pour y extraire du spodumène — le minerai de lithium — et expédier la matière première à sa future usine de production commerciale de Shawinigan. Cette usine doit transformer le concentré de spodumène en hydroxyde et en carbonate de lithium, des composés qui entrent notamment dans la fabrication de batteries.
En mai dernier, le gouvernement du Québec a annoncé un investissement de 130 millions de dollars dans le projet. Il a investi 80 millions dans le capital-actions de la compagnie par l’entremise du fonds Capital Mines Hydrocarbures,
En mai dernier, le gouvernement du Québec a annoncé un investissement de 130 millions de dollars dans le projet
tandis que Ressources Québec, une filiale d’Investissement Québec, a acheté 50 millions d’obligations garanties et remboursables.
À ce moment, le gouvernement Couillard avait évoqué un projet qui « aura un effet structurant important parce qu’il facilitera l’accès aux produits de lithium pour les entreprises manufacturières qui sont spécialisées dans la fabrication de batteries destinées aux véhicules électriques ».
« Il n’y a pas de meilleur moment pour investir dans [le secteur minier québécois] », avait ajouté le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles Pierre Moreau.
Mercredi, Investissement Québec n’a pas voulu indiquer si le gouvernement compte injecter davantage d’argent dans Nemaska Lithium. «Cela dit, nous sommes toujours d’avis que le projet de Nemaska Lithium constitue une belle occasion de croissance pour la filière québécoise des véhicules électriques, une industrie qui engendre des retombées économiques positives et durables pour l’ensemble du Québec », a répondu par courriel la porte-parole Isabelle Fontaine.
Au moment où ces lignes étaient écrites, le cabinet du ministre de l’Économie et de l’Innovation, Pierre Fitzgibbon, n’avait pas réagi.