Le Devoir

La tension sociale fait fuir les ressortiss­ants étrangers

Ottawa maintient la fermeture de son ambassade, mais n’a pas encore appelé au rapatrieme­nt de son personnel

- FABIEN DEGLISE Avec Jeanne Corriveau et l’AFP

Ottawa a maintenu la fermeture temporaire de son ambassade jeudi à Port-auPrince, alors qu’Haïti s’enfonce depuis plus d’une semaine dans la violence de manifestat­ions populaires réclamant le départ du président Jovenel Moïse.

Le climat social qui se dégrade dans la Perle des Antilles, sur fond de chômage, d’inégalités et de corruption, fait revenir plusieurs ressortiss­ants canadiens au pays. Une centaine de touristes québécois étaient toujours confinés dans leur hôtel, incapables d’atteindre en toute sécurité l’aéroport internatio­nal de Portau-Prince depuis dimanche dernier.

« On est en contact constant avec l’ambassade canadienne en Haïti et avec les autorités gouverneme­ntales pour évaluer la situation», a déclaré à l’AFP Christophe Hennebelle, vice-président de Transat, qui a vendu à ces touristes des séjours tout compris dans la zone balnéaire populaire de la côte des Arcadins, à une heure et demie de la capitale. Selon lui, une évacuation est envisageab­le « dans les prochains jours ».

La Ville de Montréal a rapatrié deux de ses employés qui étaient en poste à Haïti. L’un d’eux est revenu au pays mercredi soir et l’autre, jeudi. « Ce n’était pas une décision facile à prendre, parce qu’on veut pouvoir soutenir le peuple haïtien. Mais en même temps, on a le devoir de protéger nos employés et de nous assurer qu’ils sont en sécurité», a expliqué la mairesse Valérie Plante jeudi.

Huit policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) se trouvent actuelleme­nt en Haïti. Pour le moment toutefois, le SPVM ne prévoit pas de les rapatrier, mais assure qu’ils sont tous en sécurité.

La ministre québécoise des Relations internatio­nales, Nadine Girault, a dit jeudi qu’elle suivait la situation de près et était en contact avec Affaires mondiales Canada pour coordonner le rapatrieme­nt des Québécois présents sur le territoire haïtien. «[Les fonctionna­ires du ministère] sont en contact avec les gens en Haïti ; nous sommes aussi en contact avec le cabinet de la ministre [Chrystia] Freeland, et ils vont contacter ces gens-là et faire en sorte que l’on fasse attention à leur sécurité », a-t-elle indiqué lors d’une mêlée de presse citée par Radio-Canada.

Même si l’ambassade a fermé ses

Même si l’ambassade a fermé ses portes, Ottawa assure que « les services consulaire­s aux Canadiens sur place » sont toujours offerts et que de l’aide sera fournie « à ceux qui pourraient en avoir besoin »

portes, Ottawa assure que « les services consulaire­s aux Canadiens sur place » sont toujours offerts et que de l’aide sera fournie « à ceux qui pourraient en avoir besoin », a indiqué le ministère. Le gouverneme­nt fédéral n’a toutefois pas orchestré le rapatrieme­nt du personnel de sa mission diplomatiq­ue en Haïti et de son entourage, contrairem­ent aux ÉtatsUnis qui ont ordonné à leurs diplomates de faire quitter le territoire à leurs enfants. Dans son communiqué, le départemen­t d’État dit également approuver le départ du personnel non essentiel et des membres adultes des familles de son personnel en poste en Haïti.

Haïti s’embrase depuis jeudi dernier, après l’appel lancé par l’opposition pour réclamer la démission du président Jovenel Moïse, qui a fait apparaître des centaines de manifestat­ions spontanées dans les rues de la capitale et plusieurs autres villes du pays. La grogne populaire latente, dans un des pays les plus pauvres et les plus corrompus de la planète, s’est amplifiée depuis la publicatio­n fin janvier d’un rapport de la Cour des comptes sur le détourneme­nt des fonds du PetroCarib­e prêté par le Venezuela à Haïti pour assurer le développem­ent du pays.

D’anciens présidents et ministres sont ciblés par ces révélation­s qui font état d’infraction­s aux lois sur les marchés publics, de fraude fiscale, de contrats accordés sans descriptio­n des travaux ni échéancier ou de dépassemen­ts de coûts sans factures explicativ­es. Et ce, dans un pays où, selon la Banque mondiale, près de 60 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, fixé en deçà de 2,41$ par jour. Un quart se trouve sous le seuil de pauvreté extrême (situé à 1,23 $ par jour).

 ?? DIEU NALIO CHERY ASSOCIATED PRESS ?? Haïti s’embrase depuis jeudi dernier, après l’appel lancé par l’opposition pour réclamer la démission du président Jovenel Moïse.
DIEU NALIO CHERY ASSOCIATED PRESS Haïti s’embrase depuis jeudi dernier, après l’appel lancé par l’opposition pour réclamer la démission du président Jovenel Moïse.

Newspapers in French

Newspapers from Canada