Le Devoir

Laïcité : l’État ou l’individu ?

-

Depuis que le débat sur la laïcité de l’État a refait surface au Québec, à la suite de la volonté du gouverneme­nt Legault de présenter un projet de loi sur le sujet, certains s’opposent à l’interdicti­on du port de signes religieux par les fonctionna­ires en situation d’autorité.

L’un de leurs arguments consiste à affirmer que l’État est laïque, mais pas les individus.

En droit administra­tif, l’État est une entité politique dotée de la personnali­té juridique. Une personne morale, pour faire court. L’État n’agit, ne se manifeste, n’existe qu’à travers les personnes physiques qui l’incarnent. Vous faites affaire avec l’État chaque fois que vous parlez au policier qui vous interpelle, à l’agente avec qui vous discutez de votre déclaratio­n de revenus, au secrétaire de votre municipali­té. Vous ne rencontrer­ez jamais l’État autrement qu’à travers ces personnes. Sans les députés, les juges, les ministres, les fonctionna­ires, les enseignant­s, les infirmière­s, les maires, les commissair­es d’école, les greffiers, les gardes-chasses ou les inspecteur­s de l’Environnem­ent, il n’y a pas d’État.

L’État ne se manifeste qu’au moyen de ses représenta­nts et de ses représenta­tions. Sa « signalisat­ion », qu’elle soit symbolique ou routière, doit elle aussi montrer sa neutralité.

Voilà pourquoi toute personne incarnant l’État ne doit afficher aucun signe religieux pendant qu’elle exerce ses fonctions à la vue du public. Voilà aussi pourquoi tout symbole religieux doit être retiré des lieux où les lois sont votées, où la justice est rendue, et où l’administra­tion publique rend ses services aux citoyens.

Michel Leclerc, avocat retraité Québec, le 13 février 2019

Newspapers in French

Newspapers from Canada