Les douze castings de Panoramix
Le tandem Astier-Clichy anime à nouveau les aventures tapageuses des célèbres Gaulois
Peu importe sa forme — bande dessinée, film d’animation ou en prises de vue réelles —, le pouvoir attractif des péripéties d’Astérix et Obélix traverse les décennies sans jamais fléchir. Et si les ingrédients du succès de ses créateurs, René Goscinny et Albert Uderzo, sont bien connus (la fierté et l’ingéniosité françaises à leur paroxysme, une galerie impressionnante de personnages truculents, la récurrence de blagues efficaces, etc.), celui de humer l’air du temps pour l’arrimer à l’éternelle année 50 avant Jésus-Christ n’a pas échappé à ses successeurs.
Avec Le domaine des dieux (2014), Alexandre Astier et Louis Clichy ont prouvé qu’il était encore possible de se passer de vedettes en chair et en os pour satisfaire les admirateurs de ces irréductibles Gaulois, même si certains de ces films, surtout celui d’Alain Chabat (le fameux Mission : Cléopâtre), ont attiré les foules. Revenir à l’animation, c’est s’ouvrir à un monde de possibles et à de jolies extravagances, comme ils le font maintenant dans Astérix et le secret de la potion magique.
Nullement tirée d’un quelconque album méconnu, cette aventure originale n’en demeure pas moins très prévisible, de par la cohorte de figures connues, d’expressions consacrées et de situations maintes fois revisitées, à commencer par les éternels carnages subis par les pauvres armées de Rome. Une fois encore, le célèbre village gaulois se voit fragilisé par une mauvaise chute du
Ce film ne représente pas un jalon important dans la galaxie Astérix et Obélix, mais s’inscrit dans une agréable continuité
druide Panoramix, blessé au pied (et dans son orgueil !), tout à coup soucieux de trouver un successeur capable de reproduire sa non moins célèbre boisson (très) énergisante.
Dans une quête dont la drôlerie n’est pas sans rappeler celle des 12 travaux d’Astérix, ce druide aux capacités motrices limitées, aidé dans ses transports par la version celtique de Laurel et Hardy, entame des auditions régionales auprès de jeunes aspirants sages. Le périple, semblables rituels de la téléréalité, s’accompagne d’une ombre menaçante, celle d’un vieux druide devenu paria, croisement entre Darth Vader et Voldemort, prénommé Sulfurix, voulant lui aussi mettre la main sur la fameuse potion. Et s’en servir de manière irresponsable, digne des meilleurs politiciens populistes.
Entre le besoin d’émerveillement du jeune public et le sentiment de réconfort à procurer aux adultes bien au fait de cet univers, Alexandre Astier et Louis Clichy exécutent un habile jeu d’équilibristes. L’humour y est parfois bon enfant, un brin potache, mais s’appuie aussi sur notre familiarité avec ces héros aux profils souvent monolithiques — qui nous décevraient beaucoup s’ils agissaient différemment. Que ferions-nous d’un Obélix ne se plaignant jamais d’être privé de potion ou d’un Astérix dépouillé de susceptibilité ?
Astérix et le secret de la potion magique ne représente pas un jalon important dans la galaxie Astérix et Obélix, mais il s’inscrit dans une agréable continuité, cédant bien sûr à des modes moins heureuses (celle des Transformers version centurions romains ne passera pas à l’histoire), célébrant aussi les vertus cardinales de ce pittoresque foyer de résistance. Peu importe l’ampleur du danger et la félonie de l’envahisseur, les rejetons de Goscinny et Uderzo chérissent précieusement une autre arme secrète, celle de la solidarité inébranlable.
Astérix et le secret de la potion magique
★★★
Film d’animation d’Alexandre Astier et Louis Clichy. France, 2018, 85 minutes.