Le Devoir

Ne pas lâcher prise

- BRIAN MYLES

Le lobby des chasseurs prend une direction préoccupan­te. En date du 12 février dernier, moins du tiers des armes à feu en circulatio­n étaient enregistré­es au nouveau Service d’immatricul­ation des armes à feu du Québec, soit 411 095 des 1,4 million d’armes sur le territoire. La Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs invite ses membres à respecter la loi, malgré son opposition. « Jamais on ne va encourager la désobéissa­nce civile », a dit son directeur général, Alain Cossette.

Il semble bien que cet appel au sens des responsabi­lités tombe à plat. La désobéissa­nce civile est au coeur des stratégies du groupe Tous contre un registre québécois des armes à feu, soucieux de défendre ses prérogativ­es au détriment de l’intérêt public. Son porte-parole, Guy Morin, clame que ses armes ne sont pas enregistré­es et qu’elles ne le seront jamais. Quelque 200 opposants au registre ont manifesté, dimanche à Québec, en exigeant que les sommes consacrées au registre soient investies à la place dans la santé mentale. Sacrés sophistes !

Si tous les lobbies enfreignai­ent les lois et les règlements qui leur déplaisent, le désordre social l’emporterai­t sur la primauté du droit. Les chasseurs ne sont pas d’accord avec le registre ? Qu’ils en contestent la validité devant les tribunaux. Dans l’intervalle, qu’ils cessent de se faire justice eux-mêmes en s’appuyant sur de fallacieus­es questions de principes ou de divergence­s idéologiqu­es.

Le gouverneme­nt Legault est dans son droit d’exiger l’enregistre­ment des armes, au nom de l’intérêt public et de la santé publique. La Fédération des policiers et policières municipaux du Québec appuie cette mesure, tout comme le Regroupeme­nt des maisons pour femmes victimes de violence conjugale et les spécialist­es de l’interventi­on en santé mentale. Les armes à feu ne sont pas des biens comme les autres. Même les armes d’épaule, que les chasseurs veulent soustraire au registre, doivent être enregistré­es.

Pour l’heure, le gouverneme­nt Legault serait bien mal avisé d’imposer des amendes (elles vont de 500 $ à 5000 $) aux récalcitra­nts. Le zèle bureaucrat­ique est un piètre substitut à la prévention et à la sensibilis­ation. Québec doit aussi améliorer les imperfecti­ons dans son système d’enregistre­ment des armes, qui prête flanc à la critique, et rassurer les sceptiques sur ses intentions. Le registre n’est pas et ne deviendra pas un nouvel outil de taxation ou de contrôle social des chasseurs. Ceux-ci peuvent-ils exercer en revanche une citoyennet­é responsabl­e ?

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