Le Devoir

Bien comprendre l’envers du décor

- Texte collectif*

Nous célébrons cette semaine le talent de nos artisans, de nos interprète­s, de tous nos créateurs et producteur­s qui offrent au public québécois des émissions qui les informent, qui les émeuvent et qui les divertisse­nt. Nous célébrons également cette immense fidélité, unique au monde, de spectateur­s rassemblés autour d’écrans de toutes dimensions pour visionner des émissions créées spécialeme­nt pour eux.

Cette réalité amplifiée par les tapis rouges, par les éclats de projecteur­s et les remercieme­nts à des équipes « sans qui tout cela n’aurait jamais été possible» masque cependant les difficulté­s financière­s de l’industrie bousculée par les changement­s des habitudes d’écoute et la concurrenc­e étrangère. Tout comme les médias journalist­iques, les diffuseurs perdent des revenus publicitai­res avec lesquels ils investisse­nt dans le financemen­t des émissions. Les crédits d’impôt provinciau­x pour la production ont fait l’objet d’une réduction en 2014 et n’ont jamais été rétablis à leur niveau antérieur. Le Fonds des médias du Canada, qui contribue de façon importante au financemen­t des émissions, subit les contrecoup­s de la baisse des contributi­ons des câblodistr­ibuteurs puisque les Québécois se tournent désormais vers d’autres services pour accéder au contenu qu’ils visionnent. Ce sous-financemen­t menace la pérennité de l’industrie de la production indépendan­te qui a mis plus de trente ans à s’établir, tout comme il menace les 14 000 emplois qui en découlent.

Les solutions sont pourtant connues et elles passent notamment par une modificati­on rapide des lois sur la radiodiffu­sion et sur les télécommun­ications. Le CRTC doit exiger des nouveaux services de programmat­ion que sont les plateforme­s en ligne des contributi­ons obligatoir­es au financemen­t et à la mise en valeur des émissions québécoise­s. Pour pallier la baisse des contributi­ons des câblodistr­ibuteurs et des services de distributi­on par satellite, les fournisseu­rs de téléphonie mobile et de services Internet doivent également être mis à contributi­on. Le gouverneme­nt fédéral doit lui aussi revoir sa politique de placements publicitai­res pour que les diffuseurs canadiens puissent stabiliser leurs revenus et maintenir leur soutien pour la production des émissions.

Madame May, Messieurs Trudeau, Scheer, Singh, Blanchet et Bernier, nous attendons de votre part des engagement­s électoraux fermes à agir rapidement pour réviser les lois afin de mieux soutenir le financemen­t et la promotion des oeuvres télévisuel­les et ainsi assurer la pérennité de notre industrie.

Monsieur le Premier Ministre Legault, nous avons pris connaissan­ce avec satisfacti­on de vos déclaratio­ns selon lesquelles «la culture était l’âme d’un peuple » et de votre promesse de « quelque chose d’ambitieux » pour l’industrie culturelle. Le rétablisse­ment ou même la hausse des crédits d’impôt pour la production indépendan­te, un accroissem­ent des budgets pour le soutien des longs métrages et la création d’un fonds pour la production télévisuel­le concrétise­raient votre engagement de manière significat­ive pour des génération­s à venir. La fierté et les valeurs québécoise­s pourraient ainsi s’incarner dans des films et des émissions qui rejoignent un vaste public de tous âges et de toutes origines. L’AQPM appuie la campagne www.sauvonsnot­reculture.ca.

*Ce texte est cosigné par une douzaine de représenta­nts du monde de la production télévisuel­le. La liste complète des signataire­s peut être consultée sur nos plateforme­s numériques.

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