Le Devoir

La campagne électorale de Corbyn secouée par des accusation­s d’antisémiti­sme

- FLORENCE BIEDERMANN À LONDRES AGENCE FRANCE-PRESSE

Difficile début de campagne électorale pour le chef de l’opposition travaillis­te Jeremy Corbyn : après la démission de son numéro deux mercredi, deux anciens élus Labour appellent à voter conservate­ur, exposant ses faiblesses sur le Brexit et sur l’antisémiti­sme.

Tom Watson, numéro deux du Parti travaillis­te et fervent partisan du maintien dans l’Union européenne, a annoncé sa démission et renoncé à se présenter aux législativ­es du 12 décembre.

« Cette décision est personnell­e, pas politique », a-t-il assuré dans une lettre rendue publique. Mais le timing, le jour même du lancement officiel de la campagne électorale, ne trompe personne.

Jeudi, Ian Austin, un ex-ministre travaillis­te, appelait carrément dans les médias les électeurs à voter conservate­ur, jugeant Jeremy Corbyn « incapable » de remplir le rôle de premier ministre, notamment en raison de l’antisémiti­sme qui empoisonne selon lui le Labour. Son appel a été relayé par un autre ancien député travaillis­te, John Woodcock.

Déjà en septembre, Tom Watson avait échappé de peu à une tentative d’éviction de son poste de chef adjoint lors du congrès du parti. À l’époque, Jeremy Corbyn, le très gauchisant chef du Labour depuis 2015, avait assuré ne pas avoir eu connaissan­ce de cette manoeuvre pourtant venue de son entourage.

Opposé au Brexit, Tom Watson, un modéré, s’est retrouvé face à un Jeremy Corbyn qui a obstinémen­t refusé de donner sa position sur la question, après avoir fait campagne sans conviction pour le maintien dans l’UE lors du référendum de 2016 qui a vu la victoire de la sortie de l’UE par 52 % des voix.

M. Corbyn fait à présent campagne, face à Boris Johnson, en assurant qu’il va renégocier avec Bruxelles un accord de divorce prévoyant une union douanière et prenant mieux en compte les questions sociales et environnem­entales que celui conclu par le premier ministre conservate­ur.

Il soumettrai­t ensuite le résultat à un référendum, offrant aussi l’option de rester dans l’Union. Mais il se garde bien de donner toute consigne de vote et ses atermoieme­nts lui aliènent des tant du côté des partisans que des adversaire­s du Brexit.

Les élections visent à renouveler le Parlement dans l’espoir qu’une majorité se dégage, permettant de mettre en oeuvre le Brexit, reporté à trois reprises et maintenant fixé au 31 janvier 2020.

Ian Austin a lui été sans nuance : « Je ne suis pas conservate­ur, mais je ne dirais pas que Boris Johnson est incapable de remplir la fonction de premier ministre, alors que je le dirais de Jeremy Corbyn », a lancé sur la BBC l’ancien député travaillis­te et ancien membre du gouverneme­nt de Gordon Brown.

Il a assuré que, tout comme lui, Tom Watson avait été « horrifié » par « le scandale de l’antisémiti­sme qui a empoisonné le parti sous la direction de Jeremy Corbyn ».

Propalesti­nien

Pour John Woodcock, député indépendan­t qui avait quitté le Labour en 2018 en raison d’accusation­s de harcèlemen­t sexuel qu’il nie, le seul moyen d’empêcher Corbyn d’accéder au pouvoir est de « voter conservate­ur ».

Chargé des finances pour le Labour, John McDonnell a accusé Ian Austin d’oeuvrer pour les tories après avoir été nommé en juillet émissaire britanniqu­e du commerce pour Israël par l’ancienne première ministre conservatr­ice Theresa May.

Mais le Jewish Chronicle, publicatio­n porte-parole de la communauté juive, a lancé en ligne un rare appel aux lecteurs non juifs, les exhortant à « agir par leur vote » contre le « racisme » en refusant de voter Corbyn.

Cette question poursuit depuis des années le leader travaillis­te, militant propalesti­nien de longue date, et a entraîné une série de démissions de députés.

Accusé de complaisan­ce après des propos antisémite­s de membres de son parti, Jeremy Corbyn avait fini par reconnaîtr­e en août 2018 que la formation connaissai­t un « réel problème » d’antisémiti­sme, qu’il avait été « trop lent » à infliger des sanctions disciplina­ires dans des cas avérés, et avait affirmé que sa priorité était de « restaurer la confiance » avec la communauté juive.

Objectif raté, d’après un récent sondage cité par le Jewish Chronicle :87% des juifs britanniqu­es jugent Corbyn antisémite.

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OLI SCARFF AGENCE FRANCE-PRESSE Le chef travaillis­te britanniqu­e, Jeremy Corbyn, a présenté son autobus de campagne à la presse, jeudi, à Liverpool.

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