Le Devoir

Nemaska Lithium a besoin d’une nouvelle structure, selon Fitzgibbon

Québec a ouvert la porte à une nouvelle injection de fonds pour la relance de la minière

- JULIEN ARSENAULT

Si Nemaska Lithium a été incapable de boucler un financemen­t afin d’achever son projet de mine et d’usine de transforma­tion, c’est notamment parce que son bailleur de fonds n’aimait pas sa structure de capital, estime le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon.

À l’abri de ses créanciers depuis le 23 décembre, la compagnie, dans laquelle Québec a injecté 130 millions, doit tabler sur un plan de relance, faute d’un accord au terme de ses négociatio­ns exclusives avec la firme londonienn­e Groupe Pallinghur­st.

« Je pense qu’on peut dire publiqueme­nt que Pallinghur­st n’aimait pas la structure actuelle, a dit M. Fitzgibbon au cours d’une entrevue avec La Presse canadienne. La structure de capital est déficiente, [elle] n’est pas appropriée pour ce type de projet. »

Pour financer ses ambitions, Nemaska Lithium s’était tournée vers les marchés financiers en plus d’émettre des titres obligatair­es de 350 millions $US — qui font actuelleme­nt l’objet d’un litige judiciaire. De plus, la société a conclu des contrats, notamment avec la firme newyorkais­e Orion Resource Partners, prévoyant l’achat d’une partie de la production au rabais.

Sans vouloir lancer la pierre au gouverneme­nt libéral précédent, qui avait sauté dans l’aventure, M. Fitzgibbon estime qu’un projet minier ne devrait « pas avoir une grosse dette au début » en raison des risques.

«La réalité, c’est [qu’Investisse­ment Québec] a mis 80 millions de dollars en capital-actions [pour une participat­ion d’environ 13%] et que cela vaut aujourd’hui 13 millions. On a perdu 67 millions », a dit M. Fitzgibbon, qui a ouvert la porte à une nouvelle injection de fonds.

Nemaska Lithium souhaitait transforme­r, dans une usine électrochi­mique à Shawinigan, du minerai de spodumène extrait de la mine Whabouchi — à quelque 300 kilomètres au nord de Chibougama­u — en sels de lithium à valeur ajoutée. Ces derniers seraient ensuite vendus à des fabricants de matériaux de cathodes destinés aux batteries rechargeab­les au lithium-ion.

En raison des dépassemen­ts de coûts, la facture du projet, initialeme­nt estimée à 875 millions de dollars, a bondi à 1,4 milliard, ce qui a forcé la compagnie à trouver plus d’argent, en plus d’interrompr­e la constructi­on de son usine de Shawinigan.

Nouvelle structure ?

Nemaska Lithium avait négocié avec Pallinghur­st à propos d’un investisse­ment potentiel de 600 millions, mais il n’y a pas eu d’entente. La période d’exclusivit­é prenait fin le 31 décembre et la fenêtre n’a pas été prolongée.

«Je pense qu’on peut avancer que Pallinghur­st est toujours intéressée, a estimé M. Fitzgibbon. [La relance] n’est pas une course. On peut rassurer les gens en disant que le gouverneme­nt est toujours intéressé. On va le faire avec les bons partenaire­s et la bonne structure de capital. »

Le ministre n’a pas voulu s’avancer sur l’argent supplément­aire qui serait mis sur la table, estimant qu’il était trop tôt.

Idéalement, la relance de Nemaska Lithium passerait par l’arrivée de joueurs institutio­nnels aux reins solides, a estimé M. Fitzgibbon, qui croit qu’il serait préférable pour l’entreprise de ne plus être présente en Bourse.

« Je pense qu’on va le faire [la relance] par phases, a-t-il dit. Je spécule. On pourrait mettre la mine en activité et après cela on complétera l’usine. Pour démarrer la mine, je crois qu’il faut entre 200 millions et 300 millions. »

Bien qu’il soit impossible de garantir aux milliers d’investisse­urs particulie­rs ayant acheté des actions de Nemaska Lithium qu’ils pourront récupérer une partie de leur argent, M. Fitzgibbon espère qu’il «existe une solution qui pourrait » les impliquer.

À la Bourse de Toronto, l’inscriptio­n de Nemaska Lithium sera radiée le 6 février à la fermeture des marchés. La compagnie pourra demander une réinscript­ion lorsqu’elle ne sera plus à l’abri de ses créanciers.

Parallèlem­ent, l’entreprise fait toujours l’objet d’un litige judiciaire avec des créanciers obligatair­es qui détiennent des obligation­s de 350 millions de dollars, puisqu’elle souhaite rembourser ces derniers, ce qui mettrait ainsi fin à leur contrat. Selon le fiduciaire, Nemaska Lithium devrait payer une pénalité de 93 millions $US

La cause reviendra devant le tribunal le mois prochain.

À la Bourse de Toronto, l’inscriptio­n de Nemaska Lithium sera radiée à la fermeture des marchés le 6 février

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