La réflexion sur l’aménagement du territoire exige rigueur et respect
COLLECTIF*
Depuis quelques jours, on tient des propos malheureux sur la question de l’aménagement du territoire opposant les municipalités qui forment la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) aux municipalités et MRC limitrophes.
On accuse les communautés périmétropolitaines de faire fi des enjeux de développement durable dans leur exercice de planification, encourageant ainsi un étalement urbain sans considération pour le territoire agricole. On ajoute que le dézonage continue, et ce, pour la construction de résidences. Or, les données de la Commission de la protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) offrent un éclairage fort différent.
Prenons l’exemple de la MRC du Haut-Richelieu, dont la zone agricole couvre 84 964 hectares. Depuis 1987, selon les données officielles de la CPTAQ, ce sont 35 hectares au total qui ont été exclus de la zone agricole. Dans la MRC Les Jardins-de-Napierville, dont 97% du territoire de 80 235 hectares est zoné agricole, ce sont 99,4 hectares qui ont été dézonés depuis 1978. Il y a deux ans, 3,65 des 8 hectares dézonés visaient l’expansion d’une entreprise de production d’engrais agricole. De son côté, la MRC d’Argenteuil est propriétaire de 245 hectares de terres en zone agricole, productrice et membre de l’UPA.
Quant à la MRC de Montcalm, maintes fois citée dans les commentaires, la réalité diffère encore une fois. Il est vrai que le schéma prévoit de nouvelles zones. Cependant, l’ensemble de ces mesures sont incluses dans le plan de développement de la zone agricole (PDZA), et les dirigeants sont en mesure d’expliquer leurs orientations en aménagement. Mais au-delà des critiques entendues, Montcalm est un des rares territoires dont la zone agricole a été agrandie depuis la révision du début des années 1990 (+140 hectares), et il a vu sa superficie de terres exploitées par l’agriculture croître de 418 hectares.
En fait, nous souhaitons tous préserver et développer notre territoire agricole. À preuve, la plupart des MRC au Québec ont adopté un PDZA. En fait, l’enjeu n’est pas tant le dézonage, mais plutôt la cohérence du développement local et du bien-être collectif de chacune des régions.
Quant à l’augmentation des véhicules dans le réseau de transport métropolitain, à laquelle on a également fait référence, Statistique Canada présente, dans le recensement 2016, un portrait beaucoup plus nuancé que celui contenu dans la note de l’Observatoire du Grand Montréal et qui permet de relativiser les données.
Prises globalement, les MRC périmétropolitaines représentent 16,1 % de la population du Grand Montréal (CMM + MRC périmétropolitaines) et génèrent 6,1% des déplacements dans la CMM. La question du transport est importante, mais elle doit être abordée avec un portrait juste de la situation pour comprendre les causes de la congestion.
L’aménagement du territoire est une responsabilité dont le principal outil est le schéma d’aménagement et de développement, caractérisé par un processus public et transparent favorisant la participation, la concertation et la conciliation des différents acteurs. L’aménagement doit s’appuyer sur des échanges constructifs entre les intervenants et des diagnostics complets qui présentent l’ensemble des aspects du développement, permettant au plus grand nombre de comprendre les défis quant à l’utilisation du territoire et à ses particularités, dans le respect des échelles de planification.
Nos défis sont énormes, et nous devons chercher à résoudre les problèmes, mais à la condition que les échanges soient caractérisés par la rigueur des études et des informations et par le respect de la réalité de chacun. On ne pourra s’attaquer efficacement aux défis posés, notamment par les changements climatiques, en imposant une vision unique de l’aménagement qui ferait porter le poids des décisions passées prises par de multiples acteurs sur les seules épaules des MRC périmétropolitaines. De plus, la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, à titre d’aménagiste en chef du Québec, doit être au coeur de la démarche, notamment pour assurer la cohérence des orientations et des interventions de l’État sur le territoire.
Il est impératif de travailler en concertation et non en opposition. Il faut une réflexion approfondie sur le développement pour assurer la pérennité et la vitalité de l’ensemble des communautés. Il en va de l’intérêt de la grande région de Montréal.
*Ce texte est signé par 14 préfets des MRC périmétropolitaines. La liste des signataires est publiée sur nos plateformes numériques.