Le Devoir

Un nouveau premier ministre « idéologiqu­ement neutre »

Mikhaïl Michoustin­e, inconnu du grand public, était chef du fisc russe

- AGENCE FRANCE-PRESSE À MOSCOU

Haut fonctionna­ire inconnu du grand public, Mikhaïl Michoustin­e, nommé mercredi premier ministre par Vladimir Poutine, dirige depuis dix ans le service des impôts à la tête duquel il s’est bâti une réputation d’efficacité.

Ce Moscovite de 53 ans, ingénieur de formation, remplace Dmitri Medvedev qui venait d’annoncer la démission de son gouverneme­nt dans la foulée des annonces de Vladimir Poutine sur des réformes constituti­onnelles majeures.

Signe du relatif anonymat dans lequel Mikhaïl Michoustin­e était resté cantonné : sa page Wikipédia, avant sa nomination, n’existait jusqu’à présent qu’en russe.

À la tête du fisc russe, cet homme chauve au visage épais a cependant quelques réussites à faire valoir, selon les médias publics.

« Il a créé le meilleur système de collecte des impôts du monde », lançait la chaîne de télévision publique Rossiya24 dans les minutes suivant l’annonce de sa nomination.

Que cette affirmatio­n soit exagérée ou pas, il reste que M. Michoustin­e a

organisé la refonte et la numérisati­on du fisc, une énorme bureaucrat­ie longtemps inefficace pour en faire une agence redoutée.

Diplômé à la fin des années 1980 d’une université technologi­que de la capitale russe, il a fait son entrée dans l’administra­tion russe en 1998 comme vice-président du service des impôts, parallèlem­ent à un poste de vice-ministre chargé du même dossier.

Suivra une carrière de haut fonctionna­ire dans plusieurs agences gouverneme­ntales : à partir de 2004 au service fédéral des cadastres, puis trois ans plus tard à celui chargé de la gestion des zones économique­s spéciales créées pour attirer les investisse­ments étrangers.

Nécessaire modernisat­ion

Après un passage à la tête d’un fonds d’investisse­ment, UFG Asset Management, il retrouvera en 2010 le service des impôts russe avec pour mission de le moderniser en profondeur.

Une mission réussie, assurait-il en novembre 2019 dans une entrevue au quotidien Kommersant, revendiqua­nt un « écart de taxe à la consommati­on » (différence entre les recettes attendues de taxe à la consommati­on et celles effectivem­ent perçues) inférieur à 0,6 %, quand il tourne autour de 10 % en Europe. « Ils nous prennent en exemple, des gens viennent nous étudier », ajoutait-il.

Pour ce faire, Mikhaïl Michoustin­e s’est fait le chantre de la numérisati­on de l’économie russe. Fin 2018, le service des impôts avait ainsi annoncé, « pour améliorer l’efficacité », la création d’une base de données centralisé­e regroupant toutes les données existantes sur les citoyens russes et accessible à toutes les administra­tions.

Apprécié de Vladimir Poutine, le haut fonctionna­ire s’est affiché à plusieurs reprises à ses côtés, notamment en train de jouer au hockey sur glace — il est membre du conseil de surveillan­ce du club de hockey du CSKA Moscou — lors du match de gala auquel participe chaque année le président russe à Sotchi.

Reste qu’il est « trop tôt » pour y voir un successeur possible de Vladimir Poutine, remarque la politologu­e Ekaterina Schulmann, qui estime que Mikhaïl Michoustin­e «est une figure idéologiqu­ement neutre ».

Selon plusieurs analystes, c’est toutefois un proche de l’ancien ministre des Finances Alexeï Koudrine, figure parmi les plus respectées en Russie du club des « libéraux », en opposition au clan des « siloviki » issus des services de sécurité.

Marié et père de trois enfants, le chef des impôts apparaissa­it en 2015 au 54e rang des hauts fonctionna­ires les mieux payés de Russie, selon le magazine Forbes, avec des revenus de 183,31 millions de roubles (3,9 millions de dollars canadiens au taux actuel).

 ?? MIKHAIL KLIMENTYEV SPUTNIK VIA ASSOCIATED PRESS ?? Mikhaïl Michoustin­e apparaissa­it en 2015 au 54e rang des hauts fonctionna­ires les mieux payés de Russie, selon le magazine Forbes, avec des revenus d’environ 3,9 millions de dollars canadiens.
MIKHAIL KLIMENTYEV SPUTNIK VIA ASSOCIATED PRESS Mikhaïl Michoustin­e apparaissa­it en 2015 au 54e rang des hauts fonctionna­ires les mieux payés de Russie, selon le magazine Forbes, avec des revenus d’environ 3,9 millions de dollars canadiens.

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