Dégringolade vertigineuse pour l’économie américaine
Le recul du produit intérieur brut le plus marqué depuis la fin de 2008 lorsque la faillite de la banque Lehman Brothers avait provoqué une récession mondiale
La pandémie de coronavirus a infligé aux États-Unis, au début de l’année, leur plus forte contraction économique depuis la dernière récession. Mais le pire est à venir et les gouvernements doivent réagir, dit la Réserve fédérale américaine (Fed).
Le département américain du Commerce a rapporté, mercredi, un recul du produit intérieur brut (PIB) au cours des trois premiers mois de l’année équivalant à 4,8 % en rythme annualisé. C’était la première baisse trimestrielle depuis 2014 et la plus marquée depuis la fin de 2008 lorsque la faillite de la banque d’affaires Lehman Brothers avait entraîné l’effondrement de Wall Street et provoqué une récession mondiale.
On n’a cependant encore rien vu, estiment les prévisionnistes, qui évoquent une accélération de cette dégringolade lors du trimestre allant d’avril à la fin juin, où le rythme de cette décroissance pourrait approcher les 40 %, ce qui serait du jamais vu depuis qu’on a commencé à tenir ces statistiques trimestrielles, en 1947.
Plombée par la pandémie de COVID19 et les mesures de confinement des gouvernements pour en freiner l’avancée, l’économie américaine va « probablement chuter à un rythme sans précédent au deuxième trimestre », a confirmé le président de la Fed, Jerome Powell, lors d’une conférence de presse à distance.
On savait déjà que les rangs des nouveaux demandeurs d’assurancechômage avaient grossi de 26 millions de la mi-mars à la mi-avril. On a appris mercredi qu’après un bon départ, le premier trimestre a tourné au cauchemar dans la seconde moitié du mois de mars. Au coeur de l’activité économique des pays développés, la consommation des ménages a finalement reculé, par exemple, de 7,8 % en rythme annualisé, du jamais vu depuis 1980. Signe de la soudaine méfiance des ménages, leur taux d’épargne est passé d’un seul coup de 7,6 % à 9,6 %, alors que l’investissement des entreprises s’est replié de 8,6 %.
Aux gouvernements de faire plus
Contrairement à son habitude, mais comme elle l’a fait depuis le début de la crise sanitaire, la Fed s’est gardée, mercredi, d’y aller de ses propres prévisions pour l’économie américaine. « L’ampleur et la durée du ralentissement économique sont extrêmement incertaines et dépendront en grande partie de la rapidité avec laquelle le virus sera maîtrisé », a expliqué Jerome Powell.
La banque centrale n’a pas annoncé non plus de nouvelles mesures de stimulation monétaire, ayant déjà abaissé son taux directeur dans la mince fourchette comprise entre 0 % et 0,25 % et procédant déjà à l’injection de liquidités dans les marchés financiers qui l’ont amenée à acheter pour près de 2 000 milliards d’actifs seulement depuis la mi-mars. Elle s’est néanmoins dite prête à déployer tous les efforts nécessaires aussi longtemps qu’il faudra afin d’assurer une reprise « aussi robuste que possible ».
D’autres programmes de financement des entreprises et des gouvernements locaux devraient démarrer bientôt, a rappelé le président de la banque centrale, mais cela ne suffira pas. Même si l’économie devait commencer à rebondir dans la seconde moitié de l’année, il y a peu de chance qu’elle revienne rapidement à ce qu’elle était encore seulement au mois de février. Pour éviter le pire, les travailleurs et les entreprises frappés par la crise ont besoin d’une aide financière directe et de politiques de relance économique que seuls les gouvernements ont le pouvoir de leur apporter.
Tout en reconnaissant que ces derniers ont déjà beaucoup fait, la Maison-Blanche et le Congrès ayant, à eux seuls, déjà promis 2 600 milliards en aide de différentes formes, Jerome Powell presse néanmoins les gouvernements à ne pas s’arrêter en si bon chemin. « C’est le moment d’utiliser la grande puissance budgétaire des ÉtatsUnis pour soutenir l’économie et essayer de traverser [cette crise] avec le moins de dommages possibles sur les capacités de production à long terme de l’économie. »
Le banquier central se dit particulièrement inquiet de l’effet que pourrait avoir un prolongement de la crise sur les travailleurs les plus modestes, qui avaient à peine commencé, depuis un an ou deux, à vraiment profiter de la plus longue période de croissance économique ininterrompue de l’histoire du pays, ainsi que sur les PME qui sont le fondement de la prospérité.
Habituellement extrêmement soucieux de ne pas attirer sur lui les foudres du président Trump, qui en a fait l’un de ses boucs émissaires de prédilection, il n’a pas hésité à rejeter du revers de la main les hésitations que des élus de la droite républicaine commencent à avoir quant à l’impact qu’auront toutes ses politiques d’aide sur la dette publique. « Ce n’est pas le moment, de mon point de vue, de laisser de telles considérations nous empêcher de mener et de gagner la bataille », a-t-il déclaré non sans rappeler, au passage, que ces mêmes élus étaient restés sourds à ses propres appels à la réduction des déficits les dernières années.
Espoir en Bourse
La Bourse de New York a malgré tout bouclé la journée en forte hausse, l’indice élargi S&P 500 s’appréciant de 2,7 %, encouragée, apparemment, par les bons résultats obtenus lors de tests préliminaires réalisés sur de nouveaux traitements des malades atteints de la COVID-19. Bien que prometteur, l’un de ces traitements antiviraux, appelé remdesivir, n’est « ni agréé ni approuvé nulle part dans le monde et n’a pas prouvé sa sécurité ou son efficacité pour le traitement de la COVID-19 », a tenu à rappeler, mercredi, la biotech Gilead Sciences, qui travaille à sa mise au point.
On n’a encore rien vu, estiment les prévisionnistes, qui évoquent une accélération de cette dégringolade au trimestre d’avril à la fin juin, du jamais vu depuis qu’on a commencé à tenir des statistiques trimestrielles, en 1947