Éclosion de COVID-19 à l’institut psychiatrique Douglas
L’institut universitaire en santé mentale Douglas connaît une éclosion de COVID-19. Pas moins de 16 patients et 22 employés, dont des préposés aux bénéficiaires, des infirmières et des médecins, y ont été déclarés positifs à la COVID-19, a confirmé le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de l’Ouest-del’Île-de-Montréal mercredi soir.
Le nouveau coronavirus a pénétré à l’intérieur des murs de l’urgence psychiatrique au fil des derniers jours, a appris Le Devoir. Les membres du personnel soignant et administratif à pied d’oeuvre n’ont pas été épargnés. En effet, une demi-douzaine d’entre eux ont reçu un diagnostic du nouveau coronavirus depuis le début de la semaine.
Des consoeurs et des confrères de travail, qui présentent des symptômes de grippe, attendaient toujours mercredi les résultats de leur test de dépistage.
Cette éclosion de cas intervient après que le CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal a effectué le transfert des patients — et du personnel soignant — de l’unité de psychiatrie de l’hôpital général du Lakeshore vers un pavillon de l’institut Douglas. Le but de l’opération consistait notamment à délester l’hôpital général du Lakeshore, qui est confronté à une flambée de cas de COVID19. Au total, 79 patients sont atteints du nouveau coronavirus dans cet établissement de Pointe-Claire désigné pour accueillir des patients déclarés positifs au nouveau coronavirus.
Un médecin résident figure parmi les personnes nouvellement infectées à l’institut Douglas. Alertée, l’Université McGill a rappelé tous les médecins résidents de l’urgence de l’institut Douglas pour les redéployer ailleurs dans le réseau de la santé, y compris dans des unités de soins classés « rouges ». La décision en a fait sourciller plus d’un, d’autant plus qu’elle entre en collision avec de « nouvelles directives » visant à freiner la propagation de la COVID-19.
En effet, les directeurs de l’éducation du réseau de santé Université McGill ont demandé dimanche aux médecins résidents de « respecter la politique “d’un site par semaine” et même, idéalement, d’un site par mois, si possible » en plus de porter l’équipement de protection individuelle (EPI) approprié et adopter une « hygiène des mains irréprochable ». « S’il est clair qu’un résident travaille dans un milieu clinique où une éclosion a été relevée, celui-ci ne pourra pas travailler dans un autre
milieu clinique », soulignent-ils dans une note de service dont Le Devoir a obtenu copie. Aux yeux des gestionnaires signataires du document, « le déplacement de nos résidents entre plusieurs sites constitue un risque inutile qui favorise la propagation du virus entre les établissements de soins de santé ».
Climat tendu
L’urgence de l’institut Douglas, qui offre des soins aux personnes souffrant de maladies mentales, poursuivait quant à elle ses activités mercredi à effectifs réduits.
Un médecin raconte au Devoir avoir été incapable de donner le congé à un de ses patients puisque la résidence pour personnes âgées où il habite refuse de lui redonner accès à sa chambre de peur qu’il apporte avec lui la COVID-19. Le même médecin dit avoir refusé d’admettre un individu à l’urgence de crainte qu’il y contracte le nouveau coronavirus. Il a préféré le confier, pour l’instant, aux soins de ses proches.
Un climat de méfiance s’est installé sur le complexe de bâtiments bordé d’arbres matures et d’espaces verts. Rappelons que le pavillon CPC3, qui accueille habituellement des patients atteints de troubles graves et persistants, avait été le théâtre d’une éclosion de COVID-19 il y a quelques semaines. « Les membres du personnel sont mécontents. Ils n’ont pas été avisés qu’ils étaient à risque. Ils ignorent si les personnes sous investigation travaillent toujours ? » indique l’un d’eux sous le couvert de l’anonymat. « Et plusieurs membres du personnel refusent de porter des masques », poursuit-il.
Le « stress » monte dans les bâtiments de l’institut Douglas, s’inquiète la présidente du Syndicat des professionnelles en soins de santé de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal, Johanne Riendeau. La situation n’est pas étrangère au manque de personnel, selon elle. « Les gens sont anxieux.
Ce n’est pas facile de respecter la “règle des deux mètres”. Les patients sont désorganisés au Douglas. On ne peut pas se fier à ce qu’ils disent. Ils se promènent. Ils vont fumer. Certains ne veulent pas porter de masque », souligne-t-elle.
Dépistage systématique ?
Parmi les hôpitaux qui connaissent des éclosions importantes, l’institut Douglas et l’hôpital Maisonneuve-Rosemont sont les rares qui ne font pas systématiquement passer de tests de dépistage à tous les nouveaux patients admis et au personnel soignant.
À l’hôpital Maisonneuve-Rosemont, « ce n’est pas prévu pour le moment », a indiqué Catherine Dion, du service des communications du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal. Actuellement, il y aurait huit éclosions dans cet hôpital et une à l’hôpital Santa Cabrini, l’autre hôpital géré par ce CIUSSS.
À l’hôpital Sacré-Coeur, où des éclosions ont été signalées dans au moins cinq unités sur quatre étages, une vaste opération de dépistage est en cours. Même chose à l’hôpital de Verdun et à l’hôpital Notre-Dame, qui ne connaissent pas d’éclosion en ce moment, mais font passer des tests aux patients et également au personnel, mais dans ce dernier cas, seulement s’il y a une éclosion de COVID. « Après la première éclosion à l’hôpital de Verdun [début avril], on s’est mis à tester toute personne qui rentrait dans nos hôpitaux et c’est parce qu’on a fait ça qu’on a détecté la deuxième éclosion [à Verdun] », a affirmé Jean-Nicolas Aubé, porte-parole du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal.
À l’extérieur de Montréal, le CIUSSS de l’Estrie a admis avoir été aux prises avec une éclosion à son hôpital Fleurimont de Sherbrooke, mais elle serait « sous contrôle ». « La réalité n’est pas du tout la même qu’à Montréal », a indiqué Félix Massé, porte-parole du CIUSSS de l’Estrie. « Nous ne faisons pas face à plusieurs éclosions en soins de courte durée. »
Les éclosions et le débordement des urgences ont forcé plusieurs hôpitaux à fermer des unités, transférer des patients ailleurs et à suspendre des chirurgies.