Le Devoir

Québec rouvre des régions, les Autochtone­s ferment leurs routes

- MARIE-MICHÈLE SIOUI CORRESPOND­ANTE PARLEMENTA­IRE À QUÉBEC Avec Isabelle Porter

La levée progressiv­e des barrages routiers annoncée mercredi par Québec crée un effet antagonist­e dans certaines communauté­s autochtone­s, où les chefs entendent multiplier les mesures de contrôle pour protéger leurs résidents.

Dès lundi, les contrôles policiers seront retirés dans les Laurentide­s, Lanaudière, Chaudière-Appalaches et la ville de Rouyn-Noranda. Suivront, le 11 mai, La Tuque et les régions de l’Outaouais (sauf Gatineau), de l’Abitibi et du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Le 18 mai, l’accès vers le Bas-St-Laurent, la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, Charlevoix et la Côte-Nord sera rétabli.

Or, d’ici là, la situation risque d’évoluer en sens inverse dans les 40 communauté­s autochtone­s du Québec, dont 7 seulement n’ont pas installé de mesures de contrôle ou interdit les déplacemen­ts sur leur territoire depuis le début de la pandémie.

« Pour le moment, on est obligés de prendre des mesures extrêmes [pour se protéger] », a souligné le grand chef de Kanesatake, Serge Otsi Simon. Au cours des derniers dix jours, « on a refusé l’accès à plus de 4000 véhicules » qui voulaient entrer dans la communauté, a-t-il ajouté.

« Ce qu’on va sans doute recommande­r, c’est de permettre aux communauté­s de renforcer les mesures de contrôle qu’elles se sont données », a aussi réagi le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard.

À la ministre Geneviève Guilbault, qui a dit avoir travaillé, « depuis le début, de très près » avec les Autochtone­s, il a répliqué qu’il était « obligé de dire que ce n’est pas le cas ». Il a cité en exemple les sempiterne­lles négociatio­ns au sujet du financemen­t entre les paliers de gouverneme­nt.

Québec a demandé « d’éviter les déplacemen­ts superflus », en rappelant que l’ouverture des régions devait surtout servir les entreprise­s et les travailleu­rs qui reprendron­t leurs activités sous peu.

Reste que la cheffe de Lac-Simon, non loin de Val-d’Or, demeure « inquiète, c’est certain ». « On n’est pas

Pour le moment, on est obligés de prendre des mesures extrêmes [pour se protéger] SERGE OTSI SIMON

à l’abri de ça », a dit Adrienne Jérôme au sujet de la COVID-19, qui a jusqu’ici épargné sa communauté.

Du côté des municipali­tés, les réactions ont été positives — même au Bas-Saint-Laurent, où les élus avaient plaidé récemment pour le maintien à court terme des barrages. Le président de la Table régionale des élus municipaux, Michel Lagacé, a dit croire avoir suffisamme­nt de temps pour se préparer d’ici la levée des barrages.

« À partir du moment où on ouvrait la constructi­on, il fallait automatiqu­ement faire l’équivalent pour la mobilité de la main-d’oeuvre », a aussi réagi la présidente intérimair­e de l’Union des municipali­tés du Québec (UMQ), Suzanne Roy. « La préparatio­n de la saison touristiqu­e doit aussi être envisagée. »

Jacques Demers, de la Fédération québécoise des municipali­tés, s’est vu rassuré par l’approche prudente de Québec, qui s’est donné la latitude de renoncer à certaines mesures de déconfinem­ent si la courbe d’infection repart à la hausse.

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