Québec rouvre des régions, les Autochtones ferment leurs routes
La levée progressive des barrages routiers annoncée mercredi par Québec crée un effet antagoniste dans certaines communautés autochtones, où les chefs entendent multiplier les mesures de contrôle pour protéger leurs résidents.
Dès lundi, les contrôles policiers seront retirés dans les Laurentides, Lanaudière, Chaudière-Appalaches et la ville de Rouyn-Noranda. Suivront, le 11 mai, La Tuque et les régions de l’Outaouais (sauf Gatineau), de l’Abitibi et du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Le 18 mai, l’accès vers le Bas-St-Laurent, la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, Charlevoix et la Côte-Nord sera rétabli.
Or, d’ici là, la situation risque d’évoluer en sens inverse dans les 40 communautés autochtones du Québec, dont 7 seulement n’ont pas installé de mesures de contrôle ou interdit les déplacements sur leur territoire depuis le début de la pandémie.
« Pour le moment, on est obligés de prendre des mesures extrêmes [pour se protéger] », a souligné le grand chef de Kanesatake, Serge Otsi Simon. Au cours des derniers dix jours, « on a refusé l’accès à plus de 4000 véhicules » qui voulaient entrer dans la communauté, a-t-il ajouté.
« Ce qu’on va sans doute recommander, c’est de permettre aux communautés de renforcer les mesures de contrôle qu’elles se sont données », a aussi réagi le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard.
À la ministre Geneviève Guilbault, qui a dit avoir travaillé, « depuis le début, de très près » avec les Autochtones, il a répliqué qu’il était « obligé de dire que ce n’est pas le cas ». Il a cité en exemple les sempiternelles négociations au sujet du financement entre les paliers de gouvernement.
Québec a demandé « d’éviter les déplacements superflus », en rappelant que l’ouverture des régions devait surtout servir les entreprises et les travailleurs qui reprendront leurs activités sous peu.
Reste que la cheffe de Lac-Simon, non loin de Val-d’Or, demeure « inquiète, c’est certain ». « On n’est pas
Pour le moment, on est obligés de prendre des mesures extrêmes [pour se protéger] SERGE OTSI SIMON
à l’abri de ça », a dit Adrienne Jérôme au sujet de la COVID-19, qui a jusqu’ici épargné sa communauté.
Du côté des municipalités, les réactions ont été positives — même au Bas-Saint-Laurent, où les élus avaient plaidé récemment pour le maintien à court terme des barrages. Le président de la Table régionale des élus municipaux, Michel Lagacé, a dit croire avoir suffisamment de temps pour se préparer d’ici la levée des barrages.
« À partir du moment où on ouvrait la construction, il fallait automatiquement faire l’équivalent pour la mobilité de la main-d’oeuvre », a aussi réagi la présidente intérimaire de l’Union des municipalités du Québec (UMQ), Suzanne Roy. « La préparation de la saison touristique doit aussi être envisagée. »
Jacques Demers, de la Fédération québécoise des municipalités, s’est vu rassuré par l’approche prudente de Québec, qui s’est donné la latitude de renoncer à certaines mesures de déconfinement si la courbe d’infection repart à la hausse.