À la limite de la résilience
La fragilisation financière a pu être endiguée par l’aide massive des gouvernements
Le déconfinement progressif est amorcé au Québec avec, pour toile de fond, une réouverture graduelle de l’économie. Si les mesures de restrictions atteignent un certain degré d’intolérance dans la population, elles arrivent à la limite de la résilience chez les entreprises dont l’activité n’entre pas dans la définition de produits et services essentiels.
Le sondage conjoint Statistique Canada et Chambre de commerce du Canada, réalisé du 3 au 24 avril auprès de quelque 12 600 entreprises, indique que l’impact de la COVID-19 sur les revenus est plutôt ressenti avec 53,5 % des répondants disant avoir mesuré une diminution de revenus de 20 % ou plus au premier trimestre. Et ce, alors que la fermeture des entreprises jugées non essentielles est survenue après la mi-mars (le 25 mars au Québec). De plus, elles sont plus nombreuses (34,1 % des répondants) à déclarer qu’elles ne pourront survivre moins de six mois, contre 32,1 % disant pouvoir dépasser ce laps de temps. Mais sous ces données, 17,5 % des entreprises canadiennes (20 % des québécoises) soutiennent ne pouvoir poursuivre leurs activités ou une partie de leurs activités avec des mesures de distanciation sociale en place.
En revanche, la fragilisation financière a pu être endiguée par l’aide massive des gouvernements sous forme de prestations ou de garanties de prêt. Ainsi, 62,1 % des répondants n’ont fait aucune demande de crédit à une institution financière pour couvrir leurs frais d’exploitation affectés par la COVID-19. Par contre, 22,1 % l’ont fait, et 6,5 % ont essuyé un refus. Près des trois quarts n’ont pas eu à procéder à une liquidation d’actifs et chez les entreprises ayant un loyer à rencontrer, 13 % ont dû reporter le paiement contre le double n’ayant pas eu à le faire. Quelque 16 % affirment toutefois ne pas avoir eu la possibilité de reporter le paiement du loyer.
Quant aux écarts, les plus fortes baisses de revenus en pourcentage ont été déclarées dans les secteurs de l’hébergement, des services de restauration, des arts, des spectacles et des loisirs et du commerce de détail. À l’autre bout du spectre, plus de 40 % des entreprises des secteurs de l’agriculture, de la foresterie, de la pêche et de la chasse et des services publics n’ont déclaré aucun changement ou ont déclaré une augmentation de leurs revenus, poursuit l’étude conjointe.
Et si 64,8 % des entreprises déclarent avoir subi des répercussions élevées en raison de la baisse de la demande de leurs produits ou services, 48,5 % ont plutôt été contraintes d’annuler les services qu’elles offraient. Ces dernières se retrouvent également dans les secteurs de l’hébergement, de la restauration, des loisirs et des arts et spectacles et du commerce de détail.
Question d’ajouter au jeu des écarts, un récent sondage de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) indiquait que près de la moitié des PME québécoises ont vécu une baisse de plus de 70 % de leurs revenus. Et 43 % d’entre elles disaient ne pas pouvoir survivre plus d’un mois à une forte baisse de leurs revenus.
Chez les travailleurs, uniquement au chapitre des pertes d’emplois au Québec, le secteur des biens a perdu 9000 emplois en mars alors que celui de la production des services a vu son nombre baisser de 255 000. Le gros des pertes est venu de l’hébergement et de la restauration (-24,4 %), suivi des services d’enseignement autres que le système public (-22,8 %), puis de la culture et des loisirs (-14,5 %). Encore là, le pire est à venir avec la lecture d’avril.
Une dominante se dégage de ces sondages à grande échelle ayant pour effet d’atténuer l’hétérogénéité des répondants et de niveler la gravité du ressenti selon les secteurs et industries. Ils sont très nombreux à craindre des dommages permanents.
Les plus fortes baisses de revenus en pourcentage ont été déclarées dans les secteurs de l’hébergement, des services de restauration, des arts, des spectacles et des loisirs et du commerce de détail.