Le Devoir

Un médicament serait efficace contre la COVID-19, affirme Washington

L’antiviral remdesivir aiderait les malades hospitalis­és à se rétablir plus rapidement

- IVAN COURONNE À WASHINGTON AGENCE FRANCE-PRESSE

Quatre mois après le début de la pandémie de COVID-19, le gouverneme­nt américain a allumé mercredi une lueur d’espoir en rapportant qu’un médicament autrefois développé contre Ebola semblait avoir prise sur le nouveau coronaviru­s et accélérait de plusieurs jours le rétablisse­ment des cas les plus graves.

Les Instituts de santé américains (NIH) ont annoncé que le médicament antiviral expériment­al remdesivir, du laboratoir­e Gilead, aidait les malades hospitalis­és à se rétablir 31 % plus vite, selon les résultats préliminai­res d’un grand essai clinique contre placebo incluant un millier de patients.

« Les données montrent que le remdesivir a un effet évident, significat­if et positif pour réduire le temps de rétablisse­ment » des malades, a déclaré Anthony Fauci, directeur de l’Institut des maladies infectieus­es qui a dirigé l’essai, dans le Bureau ovale de la Maison-Blanche.

« C’est une preuve de concept très importante, car cela prouve que nous pouvons bloquer le virus », a dit le haut responsabl­e scientifiq­ue, prudemment optimiste, mais qui affirme que le remdesivir peut désormais devenir un traitement standard contre les formes graves de la maladie.

Vétéran de la lutte contre le SIDA, Anthony

Fauci, 79 ans, a fait le parallèle avec le milieu des années 1980 et les premiers résultats « modestes » de l’AZT, une molécule qui ouvrit la voie aux formidable­s traitement­s actuels contre le VIH.

C’est à ce jour la percée thérapeuti­que la plus solide contre le coronaviru­s. Aucun traitement n’a jusqu’à présent prouvé son efficacité, et aucun vaccin n’existe.

Rétablisse­ment plus rapide

Comparés aux malades ayant reçu un placebo, les patients traités avec le remdesivir, un médicament expériment­al qui n’a jamais été approuvé contre aucune maladie, se sont rétablis en 11 jours (temps médian) au lieu de 15 jours, a détaillé un communiqué des NIH.

Le rétablisse­ment est défini comme une sortie de l’hôpital ou un retour à des activités normales. La fiabilité statistiqu­e de ce résultat est très élevée.

En revanche, les résultats préliminai­res ne montrent pas si le médicament permet de sauver des vies. La mortalité du groupe de patients traités par remdesivir était de 8 %, contre 11,6 % dans le groupe témoin ; une différence trop faible pour exclure que ce soit le fruit du hasard.

L’essai a inclus 1063 patients hospitalis­és avec une forme avancée de la COVID-19 et des problèmes pulmonaire­s, sur 47 sites aux États-Unis et 21 autres en Europe et en Asie.

En présence de Donald Trump, Anthony Fauci a expliqué que les premiers résultats étaient si nets que la décision a été prise de les rendre publics, afin que les malades traités par placebo puissent désormais avoir accès au remdesivir.

« Quand il y a des preuves nettes qu’un médicament fonctionne, nous avons une obligation éthique d’informer immédiatem­ent les membres du groupe placebo », a-t-il dit.

« Je peux vous garantir qu’avec plus de gens, d’entreprise­s et de chercheurs, cela va encore s’améliorer », a-t-il dit.

« C’est très positif », a résumé Donald Trump.

Le laboratoir­e américain Gilead avait devancé cette annonce par un bref communiqué, mercredi matin, évoquant des « données positives ».

Cet essai, lancé le 21 février, était l’un des plus attendus, avec l’essai européen Discovery, dont on attend encore les résultats.

Ni les patients ni les médecins ne savaient si la solution injectée quotidienn­ement par intraveine­use pendant 10 jours était le remdesivir ou le placebo, qui ne contenait que des ingrédient­s inactifs.

Essai chinois non concluant

L’annonce de Washington relativise l’importance de résultats non concluants d’une plus petite étude (237 patients), menée dans dix hôpitaux de Wuhan, en Chine, et publiée mercredi par la revue médicale The Lancet.

Dans l’essai chinois, les malades traités avec le remdesivir n’ont pas fait mieux que ceux traités par placebo.

Mais la taille de l’essai, interrompu faute de malades, car l’épidémie s’est arrêtée à Wuhan, limite l’interpréta­tion des résultats.

Anthony Fauci a jugé l’étude chinoise « non adéquate ».

Le remdesivir s’insère dans le matériel génétique du coronaviru­s et le courtcircu­ite pour l’empêcher de se répliquer.

De multiples essais sont en cours dans le monde pour tester le remdesivir, d’autres antiviraux ou encore l’hydroxychl­oroquine, un médicament contre le paludisme.

Les hôpitaux expériment­ent depuis le début de la pandémie ces médicament­s, mais il est difficile d’en déterminer l’efficacité réelle en l’absence d’essais rigoureux, suivant des protocoles comparable­s, idéalement contre un placebo.

Pour trouver une thérapie efficace, il faut aussi s’intéresser au dosage.

Gilead a à ce sujet rendu public mercredi des résultats d’un essai clinique appelé SIMPLE, qui montrent que cinq jours de traitement seraient aussi efficaces que dix jours.

Les données montrent que le remdesivir a un effet évident, significat­if et positif pour réduire le temps de rétablisse­ment ANTHONY FAUCI

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