Le Devoir

Blais rejette tout blâme pour la situation dans les CHSLD

« Je n’avais pas le pouvoir de changer les choses », plaide la ministre

- MARIE-MICHÈLE SIOUI CORRESPOND­ANTE PARLEMENTA­IRE À QUÉBEC

Marguerite Blais en est à sa septième année comme ministre responsabl­e des Aînés, et pourtant : elle n’entend pas assumer la responsabi­lité du drame qui se déroule dans les Centres d’hébergemen­t et de soins de longue durée (CHSLD) du Québec, préférant évoquer « une responsabi­lité collective » face à une situation qui s’observe « pas seulement au Québec, mais à travers le monde entier ».

La ministre, discrète dans les médias depuis plusieurs jours, s’est prêtée à une série d’entrevues vendredi. Le Devoir lui a demandé à trois reprises si elle acceptait une part de responsabi­lité face aux bouleverse­ments qui accablent les CHSLD, où la COVID-19 a jusqu’ici fait ses plus graves ravages. Elle a évité de répondre directemen­t à cette question, préférant parler d’une « responsabi­lité collective » et rappeler le mea culpa du premier ministre François Legault, qui a déclaré le 17 avril que le Québec était « mal équipé » pour faire face au coronaviru­s.

« Le premier ministre s’est excusé, il a dit : “je prends toute la responsabi­lité” », a répondu la ministre Blais.

Bien qu’elle se soit dite bouleversé­e par la situation actuelle — qui la réveille « aux petites heures du matin » —, l’élue a refusé les analyses voulant qu’elle ait été la mieux placée pour voir venir la catastroph­e.

Marguerite Blais a été élue sous la bannière libérale en 2007 et la même année, le premier ministre Jean Charest lui a créé le poste de ministre responsabl­e des Aînés. Elle a occupé cette fonction jusqu’en 2012 et mené, dès son arrivée, une consultati­on publique sur les aînés, dont l’un des trois grands axes était les « différents milieux de vie ».

Or, elle estime qu’elle n’avait aucune emprise sur la situation des CHSLD.

« Ce n’était pas ma responsabi­lité de m’occuper des personnes vulnérable­s », a-t-elle dit au Devoir. « Je n’avais pas le pouvoir de changer les choses [dans les CHSLD] », a-t-elle insisté, en rappelant qu’elle relevait alors du ministère de la Famille et des Aînés, et non pas de celui de la Santé, comme c’est le cas actuelleme­nt.

« Des fois, j’étais dans les communiqué­s [de presse] par rapport aux CHSLD et je n’avais pas la responsabi­lité », a-t-elle confié. Elle a assuré avoir relayé les inquiétude­s des citoyens à ses collègues à la Santé — les ministres Philippe Couillard et Yves Bolduc —, sans grand succès. « Bien sûr que j’en ai parlé, mais je ne l’ai pas eu le dossier, alors je ne l’ai pas eu... C’est ça », a-t-elle précisé.

Pas d’excuse de Blais

En vertu des fonctions que lui a confiées le premier ministre Legault, Marguerite Blais a dit juger « avoir une première responsabi­lité » au sujet des milieux de vie.

Quand Le Devoir lui a demandé si elle était prête à s’excuser au sujet de la situation des CHSLD, elle a répondu par une question. « Pourquoi je ne le ferais pas ? » a-t-elle répondu, sans demander pardon pour autant.

« Quand le premier ministre parle, c’est tout le gouverneme­nt qui parle. » Elle a ensuite souligné l’importance de « refaire un examen de conscience collectif » afin que, « collective­ment, on repense à notre façon de traiter nos personnes les plus vulnérable­s dans notre société ».

Il n’est cependant pas question, à ce jour, d’envisager des sanctions envers des dirigeants de la santé qui auraient bafoué les directives ministérie­lles et mis leurs employés à risque, a-t-elle averti. Pas question, non plus, d’accepter la commission d’enquête publique qu’a exigée une associatio­n de retraités. « On va parler de ça quand la crise sera terminée », a affirmé l’élue. « Pour l’instant, on n’est pas en train de parler de congédier des gens. »

En guise de solution « prioritair­e » à la crise qui se joue, la ministre Blais a envisagé la « reconstruc­tion des CHSLD vétustes ». Elle a dit souhaiter que le Québec soit autosuffis­ant « au niveau du matériel médical » et ne compte plus sur des « équipes qui se promènent d’un établissem­ent à l’autre ».

Elle n’a pas voulu se prononcer sur l’implantati­on des « projets-ratio », qui visaient à établir des charges de travail sécuritair­es pour les travailleu­rs de la santé. « C’est [la ministre de la Santé, Danielle] McCann qui regarde ça, et on va le regarder quand ce sera le temps », a-t-elle déclaré.

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