Le plaisir retrouvé d’échanger avec son boucher
La Boucherie dans la côte travaille avec des bêtes entières élevées et bichonnées dans le plus grand respect
Une fois l’onde de choc absorbée, plusieurs ménages ont vu leurs habitudes alimentaires complètement bouleversées. Il aura fallu se retrousser les manches et reprendre le contrôle des fourneaux. Trois repas par jour ! Le budget normalement alloué aux sorties peut être redirigé vers l’achat de produits plus fins. On redécouvre le commerce de proximité et le plaisir d’échanger des recettes, notamment avec son boucher.
L’année 2020 ne s’annonçait déjà pas de tout repos pour David Aghapekian. Propriétaire de la Boucherie dans la côte installée sur la rue De Bleury depuis 2015, il a appris à la fin de l’année dernière qu’il devrait déménager au mois de février. « Une histoire banale. L’immeuble où j’étais a été racheté, le nouveau propriétaire ne voulait pas renouveler les baux et nous n’avions aucun recours », explique-t-il au bout du fil. Il faut savoir que ces petits commerçants qui mettent en avant des produits artisanaux ne font pas d’énormes marges et qu’une telle secousse ébranle inévitablement leur situation financière déjà précaire.
La boucherie de David Aghapekian, un ancien dépanneur situé dans un quartier où l’offre n’était pas très diversifiée, a bénéficié de cinq années cruciales pour développer et fidéliser sa clientèle. En plus d’un superbe choix de viandes d’élevage, elle offrait une très sélecte proposition de bières et de vins d’ici ainsi que de généreux sandwichs gourmands. Un peu découragé à l’idée de devoir repartir à zéro, David a alors cherché en vain un nouveau local commercial adapté à ses besoins.
C’est Fernande Ouellet, propriétaire de la ferme de volailles Rusé comme un renard, bien connue dans le milieu de la gastronomie, qui a eu l’idée géniale de mettre son client et ami en contact avec le Marché des saveurs situé au marché Jean-Talon. L’établissement, qui a pour mission de faire découvrir aux consommateurs les produits artisanaux des petits producteurs régionaux du Québec, cherchait depuis un moment à partager la généreuse superficie de son local avec un colocataire idéal.
C’est avec son alléchant comptoir de viande qu’il vient assumer cette tâche, en plus d’apporter un complément à l’offre déjà en place dans le grand marché. Il fait partie de ces bouchers qui travaillent avec des bêtes entières — ce qui semble une évidence et qui pourtant ne l’est pas — élevées et bichonnées dans le plus grand respect.
C’est sans tambour ni trompette que l’ouverture de la nouvelle boucherie s’est faite, il y a de cela deux mois déjà. Le jeune entrepreneur préfère voir le bon côté des choses. « Je ne savais pas à quelle sauce on allait se faire manger », confie-t-il en riant. Il est très heureux de son nouvel emplacement, et la situation actuelle lui a permis de prendre le temps de s’y acclimater. Il ignore toutefois le type d’achalandage auquel il doit s’attendre au retour de la crise.
Certains détails du chantier n’ont pu être réglés à temps. La cuisinière au gaz, par exemple, n’est pas encore branchée. En attendant le prêt-à-manger qui en dépend, on peut se régaler de belles pièces à griller, de petits poulets fermiers, de saucisses maison ou encore du délicieux boudin blanc de David.
Derrière sa belle vitrine bien garnie, il se sent privilégié de pouvoir continuer à exercer son métier. Il peut non seulement renouer avec ses anciens clients qui l’ont suivi jusqu’ici, mais aussi rencontrer les nombreux habitués de sa nouvelle famille d’adoption, qui soufflera cet été ses 20 bougies. La popularité du barbecue, toujours au centre de nos étés, sera d’autant plus propulsée par l’annulation de la plupart des activités estivales. Aussi bien en discuter avec le boucher !
Au Marché des saveurs du mardi au samedi, de 10 h à 18 h.