Un hier si lointain
Certains d’entre nous sont nostalgiques du temps d’avant, d’autres semblent beaucoup plus sereins. Les traces de cette vie révolue sont pourtant là partout autour de nous — dans ce tiroir où sont remisés billets de spectacles et produits de maquillage, dans ces albums photos garnis de moments croqués aux quatre coins du monde ou encore sur cette grande table déserte prête à accueillir famille et amis. De nombreux lecteurs ont répondu à notre appel et nous ont fait part de ces traces tangibles, souvenirs d’un instant, d’un moment, d’une émotion qui leur sont chers, mais qui se sont soudainement dérobés lorsque la crise de la COVID-19 est apparue. Nous reproduisons aujourd’hui plusieurs de ces témoignages ci-dessous et en pages B 2 et B 3.
Et nous sollicitons une nouvelle fois votre participation, ce coup-ci pour vous projeter dans l’avenir. Puisqu’il y a du positif dans tout, dites-nous ce que vous souhaitez conserver de cette période de confinement dans votre vie après-COVID ? Est-ce ce temps distendu qui vous permet désormais de partager beaucoup plus de moments avec vos enfants ? Ou encore cette nouvelle passion pour la boulangerie ? Et qu’en est-il de ce regain d’enthousiasme pour la correspondance envoyée par la poste ? Envoyez-nous vos courts récits à l’adresse mboutros@ledevoir.com.
Ma tasse réutilisable
JULIETTE CHEVALIER
Synonyme d’aventure, de retard et de voyage. Symbole du sentiment d’empressement que je n’aurais jamais cru manquer. Maintenant à la maison en tout temps, ma tasse réutilisable prend la poussière sur une étagère. La simple tasse de porcelaine la remplace aisément. Je ne suis plus en mouvement, je suis éternellement immobile. Je n’ai plus la nécessité d’emporter une part de la maison, de l’odeur du café matinal et de réconfort avec moi tous les matins. Je ne peux plus la remplir au service au volant du Tim Hortons en guise d’encouragement avant de commencer une journée chargée : la tasse réutilisable est maintenant un danger plutôt qu’un instrument au service de l’environnement. Elle est devenue obsolète, tout comme l’argent liquide. L’aventure est devenue un quotidien lent et répétitif. Tous les matins, le café se prend à la table plutôt qu’en déplacement. La tasse réutilisable tombe dans l’oubli, rangée et nettoyée, en attente de redevenir une nécessité.