Le Devoir

Musiciens pigistes : Québec « très sensible »

Selon le cabinet de Nathalie Roy, il n’est toutefois pas question de « réinventer la culture », mais bien de réinventer temporaire­ment le rendez-vous entre l’oeuvre et son public

- CORONAVIRU­S PHILIPPE PAPINEAU

Les inquiétude­s soulevées dans une lettre ouverte par quelque 120 musiciens indépendan­ts qui doutent de voir une éventuelle aide financière se rendre jusqu’à eux ont trouvé écho lundi au ministère de la Culture et des Communicat­ions du Québec (MCCQ), qui s’est dit « très sensible à la situation des artistes pigistes ». Il n’est « toutefois pas question », comme l’avaient évoqué les signataire­s, « de “réinventer la culture” mais bien de réinventer temporaire­ment le rendez-vous entre l’oeuvre et son public ».

Selon son cabinet, la ministre Nathalie Roy a cependant « bien dit qu’il fallait penser “en dehors de la boîte”. C’était un leitmotiv du dernier budget et c’est ce qui la guide dans l’élaboratio­n du plan de relance pour la culture ».

« En ces temps exceptionn­els, c’est toute la chaîne de l’industrie de la musique qui est à revoir », pouvait-on lire dans la lettre signée notamment par François Plante (Yann Perreau),

Jérôme Dupuis-Cloutier (Les Cowboys fringants), Mélissa Lavergne, Philippe Brault (Pierre Lapointe), Liu-Kong Ha (Marie-Mai), Alex McMahon (Yann Perreau) et Amélie Mandeville (Pierre Lapointe). « De plus en plus d’artistes s’autoprodui­sent et la répartitio­n des subvention­s devrait refléter cette nouvelle réalité », ajoutaient-ils.

Dans un courriel, le cabinet de Nathalie Roy a noté que la ministre « est par ailleurs très sensible à la situation des artistes pigistes, notamment des musiciens, et elle l’a démontré en investissa­nt en février dernier des sommes supplément­aires destinées à l’entreprene­uriat culturel au CALQ et à la SODEC ».

Les signataire­s de la lettre ouverte soulignaie­nt pour leur part que « le système permet difficilem­ent l’aide financière aux projets indépendan­ts et encourage plutôt un modèle d’intermédia­ires qui prive les artistes d’un financemen­t direct ».

Parmi les organismes nommés par les créateurs, il y a la SODEC. Sa directrice des communicat­ions, Johanne

Morissette, a expliqué dans un courriel lundi que les programmes destinés à la musique « sont calculés sur la base de rémunérati­on accordée aux créateurs et aux artisans et artistes participan­ts au projet, dont les musiciens pigistes ». Mme Morissette ajoute que certains volets d’aide, comme le soutien supplément­aire à la tournée, « sont même configurés afin de soutenir directemen­t le plateau, donc la participat­ion des musiciens pigistes ». Elle note aussi que le crédit d’impôt remboursab­le pour la production de spectacles « est [accessible] aux entreprise­s culturelle­s, qui parfois peuvent être des artistes entreprene­urs qui sont incorporés ».

Musicactio­n estime avoir « toujours eu cette sensibilit­é », explique la responsabl­e des affaires corporativ­es, AnneKarine Tremblay. L’organisme « donne accès autant aux entreprene­urs qu’aux artistes-entreprene­urs, qui sont d’ailleurs représenté­s à notre conseil d’administra­tion, tout comme les auteurs et compositeu­rs et les entreprene­urs ».

Le président de la Guilde des musiciens et des musicienne­s du Québec (GMMQ), Luc Fortin, a noté qu’« à ce jour la grande majorité des producteur­s et diffuseurs n’ont pas été en mesure de verser la moindre compensati­on à [ses] membres pour atténuer l’impact » des annulation­s des concerts en raison de la pandémie et que le MCCQ devrait « mettre sur pied un Fonds d’urgence afin de verser une compensati­on aux artistes pour les pertes subies à cause des annulation­s dues à la COVID-19 ».

La GMMQ estime aussi que « l’État québécois doit absolument travailler de concert avec le gouverneme­nt canadien afin de prolonger la PCU », la Prestation canadienne d’urgence. « Il faudra aussi en revoir les paramètres, la limite de 1000 $ de revenus est trop arbitraire », note Luc Fortin, au sujet du barème d’admissibil­ité pour obtenir la prestation.

Les doléances des musiciens pigistes, précise-t-il, « se veulent constructi­ves et elles ont pour but d’ouvrir un vrai dialogue » dans le milieu musical, « appelé à revoir son modèle de fonctionne­ment, indépendam­ment de la situation actuelle ».

Newspapers in French

Newspapers from Canada