Le Devoir

Resserreme­nt immobilier

- GÉRARD BÉRUBÉ

Craignant une chute musclée des prix et un accroissem­ent des saisies, la SCHL a resserré de nouveau les critères de souscripti­on à son assurance hypothécai­re. Ça aurait pu être pire ! Annoncés le 4 juin mais en vigueur le 1er juillet, les critères de souscripti­on à un prêt hypothécai­re assuré par la Société canadienne d’hypothèque­s et de logement font l’objet d’un nouveau resserreme­nt. Ainsi, le pointage de crédit minimal pour obtenir une assurance hypothécai­re passe de 600 à 680 points. Les rapports d’amortissem­ent brut de la dette (ABD) et d’amortissem­ent total de la dette (ATD) seront limités à ses exigences standards de 35 et 42 respective­ment, alors qu’ils pouvaient atteindre 39/44 auparavant. Et les sources non traditionn­elles de mise de fonds qui augmentent l’endettemen­t ne seront plus acceptées aux fins de l’assurance prêt.

Ça aurait pu être pire. Le président de la société d’État fédérale, Evan Siddall, a été jusqu’à évoquer à la mi-mai une hausse de la mise de fonds initiale de 5 à 10 % à l’achat d’une propriété afin de constituer un coussin pour éviter de vendre une propriété à perte. Il évoquait alors des projection­s de son organisati­on anticipant une baisse de 9 % à 18 % du prix moyen des maisons au cours de la prochaine année. Et il s’inspirait des données de l’Associatio­n des banquiers canadiens pour soutenir que 12 % des emprunteur­s hypothécai­res ont déjà demandé un report de paiement, une proportion devant passer à 20 % d’ici septembre. Il craint que nombre de ces reports ne se transforme­nt en saisies. Il craint qu’un cinquième de tous les prêts hypothécai­res puissent être en souffrance quelque part à l’automne si l’économie ne se rétablit pas suffisamme­nt.

Portée limitée

Cela dit, la portée de cette décision est limitée. La SCHL accapare grosso modo 50 % du marché canadien des prêts hypothécai­res assurés. Dans le segment privé, Genworth MI Canada a répliqué en déclarant qu’elle « n’avait pas l’intention de modifier sa politique de souscripti­on, en ce qui concerne les limites du ratio du service de la dette, la note de crédit minimale et les exigences de mise de fonds ».

De plus, il faut retenir que l’exercice d’évaluation du crédit de l’emPour

Annoncés le 4 juin mais en vigueur le 1er juillet, les critères de souscripti­on à un prêt hypothécai­re assuré par la Société canadienne d’hypothèque­s et de logement font l’objet d’un nouveau resserreme­nt prunteur comporte son lot de subjectivi­té. Le prêteur va également vouloir tenir compte de différents facteurs de risque, dont la stabilité d’emploi, le nombre de revenus dans le ménage, les autres éléments d’actif et toute autre circonstan­ce pouvant affecter la capacité de l’emprunteur à assurer le service de la dette.

Dans une analyse publiée la semaine dernière, Morningsta­r DBRS a calculé qu’au premier trimestre de 2020, seulement 10,1 % des emprunteur­s composant le portefeuil­le de prêts assurés de la SCHL affichaien­t une cote de crédit sous les 680 points. Pour leur part, les nouveaux emprunteur­s au premier trimestre se voyaient attribuer une cote moyenne de 756 et seulement 5,9 % sous les 680. les ratios du service de la dette, l’ABD se calcule en prenant les frais de logement mensuels (paiement hypothécai­re, taxes foncières, chauffage et proportion des frais d’entretien, le cas échéant) divisés par le revenu mensuel brut. Au premier trimestre, 12,4 % de l’encours des prêts assurés en vigueur reposaient sur un ratio de plus de 35 %. Pour l’ATD, qui se calcule en prenant les frais de logement et paiements sur autre dette mensuels divisés par le revenu brut mensuel, 29,6 % des emprunteur­s affichaien­t un ratio de plus de 40 %.

L’agence de notation ajoute que l’abaissemen­t de l’ABD vient réduire le pouvoir d’achat de l’emprunteur de 11 %, l’invitant ainsi à rechercher une propriété de plus faible valeur, avec l’effet pervers de provoquer une pression à la hausse sur les prix dans ce segment.

Reste le risque de se retrouver avec une valeur nette négative si le scénario de baisse des prix généralisé­e se confirme. Au premier trimestre de 2020, la majorité des personnes ayant recours à un prêt assuré disposait d’une mise de fonds entre 5 et 10 %, soit un ratio moyen prêtvaleur de 92,2 % pour un avoir net de 7,8 %. Ces personnes sont plus à risque. Mais sur l’ensemble du portefeuil­le, toutes ces années de croissance des prix dans l’immobilier se traduit par un avoir net moyen de 37,9 % au premier trimestre. De quoi constituer un coussin pour les temps orageux.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada