Le Devoir

Chine et Taïwan : déterrer les crimes de Tchang Kaï-shek

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Accaparés que nous sommes par les aléas du déconfinem­ent de la COVID-19 et de la prise de conscience collective d’un autre virus, le racisme (D. Laferrière), un petit fait, rapporté dans Le Monde du 4 juin dernier, nous a échappé. Il s’agit de reconnaîtr­e les injustices commises sous Tchang Kaï-shek et son fils, dictateurs de Taïwan de 1949 à 1987. Ces derniers avaient fait régner ce qui est appelé à Taïwan la « terreur blanche » durant laquelle plusieurs milliers de Taïwanais furent victimes de l’arbitraire du pouvoir politique.

L’actuelle présidente de Taïwan, Mme Tsai Ing-wen, réélue en janvier dernier pour un second mandat, est déterminée à poursuivre ce qu’elle a entrepris durant son premier mandat, soit d’exposer au grand jour les abus des dictateurs Tchang Kaï-shek et son fils, de les dénoncer et de les corriger en autant que faire se peut. Mais là n’est pas le seul enjeu.

En effet, cette opération de remise en cause du passé à Taïwan survient au moment où se cristallis­ent les opposition­s politiques entre les démocratie­s que sont Taïwan et Hong Kong d’une part et, d’autre part, l’autoritari­sme de la République totalitair­e de Chine. Mettre en avant la démocratie taïwanaise et sa capacité politique de déterrer les crimes des dictateurs Tchang alors que Pékin demeure englué dans une rigueur stalinienn­e et un silence absolu par rapport aux événements de Tian’anmen (4 juin 1989) marque bien la différence entre les deux régimes politiques.

Et qui plus est, l’agence taïwanaise responsabl­e des affaires chinoises a incité Pékin à « réexaminer l’incident du 4 juin » et « à présenter des excuses sincères au peuple chinois ». Il s’agit ici d’un habile pied de nez politique de la démocratiq­ue Taïwan envers le régime totalitair­e de Pékin. En Asie, toutes et tous en ont compris les enjeux. Michel Tessier, sinologue retraité Le 10 juin 2020

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