Passer aux aveux
Le SPVM reconnaît finalement l’existence de la discrimination systémique
Après la Ville de Montréal, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a finalement reconnu qu’il existait un caractère systémique au racisme et à la discrimination, comme le lui demandait la mairesse Valérie Plante à la suite de la publication d’un rapport très critique de l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM).
C’est par voie de communiqué que le SPVM a commenté le rapport de l’OCPM lundi soir. « En réponse à la première recommandation du rapport, le SPVM reconnaît le caractère systémique du racisme et de la discrimination et nous nous engageons à agir pour les combattre », écrit le SPVM dans un bref message, dans lequel le nom du directeur, Sylvain Caron, n’apparaît pas. « Nous prenons acte de la totalité des recommandations et particulièrement celles qui impliquent une réponse du SPVM. »
Le SPVM remercie aussi l’OCPM d’avoir tenu compte de ses engagements « réels et concrets » en matière d’interpellation policière.
Plus tôt dans la journée, la mairesse Plante avait émis le souhait que le directeur du SPVM de même que son service entament une réflexion concernant le racisme et la discrimination systémiques et qu’ils reconnaissent leur existence à Montréal, comme l’a fait le conseil municipal lundi. « Je pense que ce serait la bonne chose à faire. On doit faire preuve de sensibilité à l’égard des personnes qui ne sentent pas en sécurité à Montréal à cause de la couleur de leur peau, de leurs traits ou de la langue qu’elles parlent », a-t-elle expliqué.
Questionné récemment sur la question du profilage racial, Sylvain Caron n’avait pas voulu confirmer formellement son existence au SPVM.
Rappelons que le rapport de l’OCPM, qui comporte 38 recommandations, conclut qu’au fil des ans, la Ville de Montréal n’a pas réussi à contrer le racisme ni la discrimination systémiques. Le directeur Sylvain Caron y est aussi interpellé. « La commission estime que le profilage racial et social sévit au sein du SPVM et qu’il constitue de la violence dirigée vers certains groupes racisés et vers les personnes autochtones », note l’OCPM, en suggérant que l’embauche du prochain chef de police soit conditionnelle à sa capacité de reconnaître l’existence de ce problème et de faire les changements organisationnels qui s’imposent. L’OCPM déplore d’ailleurs que le chef de police actuel n’ait pas reconnu ce problème, alors que son prédécesseur l’avait fait.
Un commissaire
La mairesse a dit accueillir avec « beaucoup d’ouverture » le rapport de l’OCPM. Le conseil municipal a d’ailleurs adopté à l’unanimité lundi une déclaration officielle afin de reconnaître le caractère systémique du racisme et de la discrimination à Montréal et de faire des gestes pour les combattre, comme le recommandait l’OCPM.
Valérie Plante a aussi annoncé la création, d’ici l’automne, d’un poste de commissaire à la lutte contre le racisme et la discrimination, qui relèvera du directeur général, Serge Lamontagne, comme le suggérait le rapport.
La diversité dans la fonction publique
La Ville entend aussi s’attaquer à la sous-représentation de la diversité montréalaise au sein de son effectif. À l’heure actuelle, les personnes issues des minorités culturelles et ethniques représentent 21,7 % de l’effectif de la Ville — une progression par rapport à il y a dix ans, alors que le taux était de 12,8 % —, « mais il y a encore du chemin à faire, notamment dans les postes de cadres », a admis la mairesse.
Outre le programme d’accès à l’égalité en emploi, qui vise à accroître la présence des femmes, des Autochtones, des minorités visibles et ethniques et des personnes ayant un handicap, la Ville proposera une révision du plan directeur pour l’équité, la diversité et l’inclusion pour 2020-2023 avec des cibles d’embauche « différenciées et contraignantes ».
L’opposition à l’Hôtel de Ville déplore que l’administration n’ait annoncé que deux mesures à mettre en place, alors que la mairesse a le rapport de l’OCPM en main depuis dix jours. « La pire des choses, c’est qu’on perpétue la problématique des voeux pieux et des belles paroles sans gestes concrets », a commenté le chef d’Ensemble Montréal, Lionel Perez.
De son côté, la Ligue des droits et libertés estime que l’administration devra faire preuve d’une « volonté politique sans faille » pour mener à bien ce dossier. La Ligue s’inquiète elle aussi de la résistance du SPVM à reconnaître l’existence de pratiques de profilage racial dans ses rangs.