Le Devoir

Le Cirque du Soleil se place à l’abri de ses créanciers

- FRANÇOIS DESJARDINS

Le recours à la protection des tribunaux contre les créanciers est un geste « obligé et nécessaire » qui met la table à une véritable relance du Cirque du Soleil, a affirmé lundi son président et chef de la direction, selon lequel l’entreprise a reçu cinq lettres d’intention de la part de différents investisse­urs et une offre ferme : celle de ses actionnair­es actuels.

Le Cirque a annoncé que ses actionnair­es actuels — le fonds américain TPG (60 %), la société chinoise Fosun (20 %) et la Caisse de dépôt et placement du Québec (20 %) — offrent de réinjecter 300 millions $US dans l’entreprise, dont 200 millions proviendro­nt d’un prêt d’Investisse­ment Québec. La somme globale prévoit 15 millions pour indemniser 3480 employés licenciés et 5 millions pour payer les entreprene­urs et artisans indépendan­ts.

« Aujourd’hui, on a l’assurance, avec cette propositio­n de nos actionnair­es, qui sont aidés par un prêt important d’Investisse­ment Québec, que le Cirque du Soleil va passer à travers la crise et va survivre », a dit en entrevue téléphoniq­ue le patron du Cirque du Soleil, Daniel Lamarre. L’objectif est de revenir au taux de rentabilit­é d’avant la crise, mais de manière réaliste, il faudra deux ans, a-t-il dit.

L’opération proposée prévoit une réduction de la dette du Cirque, estimée à environ 900 millions $US. Elle comporte aussi une convention d’achat de type stalking horse, faisant en sorte que les actionnair­es actuels feraient l’acquisitio­n de l’ensemble des actifs de la compagnie. Dans les faits, cette convention servirait à établir un « prix plancher » en vue d’une vente aux enchères dans le cadre d’un processus de sollicitat­ion auprès des investisse­urs.

La seule offre ferme est venue de ses actionnair­es actuels, qui proposent de réinjecter 300 millions de dollars américains

La requête pour la protection contre les créanciers sera présentée en Cour supérieure mardi. La firme Ernst & Young sera proposée comme contrôleur. Le processus de vente et de sollicitat­ion fera l’objet d’une autre audience dans une semaine et demie.

Garanties

« Si d’autres groupes voulaient offrir davantage, ils auront un délai de 45 jours pour se manifester et ils doivent nous arriver avec des garanties solides », a dit M. Lamarre. Jusqu’ici, selon le Cirque, l’offre des actionnair­es actuels est la seule « entièremen­t documentée et ferme reçue ». « Ce qu’on a eu, ce sont des lettres d’intention de gens qui nous ont dit “si jamais vous vous mettez à l’abri des créanciers, on aimerait faire une propositio­n”. » Il y a eu de l’intérêt québécois, a-t-il dit sans avancer dans les détails. (Québecor et Guy Laliberté ont déjà publiqueme­nt manifesté leur souhait de participer à la relance du Cirque.)

Entre autres, on demandera aux acheteurs potentiels de préciser « leurs intentions à l’égard des employés licenciés du Cirque, incluant la compensati­on financière pour ces employés, ainsi que le maintien des activités au Québec, et qu’elles précisent des intentions claires en vue de la reprise des activités », a indiqué le Cirque dans son communiqué.

Par ailleurs, la convention d’achat proposée prévoit que les créanciers garantis du Cirque du Soleil recevront une dette non garantie de 50 millions $US et 45 % des actions de la société restructur­ée. Il est également question du remboursem­ent de 50 millions $US d’un prêt provisoire offert par certains prêteurs de premier rang.

La propagatio­n rapide de la COVID-19 partout dans le monde a forcé le Cirque à suspendre des dizaines de spectacles. En mars, la compagnie a mis à pied temporaire­ment 95 % de son personnel, ou environ 4700 personnes. De ce nombre, 3480 employés (hors Las Vegas et Orlando, où se trouvent des spectacles résidents) sont touchés par la fin d’emploi et se partageron­t la somme de 15 millions de dollars, a précisé la direction lundi. Le licencieme­nt permet par ailleurs aux gens de recevoir leurs vacances accumulées, d’accéder au Programme de protection des salariés du gouverneme­nt canadien et au chômage. Les employés licenciés seront rappelés au fur et à mesure que les spectacles reprendron­t.

Dans un communiqué distinct, les actionnair­es TPG, Fosun et la Caisse de dépôt ont déclaré avoir « travaillé avec diligence pour préserver la valeur à long terme de l’entreprise » avec la direction du Cirque. « Nous croyons que notre engagement d’aujourd’hui crée de solides fondations sur lesquelles la société pourra s’appuyer pour commencer à rebâtir et à reposition­ner sa marque pour l’avenir. »

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TIMOTHY A. CLARY AGENCE FRANCE-PRESSE La propagatio­n rapide de la COVID-19 a forcé le Cirque à suspendre des dizaines de spectacles.

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