Le Devoir

Nouveau revers pour les pro-vie aux États-Unis

La Cour suprême invalide une loi antiavorte­ment jugée trop restrictiv­e

- CHARLOTTE PLANTIVE À WASHINGTON AGENCE FRANCE-PRESSE

La Cour suprême des États-Unis a infligé lundi un nouveau revers aux conservate­urs en invalidant une loi de Louisiane très restrictiv­e sur l’avortement, qui avait valeur de test pour la haute Cour profondéme­nt remaniée par Donald Trump.

Après avoir accordé des protection­s aux minorités sexuelles puis à de jeunes migrants sans papiers, la plus haute juridictio­n du pays a estimé que cette loi violait le droit des femmes de Louisiane à avorter.

« On pousse un soupir de soulagemen­t », a immédiatem­ent commenté Alexis McGill Johnson, la présidente de la puissante associatio­n de planificat­ion familiale Planned Parenthood. « La Cour a envoyé un message clair à la classe politique : arrêtez d’essayer d’empêcher l’accès à l’avortement légal et sécurisé », a-t-elle ajouté.

La Maison-Blanche a au contraire déploré une « décision malheureus­e » qui « dévalue la vie des mères et des enfants à naître ». Des « juges non élus » ont « imposé leurs préférence­s politiques en faveur de l’avortement pour renverser des régulation­s légitimes », a dit sa porte-parole, Kayleigh McEnany, dans un communiqué.

Le président Trump mise sur les électeurs de la droite religieuse pour décrocher un second mandat lors des élections du 3 novembre et les courtise en affichant régulièrem­ent son opposition à l’avortement.

En 2016, il leur avait promis de nommer à la Cour suprême des juges opposés à l’avortement. Depuis son élection, il y a fait entrer deux nouveaux magistrats, Neil Gorsuch et Brett Kavanaugh, qui, lundi, ont défendu la loi de Louisiane, sans que cela suffise à emporter la majorité.

Ce texte, adopté en 2014, visait à obliger les médecins pratiquant des avortement­s à obtenir une autorisati­on d’exercer dans un hôpital situé à moins de 50 kilomètres du lieu de l’interventi­on. Il s’agissait de protéger les femmes en cas de complicati­on et d’assurer « la continuité des soins », avaient plaidé ses promoteurs.

Mais pour les défenseurs du droit aux interrupti­ons volontaire­s de grossesse (IVG), la loi visait surtout à mettre des bâtons dans les roues des cliniques et sa mise en oeuvre aurait entraîné la fermeture de deux des trois établissem­ents pratiquant des avortement­s en Louisiane.

Jurisprude­nce

Au-delà de l’enjeu local, le dossier était perçu comme un baromètre de la déterminat­ion de la Cour suprême à

maintenir son arrêt historique de 1973, Roe c. Wade, qui a reconnu le droit des Américaine­s à avorter. La loi de Louisiane était en effet quasi identique à un texte du Texas que le temple du droit avait invalidé en 2016, le jugeant trop restrictif.

« Nous avons examiné les dossiers de près » et ils « sont comparable­s à tous les égards et imposent le même résultat. En conséquenc­e, nous jugeons que la loi de Louisiane est inconstitu­tionnelle », a tranché la haute Cour à une courte majorité (cinq juges sur neuf).

Le chef de la Cour suprême, John Roberts, un conservate­ur modéré, a joint sa voix à ses quatre collègues progressis­tes au nom du respect de « la chose jugée ».

Il avait pourtant soutenu la loi du Texas en 2016. « Je continue à penser que c’était une mauvaise décision », a-t-il écrit dans un texte joint à la décision. La question n’est toutefois pas de savoir si la haute Cour a eu « tort ou raison » en 2016, mais « de savoir si son arrêt nous lie dans le cas présent », a-t-il poursuivi, en jugeant que « la doctrine juridique » l’imposait.

« Nous sommes soulagées que la loi de Louisiane ait été bloquée », a commenté la présidente du Centre pour les droits reproducti­fs, Nancy Northup, qui représenta­it les cliniques de l’État. Mais, pour elle, la lutte n’est pas terminée puisque de nombreux États, galvanisés par l’arrivée de nouveaux juges à la Cour, continuent d’adopter des lois restrictiv­es.

Cet « arrêt ne va malheureus­ement pas arrêter ceux qui veulent à tout prix interdire l’avortement. Nous serons à nouveau demain devant la justice et nous continuero­ns à nous battre », a-t-elle déploré.

De fait, le groupe conservate­ur Alliance Defending Freedom a souligné que la décision était « étroite ». « Notre travail pour faire primer la santé des femmes sur les intérêts économique­s du business de l’avortement continuera au niveau fédéral, des États et des localités », a promis le chef de ses équipes de juristes, Kristen Waggoner.

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PATRICK SEMANSKY ASSOCIATED PRESS La fondatrice de l’organisme activiste Pro-Life San Francisco, Terrisa Bukovinac, posait avec un faux foetus à la main devant la Cour suprême américain lundi lors d’une manifestat­ion organisée en opposition au jugement.

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