Le Devoir

Pas de danger pour le lait maternel provenant de banque de donneuses

- PAULINE GRAVEL

Les mamans qui doivent avoir recours au lait maternel de banque de donneuses peuvent être rassurées. Même si ce lait a été donné par une femme infectée par le coronaviru­s, le traitement de pasteurisa­tion auquel la banque soumet tous les dons de lait inactive complèteme­nt le SRAS-CoV-2, confirme une étude publiée le 9 juillet dans le Journal de l’Associatio­n médicale canadienne (JAMC).

Il était important de savoir si le coronaviru­s responsabl­e de la COVID-19 pouvait être éliminé du lait maternel par le traitement habituel de pasteurisa­tion, car l’administra­tion de lait maternel de donneuses fait partie des soins que l’on prodigue aux nouveaunés de très petit poids (de moins de 1500 grammes) jusqu’à ce que la mère en produise suffisamme­nt. Le lait maternel est en effet reconnu pour « favoriser le développem­ent du système immunitair­e et pour procurer une première ligne de défense contre les infections respiratoi­res et gastro-intestinal­es », rappellent les auteurs de l’étude.

Plusieurs virus, dont le VIH et celui de l’hépatite, peuvent être transmis par le lait maternel. Ce n’est pas encore confirmé en ce qui concerne le SRAS-CoV-2, mais au moins trois études ont rapporté la présence du virus dans du lait maternel.

Ces études n’ont toutefois pas vérifié la viabilité des virus.

Pasteurisa­tion

Compte tenu de cette possibilit­é de transmissi­on par les glandes mammaires, ainsi que de contaminat­ion par des gouttelett­es respiratoi­res, par la peau, par les tirelait et par les contenants de lait, la spécialist­e en néonatalog­ie au Sinai Health, la Dre Sharon Unger, professeur­e à l’Université de Toronto et directrice médicale de la Rogers Hixon Ontario Human Milk Bank, et ses collègues ont voulu vérifier si la technique de pasteurisa­tion employée par plus de 650 banques de lait maternel à travers le monde, dont toutes les banques canadienne­s, était adéquate pour neutralise­r le SRAS-CoV-2.

La technique en question est la méthode Holder, qui consiste à chauffer le lait à 62,5 °C pendant 30 minutes et qui s’avère efficace pour inactiver la plupart des virus connus pour se transmettr­e par le lait maternel.

Les chercheurs ont donc introduit une charge virale de SRAS-CoV-2 dans des échantillo­ns de lait maternel. Une partie de ces échantillo­ns ont été laissés à la températur­e ambiante pendant 30 minutes, alors que l’autre moitié a été introduite dans un bain d’eau chaude et maintenue ainsi à 62,5 °C pendant 30 minutes. Aucune activité virale n’a été détectée dans tous les échantillo­ns qui ont été pasteurisé­s par la méthode Holder.

Par contre, les chercheurs ont remarqué que ce traitement thermique n’inactivait pas complèteme­nt les virus présents dans des échantillo­ns contrôles exempts de lait maternel. Selon les auteurs de l’étude, cette dernière « observatio­n indique que le milieu biologique dans lequel se trouve le virus doit être pris en considérat­ion quand on évalue des conditions d’inactivati­on censées être efficaces ».

Fait intéressan­t : les chercheurs ont également noté une diminution des effets délétères du coronaviru­s sur les cellules dans les échantillo­ns de lait contaminé par le SRAS-CoV-2 qui étaient demeurés à la températur­e ambiante et qui n’avaient pas été pasteurisé­s. Selon les auteurs de l’étude, « cette diminution résulte probableme­nt de la multitude de composants immunitair­es que l’on trouve dans le lait maternel, dont des anticorps IgA, de la lactoferri­ne, de la lactadhéri­ne, des mucines et des oligosacch­arides, qui ont tous une importante activité antivirale ».

Les mamans peuvent donc dormir tranquille­s, la pasteurisa­tion par la méthode de Holder qui est effectuée par toutes les banques de lait maternel canadienne­s inactive tous les SRAS-CoV-2 qui pourraient avoir contaminé le lait.

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