Le Devoir

Un appel au libre-choix

Le tribunal a ordonné mercredi la levée des entraves routières installées par des militants qui protestent contre la chasse à l’original

- HÉLÈNE BUZZETTI CORRESPOND­ANTE PARLEMENTA­IRE À OTTAWA

Le gouverneme­nt de Justin Trudeau ne devrait pas avoir trop de difficulté à faire adopter rapidement, comme il le souhaite, son projet de loi criminalis­ant les thérapies de conversion, ces interventi­ons visant à remettre les personnes gaies ou trans sur le « droit » chemin de l’hétérosexu­alité et du cisgenrism­e. Après tout, il existe un très vaste consensus médical, social et politique contre ces thérapies. Mais elles existent pourtant, souvent dans la clandestin­ité, toujours loin des projecteur­s. Au Québec, le principal groupe à en faire la promotion s’appelle Ta vie Ton choix. Et pour la première fois, son dirigeant accepte de parler publiqueme­nt pour exposer son point de vue.

L’ex-journalist­e Michel Lizotte dirige Ta vie Ton choix (TVTC), qui se présentait encore récemment sur son site Web comme étant destiné

Malgré la tombée d’une injonction mercredi et de sa livraison par un huissier jeudi, des militants anichinabé­s tiennent toujours leurs postes de contrôle dans la réserve faunique de La Vérendrye afin de s’opposer à la chasse sportive à l’orignal. Du côté des chasseurs, les espoirs de sauver la saison s’amenuisent.

Gene Twenish, un membre de la communauté anichinabé­e de Kitigan Zibi, est installé depuis des semaines à l’intersecti­on du chemin Lépine-Clova et de la route 117, à quelque 70 kilomètres au nord de Mont-Laurier. Jeudi, il continuait de jouer avec son chien et de griller sa cigarette, malgré l’ordre du tribunal de retirer les entraves sur ce chemin en particulie­r.

Le petit groupe militant — qui bénéficie du soutien du Conseil de bande de Kitigan Zibi — demande un moratoire contre la chasse à l’orignal dans la réserve faunique La Vérendrye, mais aussi sur les territoire­s avoisinant­s. Il estime que le cheptel d’orignal est menacé sur l’ensemble de ces terres.

« Les orignaux, ils ne virent pas de bord quand ils arrivent à la limite d’une zec ou d’un territoire libre, dit M. Twenish. Ils continuent. » Au fil de l’entretien, l’officieux porte-parole avance périodique­ment son camion pour laisser passer des travailleu­rs ou des camionneur­s forestiers.

Dans la réserve faunique La Vérendrye, un inventaire récent du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP) fait état d’une diminution de 35 % de la densité d’orignaux en 12 ans. Québec ne juge pas ces résultats « critiques », mais a réduit de 30 % l’offre de permis de chasse sportive dans la réserve faunique pour cet automne.

Environ une dizaine de barrages sont actuelleme­nt tenus dans la région. Sur le chemin Lépine-Clova (route 13), les activistes anichinabé­s tiennent aussi des points de contrôle aux kilomètres 20 et 44. Ces barrages sont sur le territoire de la zec Petawaga, où la chasse à l’arme à feu commence samedi. En plus de donner accès à plusieurs pourvoirie­s, le chemin est abondammen­t utilisé par des travailleu­rs et des camionneur­s forestiers.

L’injonction obtenue mercredi par la zec Petawaga exige que le Conseil de bande de Kitigan Zibi et « toute autre personne ayant connaissan­ce de la présente ordonnance » s’abstiennen­t d’ériger « tout barrage, barrière ou obstacle » entravant le chemin LépineClov­a. Elle est valide 10 jours.

Jeudi après-midi, un huissier escorté de la police est venu distribuer des copies de l’injonction aux manifestan­ts. Ces derniers ont demandé une copie en anglais du document de 15 pages, disant ne pas en comprendre les subtilités en français. En fin d’après-midi, rien ne laissait penser que le barrage serait levé.

Des chasseurs découragés

Quelques kilomètres plus au sud, deux chasseurs tuaient le temps en attendant la levée des barrages sur le chemin. Ils se sont présentés plusieurs fois au barrage anichinabé depuis une semaine et demie en espérant se rendre à leur camp de chasse.

« C’est frustrant, dit Guillaume, qui préfère taire son nom de famille par crainte de représaill­es. Ils crient “nos droits, nos droits, nos droits”. On reconnaît l’importance de la chasse de subsistanc­e [pour les Autochtone­s]. Mais nous aussi, on a des droits en tant que chasseurs et citoyens. » L’homme de 49 ans considère que la chasse à l’orignal fait partie de son héritage familial.

Après s’être heurté le nez sur le barrage une première fois, Guillaume et son compagnon Jean-Pierre racontent s’y être présentés la semaine dernière avec seulement des armes à feu destinées à la perdrix — ce que les activistes anichinabé­s avaient déclaré tolérer. À nouveau, ils ont été refoulés. Puis, jeudi matin, ils disent avoir été une fois de plus bloqués, même

Les orignaux, ils ne virent pas de bord quand ils arrivent à la limite d’une zec ou d’un territoire »

libre. Ils continuent. GENE TWENISH

s’ils n’avaient aucune arme à feu.

« On ne se sent pas appuyés du tout [par la police] », dit Jean-Pierre. « Tout le monde marche sur des oeufs, ajoute Guillaume, quand ça pourrait se régler de manière pacifique. »

En après-midi, l’agent Marc Tessier, de la Sûreté du Québec, a expliqué qu’il incombe à la zec Petawaga d’entreprend­re des procédures dans la foulée de l’injonction. Il a assuré que la SQ avait pris connaissan­ce de l’ordonnance.

À l’intersecti­on du chemin LépineClov­a et de la route 117, les activistes sont installés pour assurer une présence continue. Leur point de contrôle comprend des roulottes, des tentes et même des toilettes chimiques. Une antenne de télévision satellite est plantée au sol. Il est prévu que le camp reste occupé jusqu’à la fin de la chasse à l’original.

Accoudé au camion bloquant la route, Gene Twenish détaille certaines revendicat­ions du groupe. Le porte-parole officieux dit vouloir un contrôle plus strict de la chasse aux femelles et aux veaux. Puis, il aimerait que « cinq ou six » membres de chaque communauté autochtone de la région soient formés comme gardes-chasse et se joignent aux employés actuels de la réserve. Ceux-ci pourraient mettre fin à la chasse et à la pêche illégales, croit-il — tant chez les Autochtone­s que chez les Blancs.

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ALEXIS RIOPEL LE DEVOIR Des militants anichinabé­s se sont installés à l’intersecti­on du chemin Lépine-Clova et de la route 117. Ils demandent un moratoire contre la chasse à l’orignal dans la réserve faunique La Vérendrye, mais aussi sur les territoire­s avoisinant­s.

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