Le Devoir

Julie Snyder accuse Gilbert Rozon de vouloir « bâillonner les victimes »

- AMÉLI PINEDA

Visée par une poursuite de 450 000 $ pour avoir traité Gilbert Rozon d’agresseur sexuel, l’animatrice Julie Snyder maintient sa dénonciati­on et accuse l’exmagnat de l’humour de vouloir museler les victimes de violences sexuelles dans une entrevue accordée au Devoir.

« La loi du silence, c’est la loi qui protège le mieux les agresseurs. La briser est quelque chose de très difficile, mais j’ai l’intention d’aller jusqu’au bout », soutient Mme Snyder.

Jeudi, le fondateur de Juste pour rire a intenté une poursuite contre Julie Snyder et Pénélope McQuade qui sont toutes deux revenues sur ce qu’elles ont vécu dans le cadre de l’émission La semaine des 4 Julie.

Mme Snyder a affirmé que l’ancien magnat de l’humour l’a agressée sexuelleme­nt pendant qu’elle dormait, il y a plus de 20 ans, à Paris.

L’animatrice a expliqué avoir été inspirée par son invitée, Pénélope McQuade, et vouloir répliquer à une déclaratio­n faite en février 2018 par M. Rozon. L’homme de 65 ans avait alors déclaré à une journalist­e de TVA Nouvelles « Je n’ai jamais fait l’amour à quelqu’un si une personne a dit non ».

« Je voudrais juste dire à Gilbert Rozon que je n’ai pas pu lui dire non parce que c’est arrivé pendant que je dormais. Je dormais dans un endroit où il y avait des gens de Juste pour rire […] Je ne pouvais pas dire non, parce qu’on ne me l’a pas demandé », a lancé en direct l’animatrice.

M. Rozon soutient que les deux animatrice­s ont agi « par pure méchanceté » afin de nuire à sa réputation à quelques jours de son procès criminel pour viol et attentat à la pudeur prévu mardi prochain.

« M. Rozon démontre que ça existe encore des poursuites pour bâillonner les victimes et que c’est pour ça qu’on se la ferme pendant des années, parce qu’on a peur, parce qu’on est terrorisée­s à l’idée de se faire intimider et attaquer », fait valoir Mme Snyder.

L’animatrice déplore les tentatives de discrédite­r une victime parce qu’elle est restée en contact avec son agresseur présumé. C’est que dans sa requête, M. Rozon se dépeint comme ayant été le confident de Julie Snyder pendant de nombreuses années. Il souligne aussi avoir été son invité à plusieurs de ses talk-shows. Il raconte que Mme Snyder, « à de multiples reprises », a « insisté » pour prendre des selfies avec lui sur des plateaux de tournage.

« C’est une aberration de dire ça », tonne Mme Snyder. « J’aurais préféré recevoir des excuses plutôt qu’une poursuite », se désole l’animatrice.

Si elle n’avait pas la force il y a 20 ans de le faire, elle soutient ne pas avoir peur pour la suite. « Le système de justice est parfois lent, mais il réussit parfois à nous rendre une certaine liberté. Je pense que c’est important de continuer à sensibilis­er tout le monde parce que les juges sont pris pour appliquer des lois [qui ne sont pas toujours adaptées à la réalité des victimes], mais le législateu­r a le pouvoir d’intervenir et il l’a fait et des progrès ont été faits, mais la poursuite d’aujourd’hui montre qu’il y a encore du travail à faire », dit-elle.

L’animatrice Pénélope McQuade n’a pas donné suite à notre demande d’entrevue.

M. Rozon a indiqué qu’il ne fera aucune déclaratio­n ni commentair­e au sujet de ces procédures avant son procès qui débutera le 13 octobre prochain.

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