Comment mieux protéger la vie privée avec la recherche de contacts
La recherche de contacts est un outil majeur dans la lutte contre la COVID-19. Il s’agit de retrouver les personnes ayant été en contact avec une personne déclarée positive afin de les isoler, de les tester et d’ainsi réduire le risque de propagation du virus. Cette recherche se fait actuellement de façon manuelle par téléphone.
Mardi, le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, a exhorté les Québécois à répondre aux appels. Il déplore le fait que trop de personnes ne répondent pas aux appels des personnes responsables de retrouver tous les contacts des personnes reconnues positives au test de la COVID-19, rendant la démarche inefficace. Or, certaines interventions des autorités peuvent contribuer à cette situation.
Une chose que l’on a apprise des luttes précédentes contre les maladies infectieuses, c’est que la stigmatisation, la réprobation morale ou la peur d’être puni nuisent considérablement à la recherche de contacts.
Après que le gouvernement eut menacé les citoyens d’amendes substantielles en cas de non-respect des consignes de distanciation sociale, il n’est pas étonnant que des personnes hésitent à divulguer leurs comportements et les noms des personnes qu’elles ont rencontrées. Aussi, après avoir ciblé à maintes reprises les jeunes en les accusant de propager le virus avec leurs rassemblements et leur insouciance, le gouvernement ne doit pas s’attendre à ce qu’ils
En Corée du Sud, lorsque les autorités ont suspecté une éclosion importante de COVID-19 auprès de personnes homosexuelles dans les boîtes de nuit de Séoul, elles ont invité cette population à se faire tester anonymement. Autrement, la stigmatisation à laquelle sont confrontées ces personnes aurait été un obstacle majeur à la maîtrise de cette éclosion.
s’empressent de collaborer avec les autorités.
En Corée du Sud, lorsque les autorités ont suspecté une éclosion importante de COVID-19 auprès de personnes homosexuelles dans les boîtes de nuit de Séoul, elles ont invité cette population à se faire tester anonymement. Autrement, la stigmatisation à laquelle sont confrontées ces personnes aurait été un obstacle majeur à la maîtrise de cette éclosion. Cette stratégie a pu être mise en place parce que la population ciblée était identifiée et plutôt restreinte. Sinon, il faut rechercher les contacts par téléphone. Dans ce cas, l’anonymisation est plus difficile à garantir et la confiance des répondants est plus difficile à obtenir.
Si les autorités veulent une plus grande collaboration de la population, elles doivent clairement et largement rassurer la population sur le fait que la déclaration de ses contacts n’entraînera pas de contravention (ex. 1000 $ pour rassemblement interdit) ou d’accusation criminelle (ex. une travailleuse du sexe qui donnerait le nom de ses clients), ni pour la personne elle-même ni pour ses contacts. Le message doit aussi rassurer les répondants sur le plan de la protection de leur vie privée. En effet, les autorités doivent promettre clairement que le nom de la personne porteuse du virus ne sera pas divulgué aux personnes qui seront contactées, que leur identité ne sera pas non plus dévoilée à l’école ou encore aux parents d’un jeune ayant eu un comportement à risque.
Il pourrait aussi être envisagé de lier à ces déclarations la possibilité de bénéficier d’une application permettant aux personnes de suivre leurs symptômes et d’être soutenues si les symptômes s’aggravent. Cela permettrait de renforcer la confiance dans le système de santé.
*Respectivement : M.A. philosophie, M.A. bioéthique ; École de santé publique, Université de Montréal ; Hôpital de Montréal pour enfants, Faculté de médecine, Université McGill ; Faculté de pharmacie, Université de Montréal.