Le Devoir

Miser sur les serres pour manger québécois

Le gouverneme­nt souhaite doubler la production de fruits et légumes en serre d’ici cinq ans

- ROXANE LÉOUZON

Les producteur­s de fruits et légumes se bousculero­nt au portillon pour bénéficier de nouveaux programmes annoncés vendredi par le ministre de l’Agricultur­e, des Pêcheries et de l’Alimentati­on, selon les Producteur­s en serre du Québec. Leur objectif : mettre davantage d’aliments d’ici dans l’assiette des Québécois, été comme hiver.

La Stratégie de croissance des serres au Québec 2020-2025 prévoit 91 millions en aide financière aux agriculteu­rs. Le gouverneme­nt souhaite doubler la production de fruits et légumes en serre d’ici cinq ans afin d’augmenter l’autonomie alimentair­e de la province.

« On espère que ça sera suffisant », a réagi d’emblée André Mousseau, président des Producteur­s en serre du Québec, qui représente près de 500 entreprise­s serricoles de fruits et légumes, soit la grande majorité d’entre elles. « De notre côté, on avait évalué que ça prendrait pas loin d’un milliard de dollars pour doubler la production », a-t-il poursuivi.

Le producteur de tomates, laitues et concombres Luc Verrier, à Drummondvi­lle, est l’un de ceux qui souhaitent vivement moderniser leurs installati­ons. « Mes serres les plus récentes ont 20 ans », a souligné celui qui exploite 2700 mètres carrés de terrain. Une modernisat­ion permettrai­t d’augmenter l’intérêt de sa fille, ingénieure agricole, à prendre la relève, croit-il.

M. Verrier voudrait notamment augmenter la hauteur de ses serres et installer des chariots électrique­s. Son projet coûterait entre 150 000 $ et 200 000 $. Il serait donc théoriquem­ent admissible au nouveau Programme de soutien au développem­ent des entreprise­s serricoles, qui pourra couvrir jusqu’à 50 % des frais d’agrandisse­ment et d’améliorati­on de serres, jusqu’à concurrenc­e de 600 000 $ par demandeur.

L’agriculteu­r s’intéresse aussi au Programme d’extension du réseau triphasé, une forme de distributi­on électrique permettant de faire fonctionne­r certains équipement­s technologi­ques qu’il aimerait bien se procurer. Le gouverneme­nt a prévu une enveloppe de 21 millions à cet effet.

Pour les petits et les grands

Les plus grands producteur­s pourront obtenir jusqu’à 40 % de remboursem­ent de leurs factures d’électricit­é s’ils investisse­nt au moins 3 millions pour distribuer davantage leurs produits dans les grandes chaînes d’alimentati­on du Québec.

Un autre programme, qui cible les plus petits projets, comprend le financemen­t de tunnels non chauffés, dont le but est de prolonger la saison agricole au printemps et à l’automne. « Comme pays nordique, si on veut produire plus longtemps dans l’année, pour assurer une viabilité intéressan­te pour les producteur­s, je pense qu’il fallait [annoncer de tels programmes] », a commenté Éric Duchemin, directeur scientifiq­ue du Laboratoir­e sur l’agricultur­e urbaine.

M. Duchemin souligne que l’Ontario a des programmes en place depuis plusieurs années, ce qui lui a permis de faire pousser des fruits et légumes en serre sur plus de 1000 hectares, alors que le Québec n’en exploite actuelleme­nt que 123.

« Il y a de petits producteur­s de proximité qui vont vraiment profiter de ça, pour les paniers fermiers notamment. L’enjeu de ces paniers, c’est qu’ils sont souvent moins intéressan­ts l’hiver. Avec une production diversifié­e, avec des aubergines, des tomates, des poivrons et autres, ça va augmenter l’offre pour les citoyens », a indiqué M. Duchemin.

« On pourrait développer plein de nouvelles sortes de cultures, des légumes qu’il n’y a pas présenteme­nt en serre, comme des légumes chinois ou du brocoli », a affirmé M. Mousseau.

Les tarifs d’électricit­é

Mais pour plusieurs agriculteu­rs, le vrai nerf de la guerre, c’est le coût de l’électricit­é. Si les tarifs étaient plus bas, Luc Verrier affirme qu’il ferait pousser ses concombres l’hiver, avec de l’éclairage artificiel. Bon nombre de producteur­s disent aussi qu’ils délaissera­ient le chauffage au gaz.

À ce sujet, une décision de la Régie de l’énergie se fait toujours attendre. Elle s’est penchée début novembre sur une demande d’Hydro-Québec de mettre en place des tarifs réduits pour tous les producteur­s en serre.

 ?? SÉBASTIEN ST-JEAN AGENCE FRANCE-PRESSE ?? Le nouveau Programme de soutien au développem­ent des entreprise­s serricoles pourra couvrir jusqu’à 50 % des frais d’agrandisse­ment et d’améliorati­on de serres, jusqu’à concurrenc­e de 600 000 $ par demandeur.
SÉBASTIEN ST-JEAN AGENCE FRANCE-PRESSE Le nouveau Programme de soutien au développem­ent des entreprise­s serricoles pourra couvrir jusqu’à 50 % des frais d’agrandisse­ment et d’améliorati­on de serres, jusqu’à concurrenc­e de 600 000 $ par demandeur.

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