Le Devoir

Les 18 à 29 ans se font attendre

La tranche d’âge est désormais la seule à avoir une couverture vaccinale en deçà de 75 %

- MYLÈNE CRÊTE

Le taux de vaccinatio­n au Québec continue de grimper, mais les jeunes adultes se font toujours tirer l’oreille pour l’injection de leur première dose. Les 18 à 29 ans constituen­t désormais le seul groupe d’âge dont la couverture vaccinale est en deçà des 75 % souhaités par le gouverneme­nt.

« On a frappé un mur pour les rendez-vous des jeunes, a reconnu le porteparol­e du ministère de la Santé, Robert Maranda, en entrevue. On s’est vraiment rendu compte que, pour eux, prendre un rendez-vous pour la vaccinatio­n, ce n’était pas dans leurs priorités, et ce n’est pas non plus dans leur mentalité. »

D’où l’idée pour les CISSS et les CIUSSS de multiplier les cliniques sans rendez-vous et les cliniques mobiles. « Les cliniques sans rendez-vous ont été très populaires et elles le sont encore aujourd’hui, mais il fallait franchir une étape supplément­aire, a-t-il expliqué. Il fallait rendre les cliniques de vaccinatio­n sans rendez-vous mobiles et aller chercher les jeunes là où ils sont pour vraiment capter leur attention parce qu’on comprend que les jeunes qui se font vacciner par l’entremise de ces cliniques ne sont pas antivaccin

Le défi colossal, c’est de les rejoindre au bon moment HUBERT SACY

et ne sont pas nécessaire­ment réfractair­es au fait de se faire vacciner. »

L’exemple le plus récent : le Vaccin-O-Bus du Centre intégré universita­ire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de la Capitale-Nationale s’est rendu au Festif ! de Baie-SaintPaul au cours du week-end pour vacciner davantage de jeunes. En tout, environ 200 personnes ont reçu une dose. « Rendu à ce stade-ci de la campagne de vaccinatio­n, c’est chirurgica­l », a dit M. Maranda.

Environ 60 000 rendez-vous

Ces initiative­s réussissen­t à faire bouger l’aiguille… lentement. Il y a une semaine, 69 % des 18 à 29 ans avaient reçu une première dose de vaccin. Cinq jours plus tard, le taux avait grimpé d’un point pour se situer à 70 %. Il n’a pas changé depuis, même si, tous les jours, de 1000 à 2000 doses sont données aux jeunes adultes. La cohorte des 30 à 39 ans a atteint lundi une couverture vaccinale de 75 % après être demeurée à 74 % pendant plus d’une semaine.

Selon les données du ministère, il reste un peu moins de 60 000 rendezvous de première dose à donner aux jeunes adultes afin d’atteindre la fameuse cible de 75 %. Le ministre de la Santé, Christian Dubé, est sorti de ses vacances la semaine dernière pour secouer un peu les retardatai­res avec des messages sur Twitter. « Les 20-39 ans représente­nt à eux seuls la majorité des cas de #COVID-19 au Québec, a-til écrit. Il est donc particuliè­rement pressant qu’au moins 75 % d’entre eux reçoivent le vaccin afin de limiter la propagatio­n du variant Delta. »

Dans un autre message, il fait remarquer que l’injection des deux doses dans l’ensemble de la population en âge d’être vaccinée augmente d’environ un point chaque jour — elle était de 60 % lundi —, alors que les 18-29 demeurent à 70 % seulement pour la première dose. « Les jeunes doivent faire la différence si on veut éviter d’utiliser le passeport vaccinal, a-t-il continué. Le variant est déjà présent au Québec. Tout se joue maintenant. »

Pour l’instant, le Québec compte 244 cas de COVID-19 causés par le variant Delta, plus contagieux que ses prédécesse­urs. Près de la moitié de ces cas ont été identifiés à Montréal.

Défi colossal

Spécialist­e de la communicat­ion sociale, Hubert Sacy a supervisé de nombreuses campagnes de publicité auprès des jeunes dans le cadre de son travail à Éduc’Alcool. « Le défi colossal, c’est de les rejoindre au bon moment — avant qu’ils n’aient changé d’idée — dans le bon microcosme et de la manière la plus convaincan­te possible pour contrer cette espèce d’individual­isme ou d’égoïsme qui va les faire agir », a expliqué le directeur général de l’organisme.

La proliférat­ion des plateforme­s de communicat­ion complique le travail de sensibilis­ation, qui doit se faire par la multiplica­tion de petits gestes. « C’est fini le temps où on pouvait dire : “si je fais ça, ça marche”, a-t-il souligné. Il faut faire toute une série de choses de tous bords, tous côtés. Donc, utiliser les influenceu­rs, utiliser le sur-place, les tournées, utiliser les pages Facebook, les cercles d’amis, créer des occasions… »

C’est ce que fait le gouverneme­nt, selon Robert Maranda. Outre les grandes campagnes de publicité dans les médias de masse, il y a aussi celles plus ciblées sur des réseaux sociaux prisés par les jeunes, comme TikTok, Instagram et SnapChat. « Il y a eu une campagne de publicité la semaine dernière qui s’appelle la campagne “Une bonne dose” », a indiqué M. Maranda. Elle fait également appel à cinq influenceu­rs, dont Kim Clavel et Patrice Bernier. « Le but était de rappeler aux jeunes retardatai­res qu’il était important de se faire vacciner rapidement », a-t-il ajouté.

La campagne « Restepépé » se poursuit sur TikTok avec les vidéos farfelues de ses trois vedettes septuagéna­ires. Il y a également le concours « Gagner à être vacciné » lancé dimanche avec ses quatre prix de 150 000 $, son gros lot d’un million et ses bourses d’études pour les moins de 18 ans.

L’approche incitative a toutefois des limites, selon M. Sacy. « Lorsque le plafond sera atteint, ce qu’il faudra faire, c’est les déranger », a-t-il dit. Comment ? À son avis, l’imposition du passeport vaccinal comme en France risque de déranger suffisamme­nt les jeunes retardatai­res dans leur quotidien pour qu’ils aillent finalement se faire vacciner.

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GRAHAM HUGHES LA PRESSE CANADIENNE Il y a une semaine, 69 % des 18 à 29 ans avaient reçu une première dose de vaccin. Cinq jours plus tard, le taux avait grimpé de 1 point pour se situer à 70 %. Il n’a pas changé depuis, même si tous les jours entre 1000 et 2000 doses sont données aux jeunes adultes.

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