La Grande Muraille du tennis de table
Pourquoi la Chine domine-t-elle autant la discipline ?
La Chine a remporté vendredi soir la finale masculine de l’épreuve individuelle de tennis de table. Elle complétait ainsi le doublé, une Chinoise ayant aussi gagné la finale féminine individuelle la veille. Cela dit, ce n’aurait pas été si grave pour le pays si ces deux athlètes avaient plutôt été défaits : les deux autres finalistes étaient aussi chinois.
La finale des hommes se tenait à l’ombre du Stade olympique, sous la carapace argentée du très stylisé gymnase métropolitain de Tokyo, devant un groupe sélect de représentants nationaux et un solide contingent de journalistes et de photographes surtout venus d’Asie et d’Europe. Elle opposait la légende du tennis de table chinois et champion olympique en titre, Ma Long (32 ans, dragon rose sur un chandail noir et doré), à la vedette montante et actuel numéro un mondial, Fan Zhendong (24 ans, chandail bleu et doré traversé d’une vague jaune fluo).
Le tennis de table, « ping pang qiu » en chinois, est l’un des sports les plus pratiqués dans le pays de 1,4 milliard d’habitants, au moins depuis que le Grand Timonier de la révolution communiste chinoise, Mao Zedong, en a fait le sport national
Les deux joueurs avaient le même entraîneur, qui ne bronchait pas, les bras croisés, impassible. Attentifs, les spectateurs osaient à peine respirer, même entre les points, sauf quand le jeu était trop beau et qu’une exclamation d’admiration leur échappait. La légende a battu sèchement la vedette montante 11-4 à la première partie, plaçant des accélérations imparables et retournant la moindre attaque. Fan n’a pas tardé à retrouver son aplomb et a gagné la deuxième partie 12-10, alternant le petit jeu court en finesse et les explosions offensives. Pas ébranlé pour un sou, Ma a remporté les deux autres parties (11-8 et 11-9), avant de céder la victoire de nouveau à la cinquième partie (11-3). L’affaire s’est finalement réglée à la partie suivante (11-7) dans un grand cri triomphal du dragon.
Domination écrasante
Dans le cas du tennis de table, parler d’une domination de la Chine aux Jeux olympiques est presque un euphémisme.
Chez les hommes, le pays a désormais remporté six des sept dernières médailles d’or décernées en compétition individuelle et six des sept dernières médailles d’argent. La souveraineté chinoise sur le sport est encore plus écrasante du côté féminin depuis que le sport a fait son entrée dans la famille olympique, en 1988 à Séoul. Les 10 médailles d’or individuelles décernées à des femmes sont allées à des Chinoises, comme 8 des 10 médailles d’argent.
Les explications que l’on donne à cette suprématie sur les sites spécialisés sont toujours un peu les mêmes. Le tennis de table, « ping pang qiu » en chinois, est l’un des sports les plus pratiqués dans le pays de 1,4 milliard d’habitants, au moins depuis que le Grand Timonier de la révolution communiste chinoise, Mao Zedong, en a fait le sport national. Tous les enfants le pratiquent à l’école et les plus doués sont rapidement dirigés vers des systèmes de développement. Plus on monte les échelons, plus la compétition devient féroce. Les meilleurs peuvent aspirer à la célébrité, mais peuvent aussi être rapidement remplacés à la moindre faiblesse.
De rares failles, parfois
Le pays pourrait accaparer les trois places du podium olympique si on n’avait pas changé à Rio les règles pour limiter le nombre de représentants par pays à deux par épreuve, afin de laisser au moins une chance aux autres. Jusque-là, la Chine avait remporté 28 des 32 médailles qui avaient été en jeu depuis 1988, toutes couleurs confondues.
Mais cette « Grande Muraille » peut malgré tout être percée. C’est ce qu’a montré la paire japonaise composée de Jun Mizutani et de Mima Ito lundi, lors de la première finale de la nouvelle épreuve de double mixte. Dans un match qui est allé à la limite des sept parties, les Japonais ont défait les Chinois Xu Xin et Liu Shiwen, deux anciens champions du monde. « Un miracle s’est produit », a alors constaté Jun Mizutani, qui avait encore du mal à le croire.
Ah oui ! Et à la finale pour le reste du monde, vendredi, c’est à un pongiste allemand d’origine ukrainienne, Dimitrij Ovtcharov, qu’est allée la médaille de bronze après sa victoire sur le Taïwanais Lin Yun-ju.
Le pays pourrait accaparer les trois places du podium olympique si on n’avait pas changé à Rio les règles pour limiter le nombre de représentants par pays à deux par épreuve, afin de laisser au moins une chance aux autres