Le Devoir

Une annonce pour les garderies aux airs de campagne

Avec les 6 milliards d’Ottawa, Québec s’engage entre autres à améliorer le cadre de travail des éducatrice­s et éducateurs

- JACQUES NADEAU LE DEVOIR

Les rumeurs de campagne électorale fédérale estivale bruissaien­t dans le parc Lalancette à Montréal, où Justin Trudeau avait donné rendezvous à François Legault jeudi. Les deux premiers ministres y ont officialis­é une « entente asymétriqu­e » de 6 milliards, née de l’engagement du premier ministre fédéral à mettre sur pied un système de services de garde d’un océan à l’autre.

Les rumeurs de campagne électorale fédérale estivale bruissaien­t dans le parc Lalancette, jeudi, à Montréal, où Justin Trudeau avait donné rendez-vous à son homologue québécois François Legault. Les deux premiers ministres ont officialis­é une « entente asymétriqu­e » Canada-Québec née de l’engagement du premier ministre fédéral à mettre sur pied un « système de services de garde d’enfants de grande qualité » d’un océan à l’autre.

M. Legault n’avait que des bons mots à l’égard de Justin Trudeau après avoir reçu sa part du Plan pancanadie­n d’apprentiss­age et de garde des jeunes enfants, soit 6 milliards de dollars sur 5 ans. À l’entendre, il s’apprêtait à empocher un chèque en blanc. « C’est important de le dire : le “6 milliards” est sans condition. Donc, c’est le gouverneme­nt du Québec qui va décider de son utilisatio­n », a répété sur tous les tons le chef du gouverneme­nt québécois jeudi dans l’espace vert de l’arrondisse­ment Mercier–Hochelaga-Maisonneuv­e.

Le gouverneme­nt fédéral déboursera près de 30 milliards de dollars de 2021-2022 à 2025-2026 afin d’épauler les provinces à instaurer des places de garderie à « une moyenne de 10 $ par jour », et à « améliorer et élargir les services de garde avant et après l’école afin d’offrir une plus grande souplesse aux parents qui travaillen­t », peut-on lire dans le dernier budget du Canada.

« Le Québec a déjà atteint tou[tes] ces attentes », a fait valoir M. Trudeau derrière un des deux lutrins placés stratégiqu­ement devant un module de jeux sur lequel des enfants s’amusaient comme si de rien n’était.

Le Québec offre déjà des places à « 8 dollars », a-t-il souligné, avant de se faire reprendre. « 8,50 $! » a lancé M. Legault. « 8,50 $, mais il y a de l’argent qui s’en vient… Donc, peutêtre qu’on va voir autre chose… » a poursuivi M. Trudeau. Face au grincement de dents du premier ministre québécois, il s’est empressé d’ajouter : « C’est à eux de décider. »

Rémunérati­on « équitable »

Le gouverneme­nt québécois a décidé de consacrer une « portion significat­ive » du transfert de près de 6 milliards au parachèvem­ent du réseau des services de garde éducatifs à l’enfance et à l’améliorati­on des conditions de travail des éducatrice­s, a expliqué M. Legault sous un soleil de plomb. Selon lui, les éducatrice­s doivent percevoir une rémunérati­on « équitable » avec les autres employés de l’État québécois détenant un diplôme d’études collégiale­s technique. « Actuelleme­nt, elles sont sous-payées par rapport à la formation qui [leur] est exigée », a convenu M. Legault au micro. « Pas mal [moins payées] », ont précisé des éducatrice­s du CPE La Vermouille­use, de passage dans le parc Lalancette au moment des discours primominis­tériels.

Le chef du gouverneme­nt québécois a aussi précisé que son équipe « est en train de quadriller le Québec pour être bien sûr que les 37 000 [nouvelles places promises en centres de la petite enfance (CPE)] répondent à toute la demande » des Québécois. Le ministre de la Famille, Mathieu Lacombe, dévoilera sa stratégie de développem­ent du réseau à la rentrée.

Au 31 mars 2020, le réseau comptait un nombre total de 306 152 places sous permis, dont 235 731 places subvention­nées dans des CPE, des services de garde en milieu familial et des garderies subvention­nées.

Une des idées pour accroître rapidement le nombre de places à contributi­on réduite (8,50 $ par jour) consiste à convertir des garderies privées non subvention­nées en garderies privées subvention­nées à l’image d’un projet pilote lancé il y a quelques mois, a-ton glissé à l’oreille du Devoir.

Le montant restant après la retenue pour « compléter le réseau, puis pour augmenter le salaire des éducatrice­s » servira à « rembourser des dépenses qui ont déjà été faites » par l’État québécois pour déployer le réseau de services de garde éducatifs à l’enfance au fil des quelque 25 dernières années, a indiqué M. Legault. « Le Québec investit déjà 2,7 milliards par année, ce qui n’est pas le cas des autres provinces. C’est pour cela qu’il a une entente asymétriqu­e », a-t-il insisté.

Au nom du « fédéralism­e coopératif », M. Trudeau n’a trouvé rien à redire.

L’entente prévoit aussi, selon M. Legault, une aide financière du gouverneme­nt fédéral après 2025-2026. « J’espère Justin que tu as vu ça ! », a-t-il spécifié tout sourire.

M. Legault a salué M. Trudeau, laissant ce dernier dans le parc de la circonscri­ption d’Hochelaga prendre des photos avec la députée libérale, Soraya Martinez, et des sympathisa­nts. Un air de campagne électorale flottait autour d’eux.

C’est important de le dire : le “6 milliards” est sans condition. Donc, c’est le gouverneme­nt du Québec qui va décider »

de son utilisatio­n FRANÇOIS LEGAULT

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