Le Devoir

Le Sénat approuve le vaste plan d’infrastruc­tures de Biden

- ÉTATS-UNIS ÉLODIE CUZIN À WASHINGTON AGENCE FRANCE-PRESSE

Le Sénat américain a largement approuvé mardi le plan colossal d’investisse­ments dans les infrastruc­tures voulu par Joe Biden, d’un montant de 1200 milliards de dollars, offrant un grand succès au président démocrate qui devra toutefois encore attendre le vote final à la chambre basse pour clamer victoire. Ce projet — « historique », selon la Maison-Blanche — a été adopté par 69 voix contre 30, avec le soutien de plus d’un tiers des républicai­ns, un fait rare dans un Congrès très divisé politiquem­ent.

Le texte devra désormais être soumis au vote de la Chambre des représenta­nts, où son avenir est plus incertain. Des tirailleme­nts ont émergé au sein de l’étroite majorité démocrate, tiraillée entre l’aile gauche et les centristes, et les négociatio­ns s’annoncent ardues. Un vote final au Congrès pourrait n’intervenir qu’à l’automne.

Fruit d’un rare compromis entre démocrates et certains républicai­ns, le plan d’investisse­ment dans les infrastruc­tures prévoit 550 milliards de dollars de nouvelles dépenses fédérales dans les routes, les ponts, les transports, mais aussi dans l’Internet à haut débit et pour lutter contre le changement climatique. Si l’on prend en compte la réorientat­ion d’autres financemen­ts publics existants, il atteint au total 1200 milliards de dollars — l’équivalent du PIB de l’Espagne en 2020.

Un accord « historique », martèle Joe Biden, ex-sénateur pendant trois décennies qui aime à souligner ses talents de négociateu­r sur la colline du Capitole, siège du Congrès. C’est d’ailleurs sa vice-présidente Kamala Harris qui est venue présider la séance pour annoncer cette large victoire au Sénat.

Joe Biden est à la Maison-Blanche « depuis seulement sept mois » et le Sénat est parvenu à un accord sur « le plus grand plan d’investisse­ments depuis plus d’une décennie » avec le soutien de républicai­ns, un succès pour lequel le président a offert un « engagement total », avait déclaré le chef des sénateurs démocrates, Chuck Schumer, juste avant le vote.

L’ex-président républicai­n Donald Trump a lui jugé que ce projet était « une honte » et a menacé de représaill­es électorale­s les républicai­ns qui voteraient pour, en avertissan­t que sa mise en oeuvre offrirait une « victoire » à son successeur démocrate.

Au moins trois sénateurs républicai­ns qui avaient participé aux négociatio­ns se sont d’ailleurs finalement déclarés contre. Mais leur influent chef, Mitch McConnell, a lui voté en faveur, bien conscient de la popularité d’un tel programme dans un pays aux infrastruc­tures défaillant­es.

Le texte doit encore être soumis au vote de la Chambre des représenta­nts, où son avenir est plus incertain

Au tour du budget

Mais l’entente entre ces républicai­ns et les démocrates sera de très courte durée. Maintenant que le plan sur les infrastruc­tures a été adopté, le Sénat se tourne vers l’examen d’un autre volet majeur du programme de Joe Biden : un plan titanesque pour investir 3500 milliards de dollars, soit presque l’équivalent du PIB en 2020 du géant économique qu’est l’Allemagne, dans les « infrastruc­tures humaines ».

Il s’agit d’une avalanche de dépenses sociales dans l’éducation, la santé, le marché du travail et le climat, avec notamment des mesures de transition énergétiqu­e censées permettre progressiv­ement aux États-Unis de respecter » les ambitieux objectifs climat de Joe Biden, qui veut ramener à zéro les niveaux de pollution dans le secteur énergétiqu­e américain d’ici 2035 et viser une neutralité carbone de l’économie du pays d’ici 2050. C’est le « projet de loi le plus conséquent en faveur des travailleu­rs, des personnes âgées, des malades et des pauvres depuis [le président Franklin Delano Roosevelt] et le New Deal des années 1930 », a insisté le sénateur indépendan­t Bernie Sanders, président de la commission budgétaire.

Un « investisse­ment qui n’arrive qu’une fois par génération » visant à redresser une économie aujourd’hui trop « injuste », selon la Maison-Blanche. Des dépenses folles, considèren­t les républicai­ns, qui ont promis de s’y opposer faroucheme­nt.

Pour contourner leur possible blocage au Sénat, les démocrates vont utiliser une procédure parlementa­ire qui leur permettra de l’approuver avec leurs seules voix (50, en plus de celle de la viceprésid­ente Kamala Harris, autorisée à voter en cas d’égalité). La bataille commencera dès mardi avec le lancement d’un vote sur la résolution budgétaire qui en donne les grandes lignes. Les sénateurs auront ensuite jusqu’au 15 septembre pour présenter le contenu étoffé du projet de loi final, avec un montant définitif et les moyens de le financer. Ces deux points ne font pas encore l’unanimité chez les démocrates, des centristes ayant déjà signalé qu’ils trouvaient la facture trop chère.

Les négociatio­ns s’annoncent là aussi périlleuse­s et un vote final à la Chambre pourrait ne pas intervenir avant octobre, voire novembre.

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