L’UE ne cède pas à la pression de la Russie
L’UE, qui refuse de payer le gaz russe en roubles, se prépare à une suspension des approvisionnements
L’Union européenne (UE) refuse de payer ses achats de gaz à la Russie en roubles et doit se préparer à une rupture dans ses approvisionnements, ont averti lundi la Commission européenne et la présidence française du Conseil à l’issue d’une réunion d’urgence des ministres de l’Énergie des 27 à Bruxelles.
La demande de Moscou de payer les achats en roubles est « une modification unilatérale et injustifiée des contrats, et il est légitime de la rejeter », a déclaré la commissaire à l’Énergie, Kadri Simson.
« En effet, 97 % des contrats [conclus par les entreprises européennes] spécifient la devise pour le paiement, et il s’agit soit de l’euro, soit du dollar américain », a-t-elle précisé.
Kadri Simson a affirmé ne pas avoir connaissance d’ouverture de comptes en roubles. « Des paiements sont prévus pour la mi-mai, et la majorité des entreprises respecteront les règles des contrats », a-t-elle affirmé. La ministre française de la Transition écologique, Barbara Pompili, présidente de la réunion, a confirmé la « volonté de respecter les contrats ».
« Nous devons nous préparer à une suspension des approvisionnements », a averti la Commissaire européenne.
Plusieurs États membres ont demandé des clarifications sur le paiement en roubles par l’entremise de l’ouverture d’un compte spécial, et Kadri Simson a promis des « précisions détaillées pour expliquer aux entreprises ce qu’elles peuvent faire ou non ».
La Pologne et la Bulgarie ont réglé leurs achats dans la devise prévue dans leurs contrats avec Gazprom, le géant gazier russe, et ont refusé d’ouvrir un second compte en roubles. La compagnie gazière russe a, en rétorsion, suspendu ses livraisons, considérant que le règlement n’avait pas été effectué.
« Il n’y a pas de risques immédiats pour les approvisionnements », a assuré la commissaire. « Mais nous ne pourrons pas remplacer les 150 milliards de mètres cubes de gaz achetés à la Russie par d’autres sources. Ce n’est pas tenable », a-t-elle reconnu.
« Nous pouvons gérer le remplacement de deux tiers des approvisionnements en gaz russe », a-t-elle précisé.
Kadri Simson a insisté sur la nécessité pour les États membres de remplir leurs réserves, et Barbara Pompili a souligné le caractère impératif de « diversifier la manière de produire l’électricité et de se chauffer ».
« L’Europe doit se débarrasser de la dépendance aux énergies fossiles russes », a affirmé la ministre polonaise Anna Moskwa. « Nos réserves seront à 100 % de leurs capacités pour cet hiver », a-t-elle assuré. « Du gaz naturel liquéfié américain a commencé à arriver par la Lituanie, et nous allons nous fournir en gaz de Norvège par le Danemark », a-t-elle expliqué.
Finalisation de l’embargo pétrolier
Les ministres ont également eu un échange sur un arrêt progressif des achats de pétrole et de produits pétroliers russes planifié par l’UE afin de tarir les financements européens pour la guerre menée par le Kremlin en Ukraine. Mais aucune décision n’a été prise.
« Un nouveau paquet de sanctions est en préparation, mais ce n’était pas le sujet de la réunion », a déclaré Barbara Pompili.
« Nous travaillons sur un nouveau paquet de sanctions », a confirmé la commissaire Simson.
« Une réunion du collège [l’ensemble des commissaires] va se tenir mardi à Strasbourg », en marge de la session du Parlement, « et la présidente Ursula von der Leyen précisera ce qui a été décidé », a-t-elle indiqué.
La proposition est « finalisée et sera adoptée mardi par la Commission », a indiqué à l’Agence France-Presse une source européenne.
« Je pense que la Commission proposera demain [mardi] un 6e paquet de sanctions, y compris le retrait du pétrole russe », a déclaré le ministre allemand Robert Habeck.
La proposition sera soumise mercredi aux États membres pour adoption. « Je ne sais pas si cela sera possible d’ici au week-end », a toutefois indiqué le ministre allemand.
Si les 27 s’entendent sur cette mesure, l’arrêt des achats de pétrole et de produits pétroliers à la Russie sera progressif, sur six à huit mois, mais avec des mesures à effet immédiat, notamment une taxe sur le transport par tankers, a confié un responsable européen.
L’UE a déjà imposé un embargo sur le charbon russe et fermé ses ports aux navires russes, à l’exception du transport d’hydrocarbures.
Les principaux importateurs de combustibles fossiles de la Russie (gaz, pétrole brut, produits pétroliers et charbon) sont l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas et la France.
L’Europe doit se débarrasser de la dépendance aux énergies fossiles russes
ANNA MOSKWA